La douleur porte un costume de plumes de Max Porter

Par Krolfranca

Titre : La douleur porte un costume de plumes

Auteur : Max Porter

Traduit de l'anglais par Charles Recoursé

Publié au Seuil

Date de parution : janvier 2016

122 pages

Premier roman

Quatrième de couverture : Une mère meurt. Elle laisse derrière elle deux petits garçons et leur père terrassés par le chagrin. Un soir, on frappe à la porte de leur appartement londonien. Surgit alors un étrange personnage : un corbeau, doué non seulement de parole mais d'une verve enfiévrée, d'un aplomb surprenant et d'un sens de l'humour ravageur. Qu'il soit chimère ou bien réel, cet oiseau de malheur s'est donné une mission auprès des trois âmes en péril. [...]

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Pour commencer, j'ai envie de dire : chapeau le traducteur ! Quel véritable tour de force de traduire ce petit texte insolite et si poétique !

J'ai lu puis j'ai relu certains passages (parfois plus de deux fois).... Ce n'est pas un roman facile, il a tendance à nous résister un peu et j'ai aimé ça.

Malgré mes multiples lectures, je ne pense pas avoir tout compris, et j'ai davantage apprécié les voix du père et des garçons que celle du corbeau. Tout simplement, parce que je me suis sentie assez bête (si, si, je vous assure !) devant certaines paroles du corbeau, des textes totalement nouveaux, totalement poétiques, avec un petit côté hermétique.

Et puis je crois qu'il est difficile d'atteindre la profondeur du texte si on ne connaît pas l'œuvre de Ted Hugues, poète anglais qui a écrit Corbeau, vie et chants du corbeau, à la mort de sa femme. Ted, c'est l'obsession du père. Et les corbeaux ne font qu'un.

Alors, je suis restée en surface, j'ai nagé au milieu des pitreries du corbeau, des contes, et des réflexions toujours justes du père, sans couler, même si parfois j'ai bu la tasse, j'ai toujours réussi à me rattraper à un mot, une image, une beauté fulgurante.

Ce petit texte atypique vaut le détour, ne serait-ce que pour lire des passages tels que :

" Je me rappelle avoir craint que quelque chose, forcément, finisse mal, parce que nous étions trop heureux, elle et moi, les premiers temps, lorsque notre amour prenait la forme de nos vies comme la pâte à gâteau comble les coins du moule quand elle gonfle et cuit. "

ou :

" La maison devient une encyclopédie physique d'elle sans elle, ça n'en finit pas de me secouer et c'est la principale différence entre notre maison et celles où la maladie a fait son œuvre. Pendant leur dernier jour sur terre, les malades ne laissent pas des mots sur les bouteilles de vin rouge, disant " PAS TOUCHE AVEC TES SALES PATTES ". Elle ne passait pas son temps à mourir, et il n'y a pas de détritus de soins, elle passait simplement son temps à vivre, et ensuite elle est partie. "

ou encore :

" Tourner la page, le concept, c'est pour les idiots, toute personne sensée sait que la douleur est un projet à long terme. "

Un petit livre atypique à lire mais surtout à relire pour le savourer en silence ou pour le déclamer à voix haute.