Lucifer, la nouvelle série de la Fox...

Par Amel @amelnodje

Le 25 janvier dernier, la Fox a lancé une toute nouvelle série surnaturelle intitulée " Lucifer ", basée sur le comic book éponyme signé Mike Carey et écrite par Tom Kapinos à qui l'on doit déjà " Californication ". " Lucifer ", comme son nom l'indique, est axé sur les aventures de ce maître diabolique qui, lassé de sa position de " Seigneur des Ténèbres ", décide un jour de prendre des vacances dans la bouillonnante ville de Los Angeles, célèbre pour ses excès en tout genre et pourtant paradoxalement baptisée, Cité des Anges.

Et s'il faut bien admettre une chose, c'est que cette série n'en est pas à un paradoxe près. Le principal d'ailleurs, consistant à faire passer cet anti héros, à la symbolique hautement maléfique, pour un être terriblement attachant, doté d'un magnétisme fou, quasi animal. L'idée peut paraître au premier abord surprenante et pourtant elle est oh combien légitime quand on y réfléchi deux minutes. Après tout, l'essence même du Diable ne se situerait-elle pas justement dans son incroyable pouvoir de séduction ? Mais cependant, cette volonté de rendre ce démon sympathique alors qu'il représente la tentation suprême, le désir, que dis-je, la luxure ne fut pas au goût de tout le monde si bien qu'à peine diffusée, la voici déjà controversée par des associations de catholiques pratiquants américains comme " One Million Moms " qui désapprouve ce qu'elle qualifie de glorification honteuse du Mal.

Mais revenons à la série. Si le pitch de départ a le mérite d'être original, l'ensemble, clairement formaté tout public, reste très, voir trop classique dans son déroulement, même si j'admets en être devenue " légèrement " addict au fil des épisodes. Son principal atout, marier avec talent, drame et comédie avec cet humour un brin anti - conformiste et coquin. Les scènes avec sa psy (et oui, comme tout bon " humain " qui se respecte, il suit une analyse) sont justes irrésistibles, apportant le grain de folie nécessaire pour faire toute la différence.

Construite à l'ancienne, adoptant rapidement la trame d'une série policière banale, avec des enquêtes qui auraient méritées d'être plus poussées, il est certain que ce choix pourra déstabiliser voir même décevoir bon nombre de spectateurs. Cependant, LA bonne surprise réside incontestablement dans le casting. Le choix de l'acteur gallois, Tom Ellis (" Rush ") pour incarner notre ténébreux diablotin reconverti en détective des temps modernes est juste parfait. La série repose ainsi intégralement sur les épaules de cet élégant dandy charismatique au charme sulfureux.

Dès le pilote, l'accent est mis sur le duo plus qu'improbable que forme Lucifer Morningstar (c'est son nom complet s'il vous plaît, et sachez, pour la petite histoire que " Morningstar " était également le surnom attribué dans un premier temps à Jésus Christ signifiant " Christ véritable porteur de lumière " mais bon, je m'égare...) avec Chloe Dancer, incarnée par l'actrice Lauren German, que les amateurs de la série " Chicago Fire " reconnaîtront. Elle campe ici le rôle d'un agent de police étrangement insensible aux pouvoirs de notre séduisant démon laissant ce dernier plus que perplexe. En effet, en tant que Prince des Enfers, Lucifer dispose de quelques atouts tels qu'une certaine invincibilité, mais aussi, une capacité à dévoiler les envies les plus secrètement enfouies chez tout un chacun, donnant lieu à des situations parfois très cocasses, ou encore, de disposer d'un charme le rendant irrésistible aux yeux des humains lambdas.

Au fil des épisodes, il cherchera sans cesse à la corrompre et à la séduire usant pour cela de subterfuges généralement loufoques mais, à son plus grand désarroi, cette quête restera veine. De ce cheminement, il ressortira un tiraillement quasi permanent entre le bien et le mal, entre sa méchanceté naturelle (il déteste les enfants) et sa gentillesse naissante (mais tente de les aider à sa manière très particulière). Lucifer se cherche et le personnage de Chloe, qui mériterait d'être plus développé, semble être la clé de cette quête.

Autre particularité du personnage, le fait qu'il ne veut absolument pas cacher aux yeux des mortels son identité maléfique, donnant lieu, là aussi, à bon nombre de quiproquos burlesques.

Ce qui me dérange dans la série, c'est indéniablement son manque d'audace et de fantaisie. Comme je vous l'ai déjà dit, le produit est ultra formaté et donc, malheureusement, ultra convenu. De l'image commune que nous conservons du Diable, ne subsiste ici que la séduction et un léger, mais alors très léger penchant pour la luxure. Lucifer est pourtant un personnage hautement emblématique or son traitement reste ici un peu trop superficiel, dépourvu de nuance et de noirceur.

En fait, la complexité du personnage n'apparaît qu'à de très rares et bien trop furtifs moments. Même si j'adore le jeu de Tom Ellis, la personnalité de Lucifer reste donc trop lisse et sans réelle profondeur, comme si l'on cherchait à en faire un être sage. Une gageure non ?

Autre point dispensable, les apparitions kitchissimes du frérot, l'ange Amenadiel, dont la mission consiste à convaincre Lucifer de regagner sa place au sein du Royaume pour qu'il y reprenne ses fonctions. Ces dernières ne font que plomber le récit.

Pourtant, il y aurait tant à dire sur un tel sujet. Déjà, si l'on se replonge un instant à la source de l'Histoire, il est important de souligner que contrairement aux idées reçues, Lucifer n'est autre que l'ange de la Lumière (Lux). C'est aussi le plus beau des anges qui va se révolter contre Dieu sans raison apparente, engendrant la jalousie, enviant la puissance du créateur ainsi que la tentation... Lucifer s'est détourné de Dieu pour s'inventer d'autres valeurs. Mais sincèrement, est-ce un mal en soi ? Lucifer ne serait-il pas simplement l'archétype de la liberté ? Qui ne se battrait pas pour obtenir son libre arbitre ? C'est en cela que je trouve ce personnage fascinant et emblématique et c'est aussi pour cela que je regrette que cette série ne soit finalement qu'une énième déclinaison d'un " Mentalist " ou d'un " Elementary ".