Il faut dire que les chiffres sont criants : au cours de sa vie, un Français sur six écrirait un roman. De quoi s'assurer, en en faisant l'objet d'un récit, un public déjà conquis aux affres des apprentis-écrivains, pour les avoir éprouvés eux-mêmes!
Le synopsis
Au cœur de la campagne anglaise, plusieurs érudits excentriques tiennent la Bibliothèque des Refusés, établissement ayant pour vocation de recueillir tous les textes refusés par des éditeurs, et qui sombreraient autrement dans le plus sombre oubli.
Le roman raconte les tribulations quotidiennes dans cette institution à l'ambition altruiste et originale.
Mon avis
Au paradis des manuscrits refusés peut faire votre bonheur, pour peu que vous sachiez ce que vous venez y chercher.
C'est en effet un roman aux points forts tout à fait honnêtes :
- L'humour anglais y est prégnant : l'ironie et le style pince-sans-rire sont de mise, agrémentant le récit d'une légèreté qui constitue sans doute son intérêt principal ;
- Des personnages extravagants : là aussi, le style typiquement anglais fait loi, la description des tenues vestimentaires et des caractères nous aide à visualiser l'environnement et nous donne envie d'en savoir plus ;
- Les mésaventures se succèdent, si bien que l'on passe d'une péripétie à l'autre (toutes proportions gardées, n'oublions pas que nous parlons d'une troupe de vieillards quasiment cacochymes dans une bibliothèque), il y a matière à s'amuser et de rire des infortunes que rencontrent nos amis anglais ;
- Un sujet de fond sensible et traité avec sensibilité : il y a des passages intéressants sur la valeur de ces manuscrits refusés, par rapport à ceux qui ont été édités : sont-ils aussi précieux? Les protagonistes prennent très au sérieux la vocation de leur établissement, ce qui donne lieu à des débats parfois enflammés qui ne manquent pas de piment.
- Il n'y a pas d'intrigue "classique", avec un élément déclencheur, des rebondissements, un dénouement : le récit raconte le quotidien de la petite troupe en charge de la Bibliothèque, sans unité d'histoire. A la fin du roman, on a le sentiment d'avoir passé un agréable moment, mais pas forcément de pouvoir retirer quelque chose de tangible de la lecture ;
- En cela, le roman n'est pas particulièrement ambitieux ou audacieux : on ne va pas au-delà des mésaventures relatées, et c'est un peu dommage ;
- Pour finir, le concept est prétexte au lieu qui abrite les tribulations décrites, et donne lieu à quelques passages intéressants, mais n'a pas vocation a être véritablement exploré : nous avons avant tout affaire à un roman léger et divertissant.
Pour vous si...
- Vous avez envie de légèreté
- Vous êtes un adepte de l'humour british
Morceaux choisis
"Comme Wilby disait toujours, des comprimés d'ail, voilà ce qu'il vous faut. Même si elles ne lui servaient plus à grand-chose, à la fin. Vous ai-je raconté qu'il était en plein milieu de son dernier poème épique quand la Grande Faucheuse est arrivée? Ça devait s'intituler Requiem. Je n'ai jamais compris comment il avait pu deviner...
_C'est tout à fait bouleversant, madame Wilberforce. Je me demande comment vous pouvez en parler avec autant de sérénité..."
"Il commençait à se dire qu'au cœur de cette entreprise revenait une question obsédante, constamment ignorée : la littérature publiée avait-elle plus de valeur que la littérature impubliée?"
Note finale2/5(pas mal)