Hier, dans l'Utah, par la grâce de "Seuls les vautours", de Nicolas Zeimet, et ce soir, notre voyage immobile nous emmène un peu plus au nord, dans l'Etat voisin du Wyoming. Avec la découverte d'un auteur dont j'entends parler depuis un certain temps, il fallait franchir le pas, et j'ai choisi pour cela d'attaquer par sa série policière, construite autour du shérif Walter Longmire. Cet auteur, c'est Craig Johnson et notre lecture du soir est "Little Bird", publié aux éditions Gallmeister et également disponibleen poche aux éditions Points. Un vrai polar, lent et qui s'assombrit au fil des chapitres, un peu comme le temps, d'ailleurs, où l'humour contrebalance un certain désenchantement. Et, au coeur de ce livre et de cette série qui débute, un duo comme on les aime, Walter Longmire et son meilleur ami, un indien cheyenne du nom de Henry Standing Bear...
Walter Longmire est le shérif du comté d'Absaroka, situé au pied des Monts Big Horn, dans le Wyoming. Un coin plutôt tranquille où Longmire fait appliquer la loi depuis des années, qu'il pleuve, qu'il neige ou qu'il vente (et quand ça s'y met, ça pleut, neige et vente très, très fort). Mais les années ont passé, le shérif a perdu sa femme et depuis, il songe à passer la main.
Comme l'a fait avant lui son mentor Lucian Connally, Longmire voudrait trouver le candidat idéal pour lui succéder, refaire un mandat pour lui mettre le pied à l'étrier et ensuite, quitter ses fonctions pour goûter une retraite méritée dans la maison qu'il a commencée à construire, sans jamais l'achever ni la meubler, perdu après le décès de sa chère Martha.
Pour prendre sa place, Longmire verrait bien son adjointe, Victoria Moretti, alias Vic. Une jeune femme ravissante mais au franc parler dévastateur, originaire de Philadelphie. C'est un peu par hasard qu'elle a atterri là et c'est un peu en lui forçant la main que Longmire l'a convaincue de devenir son adjointe, de dont il se félicite chaque jour.
Mais le shérif est persuadé qu'elle va bientôt repartir sous d'autres cieux et accepter un poste plus prestigieux que shérif du comté d'Absaroka. Il en serait ravi pour elle, mais cela lui laisserait peu d'options pour lui succéder, une seule, en fait : Turk Connally, le neveu de Lucian. Et ça, ça n'a rien d'enthousiasmant, car il n'aime pas ce garçon un peu trop ambitieux à ses yeux...
Derniers personnages importants dans la vie de Walt Longmire : Henry Standing Bear et Vonnie Hayes. Avec le premier, un Cheyenne, ils se connaissent depuis leur enfance et ont tout connu ensemble, y compris le Vietnam. Leur relation repose sur une complicité tacite, mais aussi sur leurs différences et sur quelques vacheries régulièrement balancées par l'un ou l'autre.
La seconde, Walt la connaît aussi depuis un bail. Fille d'un des hommes les plus riches de la région, elle est revenue dans le Wyoming pour y vivre aux côtés de sa mère à la mort de son père. Pour la première fois depuis le décès de son épouse, Walt s'intéresse à une femme et cette femme, c'est Vonnie. Un faible partagé, et pas seulement par eux deux, mais par tous les proches du shérif, qui le verraient bien se remettre en couple.
"Little Bird" débute en même temps que l'automne, une saison qui, dans le Wyoming, ressemble plus à l'annonce d'un hiver précoce (en témoigne le violent blizzard qui s'abat sur le comté d'Absaroka dans le cours du livre) qu'à l'été indien qu'on ne connaît que dans le nord des Etats-Unis, comme le dit la chanson.
La vie paisible du comté est alors troublée par l'annonce de la découverte d'un corps dans une pâture où des moutons ont l'habitude de déambuler et de paître. Le taux de criminalité dans le coin est quasi nul, Walt songe d'abord à un accident de chasse. Mais voilà, Vic, envoyée sur place, constate que cette mort a tout d'un meurtre...
A commencer par la personnalité de la victime... Cody Pritchard est en effet bien connu du bureau du shérif. Quelques années plus tôt, il a été jugé pour le viol d'une jeune indienne, Melissa Little Bird. Pritchard n'était pas seul, trois autres garçons, l'accompagnaient et Melissa, qui souffre d'un retard mental, n'a pas su se défendre face à eux.
L'affaire a fait grand bruit, quatre adolescents blancs s'en prenant à une adolescente amérindienne, dans un climat de tensions permanentes entre communautés... Et, comme rien n'est jamais simple, malgré les preuves irréfutables, la justice s'est montrée bien trop clémente. Pas impossible, donc, qu'on ait voulu appliquer une sentence plus lourde à l'un des coupables...
Un crime, pour Walt Longmire, c'est déjà une mauvaise nouvelle. Un crime qui sent la vengeance à plein nez, encore plus. Mais, là, un crime qui touche à la communauté indienne vivant dans la réserve la plus proche, c'est le pire qu'on puisse imaginer. Non, en fait, il y a encore pire, pour Walt Longmire : qu'il doive considérer son meilleur ami, Henry Standing Bear, cousin de Melissa Little Bird, comme un suspect...
"Little Bird", c'est un vrai polar à l'ancienne. Ne pensez pas y trouver un rythme de thriller hollywoodien, c'est tout le contraire. Longmire prend le temps qu'il faut pour mener son enquête, traînant même des pieds pour essayer d'éviter les questions qui fâchent. Mais, de toute façon, on sent bien que la vie à Durant, principale bourgade du comté d'Absaroka, suit son propre rythme.
N'allez pas pour autant croire qu'il n'y a pas de tension. Au contraire, elle est palpable. On pourrait même dire qu'elles sont palpables, car ces tensions sont de différentes natures : celles liées à la succession implicitement annoncée de Walt ; celles liées à l'enquête elle-même et donc, à la mort de Cody Pritchard ; celles liées à la possibilité que le meurtrier soit un Indien. Et qu'il s'agisse d'Henry.
La relation entre les deux amis est au coeur de ce roman. Il y a le coeur et la raison. Le coeur de Longmire qui refuse d'envisager que son ami de toujours soit devenu, même pour des raisons compréhensibles, un assassin. Et la raison qui lui rappelle qu'il n'a pas le droit d'écarter un suspect sous prétexte qu'il est son ami...
Walt et Henry ne sont pas des grands bavards, encore moins des expansifs. Ils se connaissent depuis si longtemps qu'ils se comprennent sans rien dire, mais là, le silence entre eux est lourd. Car Henry n'est pas bête et sait pertinemment qu'il a le profil pour avoir tué le jeune violeur. Une seule fois ils vont aborder la question de front. Une conversation sur le ton de la dérision, comme ils en ont l'habitude, mais qui trahit une certaine gêne.
Walter Longmire, dans cette affaire, manipule plusieurs bâtons de dynamite. Par moments, on pourrait même dire qu'il jongle avec, tant cette histoire prend des tours explosifs. Le mode opératoire du tueur permet de dresser une liste assez exhaustive des tueurs potentiels, si l'on exclut l'idée d'un assassin de passage.
Mais, tous ces noms ont de quoi embarrasser un shérif qui préfère le plus souvent jouer les diplomates que les pères Fouettard. Il les connaît tous, très bien, pour certains, il mesure aussi les conséquences que pourraient avoir certaines accusations s'il les portait sans avoir de quoi les étayer plus que solidement.
Et des preuves, il n'en a guère. Des indices, un peu plus, mais ils ne servent qu'à le plonger un peu plus dans une bouteille à l'encre... Le tueur est un malin, qui a décidé de brouiller les pistes et de jouer avec le shérif. Un shérif vieillissant, mal dans sa peau, dont le feu sacré est un peu en berne et qui se pose tellement de questions existentielles...
Mine de rien, "Little Bird" est un roman très noir. On ne le dirait pas, passées les premières pages, car le ton est très humoristique, les personnages se vannent, parfois à la limite, lorsqu'il s'agit des plaisanteries des blancs envers les indiens, on sent bien qu'on est dans une petite ville, dans un univers où les personnes en savent long sur leurs concitoyens.
Mais l'humour lui-même se teinte volontiers de noir et, s'il reste présent pendant longtemps, il finit par s'effacer lorsque l'intrigue se densifie et prend toute la place. Une dernière partie très rude, par tout ce qu'elle révèle et ne laisse plus vraiment de place aux piques. Un vrai signe, dans cet univers dans lequel les vacheries qu'on lance à tous moments semblent faire partie du quotidien.
Une des grandes qualités de "Little Bird", ce sont ces personnages. Aucun n'est anodin, aucun n'est passe-partout, tous ont des caractéristiques qui font qu'on s'attache (enfin, pas forcément à tous...) et qu'on se dit qu'on irait bien passer un moment à Durant. Il y a un côté très familial dans ce groupe de personnages que l'on voit évoluer et qu'on a envie de suivre dans de nouvelles enquêtes.
Et puis, il y a ce décor, si particulier, du Wyoming. Ces hautes montagnes, qui ont leur rôle dans l'histoire, vous le verrez, ces grands espaces qui nous rappellent que nous sommes dans des décors de western. Il y a d'ailleurs de ça, dans "Little Bird". Pas par le côté folklorique ou par les clichés des cowboys et des indiens.
Mais parce qu'on est bien dans un territoire rural, où la modernité a trouvé sa place, mais sans tout écraser (Longmire refuse d'avoir un téléphone portable, par exemple). On est dans une Amérique de cocagne, pas forcément de carte postale, mais on est vraiment loin des thrillers urbains classiques. Et l'on conserve aussi cette mentalité pionnière qui rappelle le Far West.
Enfin, un dernier point. Dans ce roman, je parle sans autre repère, puisque je découvre l'auteur, Craig Johnson insuffle un zeste de fantastique. Je ne vais pas m'étendre là-dessus, mais en ces terres qui conservent la marque fortement enracinée des peuples autochtones, des tribus indiennes qui y vécurent avant d'être décimées et regroupées en réserves, quel vilain mot...
Cet aspect très particulier, qui obsède Longmire alors qu'il fait tout pour essayer de garder la tête froide, tient une place à part dans l'intrigue. A la fois inextricablement liée et pourtant extérieure, car certainement plus rattachée aux personnages qu'à l'histoire de ce premier tome de la série. Mais, je suis curieux de voir comment cette dimension va évoluer dans les prochaines enquêtes.
J'avais envie depuis un moment de découvrir Craig Johnson, je ne suis pas déçu du voyage. De l'humour au décor, en passant par la noirceur de cette intrigue qui s'avère plus complexe qu'on ne pourrait le penser de prime abord, sans oublier cette galerie de personnages qui, à elle seule, justifie la fidélité à la série, je suis conquis.
Et je suis près à rapidement reprendre le chemin du Wyoming, Etat que connaît bien Johnson pour y vivre lui-même, dans ce comté d'Absaroka, imaginaire et pourtant, tellement attirant. Le paradoxe de ces polars et thrillers qui se déroulent dans ces coins de paradis terrestres, c'est qu'on se demande comment peut s'y déchaîner la violence justifiant les enquêtes... Qu'importe, et longue vie à Longmire !
Ah, j'ai failli oublier, la chanson d'Annie Lennox, en solo, dont un bout du texte sert de titre à notre billet ! Oubli réparé...
Walter Longmire est le shérif du comté d'Absaroka, situé au pied des Monts Big Horn, dans le Wyoming. Un coin plutôt tranquille où Longmire fait appliquer la loi depuis des années, qu'il pleuve, qu'il neige ou qu'il vente (et quand ça s'y met, ça pleut, neige et vente très, très fort). Mais les années ont passé, le shérif a perdu sa femme et depuis, il songe à passer la main.
Comme l'a fait avant lui son mentor Lucian Connally, Longmire voudrait trouver le candidat idéal pour lui succéder, refaire un mandat pour lui mettre le pied à l'étrier et ensuite, quitter ses fonctions pour goûter une retraite méritée dans la maison qu'il a commencée à construire, sans jamais l'achever ni la meubler, perdu après le décès de sa chère Martha.
Pour prendre sa place, Longmire verrait bien son adjointe, Victoria Moretti, alias Vic. Une jeune femme ravissante mais au franc parler dévastateur, originaire de Philadelphie. C'est un peu par hasard qu'elle a atterri là et c'est un peu en lui forçant la main que Longmire l'a convaincue de devenir son adjointe, de dont il se félicite chaque jour.
Mais le shérif est persuadé qu'elle va bientôt repartir sous d'autres cieux et accepter un poste plus prestigieux que shérif du comté d'Absaroka. Il en serait ravi pour elle, mais cela lui laisserait peu d'options pour lui succéder, une seule, en fait : Turk Connally, le neveu de Lucian. Et ça, ça n'a rien d'enthousiasmant, car il n'aime pas ce garçon un peu trop ambitieux à ses yeux...
Derniers personnages importants dans la vie de Walt Longmire : Henry Standing Bear et Vonnie Hayes. Avec le premier, un Cheyenne, ils se connaissent depuis leur enfance et ont tout connu ensemble, y compris le Vietnam. Leur relation repose sur une complicité tacite, mais aussi sur leurs différences et sur quelques vacheries régulièrement balancées par l'un ou l'autre.
La seconde, Walt la connaît aussi depuis un bail. Fille d'un des hommes les plus riches de la région, elle est revenue dans le Wyoming pour y vivre aux côtés de sa mère à la mort de son père. Pour la première fois depuis le décès de son épouse, Walt s'intéresse à une femme et cette femme, c'est Vonnie. Un faible partagé, et pas seulement par eux deux, mais par tous les proches du shérif, qui le verraient bien se remettre en couple.
"Little Bird" débute en même temps que l'automne, une saison qui, dans le Wyoming, ressemble plus à l'annonce d'un hiver précoce (en témoigne le violent blizzard qui s'abat sur le comté d'Absaroka dans le cours du livre) qu'à l'été indien qu'on ne connaît que dans le nord des Etats-Unis, comme le dit la chanson.
La vie paisible du comté est alors troublée par l'annonce de la découverte d'un corps dans une pâture où des moutons ont l'habitude de déambuler et de paître. Le taux de criminalité dans le coin est quasi nul, Walt songe d'abord à un accident de chasse. Mais voilà, Vic, envoyée sur place, constate que cette mort a tout d'un meurtre...
A commencer par la personnalité de la victime... Cody Pritchard est en effet bien connu du bureau du shérif. Quelques années plus tôt, il a été jugé pour le viol d'une jeune indienne, Melissa Little Bird. Pritchard n'était pas seul, trois autres garçons, l'accompagnaient et Melissa, qui souffre d'un retard mental, n'a pas su se défendre face à eux.
L'affaire a fait grand bruit, quatre adolescents blancs s'en prenant à une adolescente amérindienne, dans un climat de tensions permanentes entre communautés... Et, comme rien n'est jamais simple, malgré les preuves irréfutables, la justice s'est montrée bien trop clémente. Pas impossible, donc, qu'on ait voulu appliquer une sentence plus lourde à l'un des coupables...
Un crime, pour Walt Longmire, c'est déjà une mauvaise nouvelle. Un crime qui sent la vengeance à plein nez, encore plus. Mais, là, un crime qui touche à la communauté indienne vivant dans la réserve la plus proche, c'est le pire qu'on puisse imaginer. Non, en fait, il y a encore pire, pour Walt Longmire : qu'il doive considérer son meilleur ami, Henry Standing Bear, cousin de Melissa Little Bird, comme un suspect...
"Little Bird", c'est un vrai polar à l'ancienne. Ne pensez pas y trouver un rythme de thriller hollywoodien, c'est tout le contraire. Longmire prend le temps qu'il faut pour mener son enquête, traînant même des pieds pour essayer d'éviter les questions qui fâchent. Mais, de toute façon, on sent bien que la vie à Durant, principale bourgade du comté d'Absaroka, suit son propre rythme.
N'allez pas pour autant croire qu'il n'y a pas de tension. Au contraire, elle est palpable. On pourrait même dire qu'elles sont palpables, car ces tensions sont de différentes natures : celles liées à la succession implicitement annoncée de Walt ; celles liées à l'enquête elle-même et donc, à la mort de Cody Pritchard ; celles liées à la possibilité que le meurtrier soit un Indien. Et qu'il s'agisse d'Henry.
La relation entre les deux amis est au coeur de ce roman. Il y a le coeur et la raison. Le coeur de Longmire qui refuse d'envisager que son ami de toujours soit devenu, même pour des raisons compréhensibles, un assassin. Et la raison qui lui rappelle qu'il n'a pas le droit d'écarter un suspect sous prétexte qu'il est son ami...
Walt et Henry ne sont pas des grands bavards, encore moins des expansifs. Ils se connaissent depuis si longtemps qu'ils se comprennent sans rien dire, mais là, le silence entre eux est lourd. Car Henry n'est pas bête et sait pertinemment qu'il a le profil pour avoir tué le jeune violeur. Une seule fois ils vont aborder la question de front. Une conversation sur le ton de la dérision, comme ils en ont l'habitude, mais qui trahit une certaine gêne.
Walter Longmire, dans cette affaire, manipule plusieurs bâtons de dynamite. Par moments, on pourrait même dire qu'il jongle avec, tant cette histoire prend des tours explosifs. Le mode opératoire du tueur permet de dresser une liste assez exhaustive des tueurs potentiels, si l'on exclut l'idée d'un assassin de passage.
Mais, tous ces noms ont de quoi embarrasser un shérif qui préfère le plus souvent jouer les diplomates que les pères Fouettard. Il les connaît tous, très bien, pour certains, il mesure aussi les conséquences que pourraient avoir certaines accusations s'il les portait sans avoir de quoi les étayer plus que solidement.
Et des preuves, il n'en a guère. Des indices, un peu plus, mais ils ne servent qu'à le plonger un peu plus dans une bouteille à l'encre... Le tueur est un malin, qui a décidé de brouiller les pistes et de jouer avec le shérif. Un shérif vieillissant, mal dans sa peau, dont le feu sacré est un peu en berne et qui se pose tellement de questions existentielles...
Mine de rien, "Little Bird" est un roman très noir. On ne le dirait pas, passées les premières pages, car le ton est très humoristique, les personnages se vannent, parfois à la limite, lorsqu'il s'agit des plaisanteries des blancs envers les indiens, on sent bien qu'on est dans une petite ville, dans un univers où les personnes en savent long sur leurs concitoyens.
Mais l'humour lui-même se teinte volontiers de noir et, s'il reste présent pendant longtemps, il finit par s'effacer lorsque l'intrigue se densifie et prend toute la place. Une dernière partie très rude, par tout ce qu'elle révèle et ne laisse plus vraiment de place aux piques. Un vrai signe, dans cet univers dans lequel les vacheries qu'on lance à tous moments semblent faire partie du quotidien.
Une des grandes qualités de "Little Bird", ce sont ces personnages. Aucun n'est anodin, aucun n'est passe-partout, tous ont des caractéristiques qui font qu'on s'attache (enfin, pas forcément à tous...) et qu'on se dit qu'on irait bien passer un moment à Durant. Il y a un côté très familial dans ce groupe de personnages que l'on voit évoluer et qu'on a envie de suivre dans de nouvelles enquêtes.
Et puis, il y a ce décor, si particulier, du Wyoming. Ces hautes montagnes, qui ont leur rôle dans l'histoire, vous le verrez, ces grands espaces qui nous rappellent que nous sommes dans des décors de western. Il y a d'ailleurs de ça, dans "Little Bird". Pas par le côté folklorique ou par les clichés des cowboys et des indiens.
Mais parce qu'on est bien dans un territoire rural, où la modernité a trouvé sa place, mais sans tout écraser (Longmire refuse d'avoir un téléphone portable, par exemple). On est dans une Amérique de cocagne, pas forcément de carte postale, mais on est vraiment loin des thrillers urbains classiques. Et l'on conserve aussi cette mentalité pionnière qui rappelle le Far West.
Enfin, un dernier point. Dans ce roman, je parle sans autre repère, puisque je découvre l'auteur, Craig Johnson insuffle un zeste de fantastique. Je ne vais pas m'étendre là-dessus, mais en ces terres qui conservent la marque fortement enracinée des peuples autochtones, des tribus indiennes qui y vécurent avant d'être décimées et regroupées en réserves, quel vilain mot...
Cet aspect très particulier, qui obsède Longmire alors qu'il fait tout pour essayer de garder la tête froide, tient une place à part dans l'intrigue. A la fois inextricablement liée et pourtant extérieure, car certainement plus rattachée aux personnages qu'à l'histoire de ce premier tome de la série. Mais, je suis curieux de voir comment cette dimension va évoluer dans les prochaines enquêtes.
J'avais envie depuis un moment de découvrir Craig Johnson, je ne suis pas déçu du voyage. De l'humour au décor, en passant par la noirceur de cette intrigue qui s'avère plus complexe qu'on ne pourrait le penser de prime abord, sans oublier cette galerie de personnages qui, à elle seule, justifie la fidélité à la série, je suis conquis.
Et je suis près à rapidement reprendre le chemin du Wyoming, Etat que connaît bien Johnson pour y vivre lui-même, dans ce comté d'Absaroka, imaginaire et pourtant, tellement attirant. Le paradoxe de ces polars et thrillers qui se déroulent dans ces coins de paradis terrestres, c'est qu'on se demande comment peut s'y déchaîner la violence justifiant les enquêtes... Qu'importe, et longue vie à Longmire !
Ah, j'ai failli oublier, la chanson d'Annie Lennox, en solo, dont un bout du texte sert de titre à notre billet ! Oubli réparé...