Mais j'ai eu envie de reprendre, j'espère que les interrogatoires que je vous proposerai vous plairont. Pour ce huitième rendez-vous littéraire, je vous présente l’interrogatoire d’un meurtrier que je vous ai fait découvrir il n'y a pas si longtemps. Je vous présente donc cet interrogatoire de l'auteur Frédéric Bellec.
C'est un auteur que j'ai découvert avec son roman "Exilium - Tome 1, L'internat".
Frédéric Bellec est vraiment très sympathique et il s'est prêté avec plaisir à mes questions. Il a d'ailleurs vraiment joué le jeu jusqu'au bout en ce comportant comme un vrai accusé !
Vous pouvez d'ailleurs retrouvez ma chronique ici.
Bonjour cher meurtrier. Merci d’avoir accepté cette interview. Pour les enquêteurs qui ne vous connaissent pas encore, pouvez-vous me parler de vous et de vos précédents romans ?Ah, je suis donc un meurtrier avant même d’avoir présenté ma défense ? Vous ne perdez pas de temps ! Merci quand même pour cette invitation dans votre salle humide et obscure, mais je veux plutôt me considérer comme présumé innocent et reste intimidé par votre interrogatoire. Je ne suis pas un habitué des lampes braquées sur mon visage pour répondre à des silhouettes cachées dans la pénombre. Mais je me prête volontiers à votre protocole, et j’espère que je parviendrai à vous convaincre de ma volonté de transparence dans des faits qui me semblent reprochés. Inutile de me proposer un avocat, je sais me défendre seul. Pourriez-vous cependant m’apporter un verre d’eau ? J’ai la gorge sèche.Je crains que parler de mon insignifiante personne intéresse peu de monde, aussi vais-je être rapide pour vous ennuyer le moins possible. Je suis né en 1965 en région parisienne, mais c’est sur la Côte d’Azur que j’ai bâti mon cursus professionnel en communication visuelle, publicité et webmastering, ainsi que dans le commercial, avec des passages dans le social et l’environnement. J’ai aussi passé le plus clair de ma vie profane à développer ma passion pour les nouvelles technologies et le milieu informatique, avec plusieurs développements de projets, dont un toujours en cours.Exilium n’est pas ma première publication mais incarne mon premier roman fantastique, genre dans lequel j’ai choisi de m’impliquer jusqu’à épuisement des idées, depuis que je me suis trouvé une nouvelle passion pour le littéraire. J’ai à cœur de développer tout un microcosme autour du monde d’Exilium, qui a encore bien des choses à révéler, parallèlement à un climat de peur qui sera en permanence renouvelé dans chaque livre, en raison des découvertes plus surprenantes les unes que les autres auxquelles le lecteur sera confronté. Chaque livre sera présenté comme un témoignage, exactement comme le premier.
Votre roman mêle thriller et fantastique, comment vous est venu ce choix d’histoire ?Presque par hasard. C’est dans le cadre de mon activité d’assistant d’éducation que l’idée est venue : les craquements et les bruits bizarres dans le bâtiment d’internat, ajoutés aux histoires de fantômes du dortoir des filles, tout cela m’a donné l’idée d’en faire une histoire pour amuser les ados. Qui plus est, je vis dans le Berry, qui doit sa réputation de pays des sorciers à la littérature et à la tradition. La conjugaison de tous ces paramètres m’a motivé pour concrétiser le travail d’écriture. Et c’est probablement cette motivation qui a aussi conduit les légatis à s’intéresser d’un peu plus près à moi !
Pour ce qui est du fantastique, croyez-vous aux créatures dites fantastiques comme les loups-garous, les vampires et pourquoi pas les légatis ?Aucun loup-garou ni vampire ne m’a été présenté à ce jour, même si certaines personnes ont une personnalité mordante et nous sucent notre énergie. Malgré tout, la raison me pousse à ne pas croire en leur existence, du moins dans la forme que le cinéma nous présente. Mais toute légende a sa part initiale de vérité incomprise, et je joue sur ce facteur dans Exilium en puisant dans les peurs des anciens pour remonter jusqu’à la source de ces peurs. En revanche, les légatis sont une pure création. Enfin je dis ça pour vous rassurer. Des êtres extraordinaires si discrets que même Google n’en parle pas. Malgré cette discrétion, en cherchant bien, les légatis ne sont peut-être pas si éloignés de nous, mais ne comptez pas sur moi pour vous les livrer. Ouvrez plutôt votre cœur, laissez parler votre intuition, vous les identifierez aussi probablement mieux si vous savez lire entre les lignes !
Vous incarnez le rôle d’un pion dans le roman. Est-ce que le personnage vous ressemble ou pas ?Le personnage me ressemble inévitablement puisque je suis parti d’une base réelle pour broder l’histoire. Il y a beaucoup plus de choses authentiques dans le roman que d’inventions. Tous les personnages du roman sont inspirés de personnes réelles (collègues et élèves). Les lieux sont tous authentiques. C’était à dessein, pour apporter de la crédibilité à ce roman aux yeux des lecteurs locaux, roman présenté comme un simple témoignage. Un témoignage suffisamment réaliste pour semer le doute puisqu’une blogueuse littéraire m’a demandé par mail avec grand sérieux si les légatis existent réellement. Je lui ai répondu avec le même sérieux, mais j’ai aussi laissé une part de mystère.Gardez à l’esprit, messieurs les "questionneurs", que si vous avez lu le livre et croyez en la véracité du témoignage présenté, alors vous savez aussi que j’ai un devoir de discrétion sur mes activités avec les légatis dont je suis le nouveau "meneur". Vous ne tirerez donc rien de moi. Ils peuvent d’un simple appel de ma part et en un instant, me faire quitter ces murs sans que vous n’ayez le temps de tourner la tête pour comprendre d’où ils sortent ! En revanche, si vous pensez que ce n’est qu’un simple roman inventé de toute pièce pour distraire la jeunesse, alors vous me libérerez bientôt car n’aurez rien à charge contre moi. D’un côté comme d’un autre, vous voyez, je serai bientôt dehors. Une autre question ?
Auriez-vous aimé vous aussi avoir la même vie que Fred ou pas ?On ne connaît pas trop la vie de Fred dans ce premier livre, car ce n’est pas lui qui le plus intéressant. On parle juste de son parcours professionnel pour expliquer son arrivée en Centre France. Le Fred du livre essaie de faire son boulot comme il peut, c’est tout. Mais on devrait en savoir plus dans les prochains livres, car il n’a pas été "choisi" au hasard. La partie fantastique sera développée mais restera confinée à un environnement discret, caché du commun peuple. Ceci dit, je lui ressemble beaucoup, le cursus du personnage est directement puisé dans le mien. Un procédé qui m’a permis de gagner du temps dans la présentation des personnages tout en appuyant l’aspect crédibilité aux yeux des élèves du lycée où je travaille. Puis tout écrivain ne dépose-t-il pas une partie de lui-même dans ses ouvrages ? Ceci dit, je ne peux garantir qu’à circonstances identiques j’aurais agi de façon similaire. Peut-être que j’aurais laissé les élèves les plus turbulents se faire bouffer par le monstre :D ! Je vous dis ceci même si je devine votre doute quant à la différenciation entre le vrai Fred et le personnage du livre. Après tout, ne suis-je pas ici parce que vous me voyez comme un coupable ? Coupable de quoi d’ailleurs ? D’être un dresseur de créatures dangereuses ?
Vous avez choisi l’auto-édition. Pourquoi ce choix, quels sont selon vous les points positifs et négatifs de cette solution ?Un seul mot : LIBERTÉ. Je garde le contrôle total de mon ‘bébé’. Contrôle sur le texte, contrôle des droits d’auteur, choix du format de publication, conception du livre de A à Z (mise en page, infographies, couverture, jaquette...), aucune contrainte de style. La technologie d’impression à la demande pulvérise un peu plus chaque jour le monopole des grandes maisons d’édition.On a trop souvent reproché à l’auto-édition d’être un réservoir à déchets littéraires. C’est caricatural, car un écrivain sérieux et respectueux de ses lecteurs s’impose naturellement des étapes dans la gestation de ses livres : apprendre à écrire (avoir l’humilité d’acheter des livres sur les méthodes d’écriture), faire un plan pour éviter les incohérences dans le déroulement de l’histoire racontée, faire relire le texte final par plusieurs personnes, non pour leur demander si elles aiment ou non l’histoire (c’est accessoire), mais pour savoir si elles l’ont comprise (c’est essentiel), et voir dans cette relecture un moyen de relever les inévitables coquilles ! Entre un livre fini d’écrire et un livre prêt à être diffusé, il se passe encore du temps. La va-vite n’est pas un gage de sérieux ni d’honnêteté vis-à-vis du lectorat. Des livres fortement médiatisés ces derniers mois sont truffés de fautes impardonnables qui en disent long sur certains supposés travaux de correction, bien qu’ils soient sortis de maisons d’édition "reconnues".Ensuite, il existe aujourd’hui des grandes imprimeries à la demande qui font office d’éditeur (parce qu’ils s’occupent de la partie administrative liée à la déclaration des livres à la Bibliothèque National de France) mais ne vous privent pas de vos droits d’auteur, tout en exerçant une diffusion complète de vos ouvrages (parce que c’est aussi dans leur intérêt financier). Par expérience, si un lecteur vient commander un livre à des grandes librairies genre FNAC ou KLEBER, alors ces dernières en commanderont un stock physique suffisant pour faire face à la demande, et votre livre sera présent dans les rayons, sans que l’auteur n’ait eu à faire quoi que ce soit. Idem pour les librairies locales.Reste à l’auteur une activité primordiale mais enrichissante : le travail de promotion (qui n’est pas si contraignant que cela : pensez à votre librairie et aux salons littéraires locaux, mettez en place une page Facebook, une page web, alimentez-les par des nouvelles, offrez des exemplaires de votre livre à des blogueurs littéraires contre une chronique, contactez les médias locaux, investissez dans des objets publicitaires, comme des marque-pages personnalisés, ...) ! En 2016, bien des maisons d’éditions offrent des services moindres que ceux de l’impression à la demande. Enfin, la marge auteur est plus intéressante, la maison d’édition ne vient pas parasiter les revenus de celui qui est à la source de l’ouvrage : l’écrivain !Pour conclure sur cette question, je dirai que si un livre est bon et/ou apprécié des lecteurs, son succès viendra tout seul dans la mesure où une promotion sera faite en amont. Une maison d’édition sera malgré tout à envisager s’il y a une demande de traduction pour divers pays. Mais dans ce cas, c’est que le succès aura déjà été assuré par l’auto-édition !
Ce roman est le premier de plusieurs tomes, est-ce que vous avez une idée des prochains tomes ou pas du tout ? Si oui, pouvez-vous me révéler une petite information inédite sur le prochain tome ?Ce premier livre a posé le cœur de l’intrigue et le rôle des personnages. Le démarrage s’est donc fait en douceur. La peur distillée venait de la part d’inconnu à laquelle les personnages faisaient tous face.Le second tome, sous-titré "Les legs noirs", sera plus sombre, plus dynamique et plus effrayant aussi, parce qu’on entrera dans le fonctionnement du monde des légatis, avec une plus large part accordée au fantastique. Le premier chapitre mettra de suite dans l’ambiance et jusqu’au bout aucun répit ne sera laissé. Sueurs froides et rebondissements assurés. Le lycée sera toujours présent, mais on débordera jusque dans la forêt et d’autres endroits connus de la ville de Saint-Amand Montrond (car ça reste un roman qui fait la part belle au local). La sortie est prévue pour l’automne 2016 si je ne suis pas trop fainéant.Un troisième tome est également envisagé, ainsi que des "Chroniques parallèles", qui devraient sortir sous la forme d’un seul volume avant le troisième livre. Et ensuite ? Exilium se prête à une adaptation télé, alors je lance le bouchon ...
Comment écrivez-vous ? Avez-vous un rituel, des petites manies, un endroit où l’inspiration vous vient plus facilement ?Le travail d’écriture est une torture, un vrai labeur, quelque chose qui me réclame une tonne d’efforts. La discipline demandée est énorme et le découragement facile. Comment ne pas être dépité quand on reste une journée entière sur un seul paragraphe, parfois à rechercher un simple mot, le mot ? L’écrivain qui reste huit heures par jour devant sa page avec un sourire béat est un mythe. Le plaisir vient surtout du produit fini, pas de la transpiration.Mais l’écriture en elle-même représente une fraction temps passé à concevoir une histoire. L’essentiel du temps est consacré à la réflexion. Ne pas prendre le stylo ou le clavier n’est pas du temps perdu, le plus gros du temps de travail est concentré dans la méditation sur l’intrigue. Lorsque l’histoire est en place, les phrases viennent presque toutes seules... jusqu’à la prochaine période de réflexion.L’inspiration peut venir de n’importe où et à tout moment, d’où l’importance de garder à porter de main un calepin et un stylo pour noter tout ce qui se présente. Une musique, une conversation, un souvenir, un son, un fait divers... Tout concoure à titiller l’imagination. Et les idées qui viennent le soir — voire la nuit — dans mon lit, je les note immédiatement, car j’oublie tout au réveil ! Ensuite l’écriture à proprement parler se passe devant un large écran 21/9ème de 34 pouces, Word 2010 d’un côté et Notepad++ de l’autre où je note les idées rédigées à la hâte et en attente d’être intégrées pour être formalisées. J’ai aussi un ordinateur portable sur lequel sont synchronisés les fichiers via Dropbox, car il m’arrive de faire un petit travail d’écriture à l’extérieur.D’une façon générale, je me sens mieux le soir où la nuit pour écrire, aussi les périodes de vacances (nombreuses quand on travaille à l’éducation nationale) sont plus propices à cette activité, quand le reste du temps c’est surtout la réflexion sur l’histoire qui prime. Mais j’ai besoin de faire une totale abstraction du monde qui m’entoure pour pénétrer mon histoire. Quand enfin je suis dedans, je ris avec mes personnages, je pleure avec mes personnages, je suis terrifié avec mes personnages, je ressens absolument tout, et ces émotions me permettent de guider la suite de l’histoire.
Vous avez écrit un roman fantastique mais pour vous, quel serait le meurtre parfait ?Le "meurtre" parfait reste celui préparé par mère Nature, comme dans le film Phénomènes réalisé par M. Night Shyamalan. Non parce que le coupable ne peut être identifié, mais paradoxalement parce qu’il est connu de tous. Il est omniprésent et pourtant insaisissable et donc impossible à condamner ou à isoler. L’assassin ultime auquel il faut se soumettre, dont nous dépendons paradoxalement pour vivre, celui qui décide quand et sur qui il veut appliquer froidement sa vengeance, sans être inquiété, ni même moralement réprouvé. La totale impunité. Seuls les clairvoyants comprendraient que la nature n’a pas d’état d’âme et ne ferait que rétribuer ce qu’on lui fait subir, ce que font par ailleurs beaucoup de psychopathes qui ne sont pas conscients de mal agir. Quand mère Nature frappe, nous acquiesçons, point ! Jusqu’à la prochaine victime.
Merci de m’avoir accordé un peu de votre temps cher meurtrier, un dernier mot pour la fin ?Une conclusion, c’est toujours triste. Alors j’ai envie de la proposer sous un jour encourageant. Exilium développe quelques réflexions sur le monde qui nous entoure, et j’aimerais rappeler celle-ci : l’Amour Bannit la Crainte ! Lisez le livre, vous comprendrez tout !
Encore merci d’avoir pris le temps de répondre à mes questions.Ce fut un vrai bonheur ! Et j’ai à cœur que ce plaisir sera ressenti avec la même intensité par tous ceux qui vous liront.Bon, vous me libérez maintenant, ou je fais appel aux légatis pour me sortir de là ? Mais dans ce cas ça risque d’être un peu plus violent...