171. — « Tu vois, finira bien par avouer Dieu un jour à qui le questionnera d’un peu près, je n’aurai été moi aussi qu’une illusion d’optique. Mais moi, je le savais dès le début. »
172. — L’art n’est jamais à sa place : toujours en deçà et au-delà de l’œuvre, il est moins un absolu qu’un dévolu qui se jette sur un individu. Pour en faire un sujet.
173. — Les femmes ne couchent presque jamais avec un corps, c’est ce qui leur donne de l’esprit ; les hommes couchent rarement avec un esprit, c’est ce qui les rend bêtes.
174. — Fumeur tumeur. Et moi aussi parfois. Et par toi.
175. — L’ignorance satisfaite est la forme contemporaine de l’arrogance. Elle est presque l’apanage du « monde ordinaire », ramassis de médiocres de toutes classes sociales, et de ceux qui le flattent et l’exploitent.
176. — L’homme contemporain a la vulgarité d’un besoin pressant et l’arrogance que donne le naturel sanctifié de sa satisfaction immédiate.
177. — L’horreur cathodique nommée télévision n’est plus qu’une machine à broyer l’art en pubs, en clips, en morceaux agités d’insignifiance, d’inconséquence et d’innocuité.
178. — Toujours très vite échauffée, la tête contemporaine bout à tout propos et hors de toute proportion : mens sauna in corpore salaud.
179. — Dans le monde de Big Brother où nous voilà décidément entrés, tout débat quelque peu social est automatiquement désamorcé par une représentation télévisuelle qui le « diffuse », au plein sens du terme, et en fait, pour la galerie, une simulation en studio. Ainsi privés de discussion et d’affrontement vrais, nos consensus ne sont plus que des connivences que leur implicite rend hasardeuses et volatiles.
180. — Une œuvre digne de ce nom est toujours un précipité d’évidences… rétrospectives.
Notice biographique
Écrivain, sémioticien et chercheur, Jean-Pierre Vidal est professeur émérite de l’Université du Québec à Chicoutimi où il a enseigné depuis sa fondation en 1969. Outre des centaines d’articles dans des revues universitairesquébécoises et françaises, il a publié deux livres sur Alain Robbe-Grillet, trois recueils de nouvelles (Histoires cruelles et lamentables – 1991, Petites morts et autres contrariétés – 2011, et Le chat qui avait mordu Sigmund Freud – 2013), un essai en 2004 : Le labyrinthe aboli – de quelques Minotaures contemporains ainsi qu’un recueil d’aphorismes,Apophtegmes et rancœurs, aux Éditions numériques du Chat qui louche en 2012. Jean-Pierre Vidal collabore à diverses revues culturelles et artistiques (Spirale, Tangence, XYZ, Esse, Etc, Ciel Variable, Zone occupée). En plus de cette Chronique d’humeur bimensuelle, il participe occasionnellement, sous le pseudonyme de Diogène l’ancien, au blogue de Mauvaise herbe. Depuis 2005, il est conseiller scientifique au Fonds de Recherche du Québec–Société et Culture (F.R.Q.S.C.).