" Otages intimes "
BENAMEUR Jeanne
Le Lecteur entretient avec Jeanne, l'Auteure, une relation tout autant courtoise que constante. Donc fidèle. Chacun des romans de Jeanne lui procure des plaisirs toujours renouvelés. Via la fluidité de l'écriture. Via les thèmes abordés. Jeanne n'angotise pas. Jeanne n'use pas des atours de la prétendue modernité. Jeanne écrit comme elle l'entend, sur des sujets qui lui conviennent, des sujets dont elle considère qu'ils appartiennent à cette catégorie si rare de ceux qui concernent notre " vivre ensemble ". Une approche qu'apprécie le Lecteur et qui crée bien souvent chez Lui ce besoin du rapprochement.
Aujourd'hui, " l'otage ". En l'occurrence, Etienne, photographe de guerre, " retenu " prisonnier, comme il est convenu de l'écrire, par des individus qui luttent pour une cause. Une cause dont Jeanne ne dit rien. Pas plus qu'elle ne précise où se trouve la région où se déroule la guerre sur laquelle Etienne entendait témoigner. Pas plus qu'elle ne s'attarde sur ses ravisseurs. A peine fournit-elle quelques indications sur celui qui se prépare à lui rendre sa liberté. De toute évidence, Jeanne s'en fout. Ceci n'est pas le vrai sujet de son roman. Tout juste un sujet accessoire par le truchement duquel elle entraîne le Lecteur vers ses vrais questionnements.
Etienne rentre au pays. Le village de son enfance. Celui où sa mère enseigna. Celui où il retrouve celle et celui qui lui furent si proches. Celui dont ils furent peut-être les otages. Dans les dimensions sociales, affectives, culturelles, charnelles, voire même amoureuses. Un beau roman de Jeanne. Empreint de cette humanité non affrétée qui caractérise Jeanne. " Un jour, il faut bien aller jusqu'où on perd pied. Pourquoi la guerre toujours la guerre. Ma vérité, elle a toujours été là, sur ma route, simple, brutale. Aveuglante. La vérité ne bouge pas, ne s'éloigne jamais. Non, elle ne bougeait pas, elle m'attendait. Et moi je marchais je marchais, les yeux fixés toujours au-delà d'elle, sur un horizon chimérique. Embrasé. Il me fallait la mort, c'est tout. Légitimée par la guerre. Parce que c'est comme ça : la mort, elle est " normale " pendant les guerres. "