Car ce qu'Annie transporte dans un sac en plastique n'est pas une vague croute. C'est un chef-d'œuvre mythique du XVIIIe siècle, une toile réalisée par le maître français Antoine Watteau ; un tableau intitulé
L'Improbabilité de l'amour, qui a connu les salons des plus grands de ce monde avant de disparaître mystérieusement au milieu du XXe siècle, pour réapparaître tout aussi inexplicablement dans cette boutique miteuse...
Interpellée par la beauté du tableau, Annie s'interroge : que tient-elle réellement entre ses mains ? Aidée de Jesse, un jeune guide passionné, et d'une spécialiste de Watteau, la modeste cuisinière au cœur tendre entreprend de découvrir la secrète et terrible histoire de cette toile. Et se retrouve catapultée dans les arcanes du monde de l'art...L'Improbabilité de l'amour m'a fait découvrir un monde incroyable dans lequel l'art n'a finalement plus grand chose à voir avec l'idée qu'on s'en fait. Hannah Rothschild dresse une galerie de portraits féroces et dénonce avec intelligence et lucidité un univers gangrené par le fric.
Oligarque russe, rappeur esthète, roi du pétrole, star du sport, marchand d'art sans scrupules, collectionneurs de tous bords, tous nourrissent le même fantasme : faire main-basse sur l'inestimable chef-d'œuvre.
Tous les coups sont permis ; tous les rêves sont possibles... Mais si
L'Improbabilité de l'amour a le pouvoir de changer la vie de celui qui la possède, elle peut également rendre fou celui qui la convoite.
L'Improbabilité de l'amour met en scène Annie, une trentenaire pas très bien dans sa peau, qui a beaucoup de mal à se remettre de la rupture avec son ex. Elle tente de l'oublier entre les bras d'hommes rencontrés lors de soirées entre célibataires. Annie est également paumée professionnellement puisqu'elle vivote de petits boulots, son rêve ultime étant de devenir chef. Ne parlons pas de sa mère qu'elle va chercher régulièrement au poste de police pour ivresse sur la voie publique. Bref, la vie d'Annie ne fait pas rêver.
Un jour, alors qu'elle cherche un cadeau d'anniversaire pour son nouveau jules, Annie tombe par hasard sur une petite toile crasseuse mais plutôt jolie. Annie l'achète sans se douter qu'il s'agit d'un Watteau égaré depuis la seconde mondiale. Annie l'entrepose négligemment chez elle mais sa mère, pas si folle que ça, décide de faire expertiser le tableau de maître. Au fil des rencontres et des découvertes, Annie va reprendre goût à la vie et comprendre que son tableau vaut plus que tout ce qu'elle n'a jamais possédé...
Le roman nous emporte au cœur du monde de l'art. Outre l'enquête d'Annie qui permettra de faire toute la lumière sur ce tableau, l'auteur nous entraîne dans un monde où l'argent est la plus grande des valeurs. Oubliez vous idées sur un monde de l'art où la beauté, l'amour des belles choses priment sur tout. Hannah Rothschild nous fait pénétrer dans un univers où les tableaux, les sculptures ont remplacé les fonds spéculatifs pour échapper au fisc. Elle peint avec férocité, ironie mais lucidité un monde où le fric dicte sa loi.
Les Winkleman, acheteurs d'œuvre d'art de père en fille, achèveront de vous convaincre. Avec l'auteur, nous pénétrons au cœur d'un monde cynique dans lequel il faut faire grimper les enchères toujours plus vite et plus haut, à n'importe quel prix. Peu importe l'œuvre, pourvu qu'elle soit chère. Telle pourrait être la devise des personnages du roman qui investiraient dans une crotte de chien si elle pouvait leur rapporter gros. Si le regard d'Hannah Rothschild se veut désabusé, il est est néanmoins réaliste. J'ai adoré pénétrer dans l'intimité de ce monde, voir l'envers du décor, loin des clichés qu'on peut en avoir.
L'histoire du tableau de Watteau m'a également passionnée. Dans certains chapitres, l'auteur a eu la bonne idée de le faire parler. Ainsi ce tableau (qui n'existe pas en réalité), raconte sa vie. Il narre le contexte dans lequel il a été créé, qui l'a acheté, possédé. Il raconte le secret des alcôves et des bureaux de Louis XIV à Hitler. L'auteur double en plus son intrigue par une enquête qui mènera le lecteur du côté des brigades nazies chargées de confisquer les biens des juifs pendant la seconde guerre mondiale.
Le seul bémol que j'apporterais au roman viendrait du personnage principal Annie que j'ai trouvé résolument trop molle, voire carrément nunuche. Elle hésite sans cesse et m'a parfois carrément déprimée. En outre, elle se targue de bien cuisiner mais ses plats " élaborés " à base de gratin dauphinois et d'asperges m'ont doucement fait rire...Ah, ses Anglais! La réputation de leur cuisine les précédera toujours (et Tac!)