Il y a celles qui veulent la bouche de Julia Roberts et celles qui réclament les fesses de Jennifer Lopez. Il y a celles qui préfèrent se refaire les seins pour mettre toutes les chances de leur côté, et celles qui aimeraient bien elles aussi s’autoriser à préférer ; mais dont le porte-monnaie, pas plus gonflé que leur poitrine, leur permet juste de feuilleter les pages des magazines féminins en enviant tous ces corps parfaits. La chirurgie esthétique ne m’a jamais fait du pied, comme ça fait longtemps que je désinvestis ce corps qui ne sait pas marcher droit et de toute façon ne va jamais nulle part.
Moi, je voulais juste avoir les yeux qui brillent, qu’ils aient toujours assez d’histoires à te raconter pour tu veuilles bien y plonger et oublier cinq minutes toutes ces bouches, toutes ces fesses, toutes ces poitrines de toutes ces vraies femmes qui ne titubent jamais, même du haut de leurs talons aiguilles. Moi, je voulais juste avoir les yeux qui brillent, qu’ils aient toujours assez de pays à te faire voir pour que tu ne te sentes jamais à l’étroit dans mes bras et que t’oublies cinq minutes ces envies de cavale qu’on porte tous en nous, comme des bras qui étreignent ne sont en fait rien d’autre qu’un étau qui se resserre ; comme des yeux, aussi brillants soient-ils, n’éclairent jamais dans la nuit. Les cinq minutes sont passées, la nuit est tombée, et je n’ai même pas une prothèse à laquelle me raccrocher depuis que mes yeux ne savent plus briller.
Moi, je voulais juste avoir les yeux qui brillent, mais dis-moi de quoi j’ai l’air maintenant que je n’ai plus aucune histoire à te raconter, aucun pays à te faire voir, et que ce ventre que j’ai oublié de nourrir te fait si peur chaque matin que tu préfères rejoindre toutes ces bouches, toutes ces fesses, toutes ces poitrines plus en vie que mon corps déserté.
Il y a celles qui veulent ressembler à Barbie et celles qui ne supportent plus d’avoir le nez de maman. Il y a celles qui préfèrent remplir leur solitude de botox et coller du plastique tout autour de leur désir ; et celles qui se moquent d’elles mais se charcutent quand même, peut-être un peu plus et c’est bigrement moins joli, à chaque fois que leur solitude et leur désir font trop de bruit.
Notice biographique
Myriam Ould-Hamouda (alias Maestitia) voit le jour à Belfort (Franche-Comté) en 1987. Elle travaille au sein d’une association pour personnes retraitées où elle anime, entre autres, des ateliers d’écriture. C’est en focalisant son énergie sur le théâtre et le dessin qu’elle a acquis et développé son sens du mouvement, teinté de sonorités, et sa douceur en bataille — autant de fils conducteurs vers sa passion primordiale : l’écriture. Elle écrit comme elle vit, et vit comme elle parle. Récemment, elle a créé un blogue Un peu d’on mais sans œufs, où elle dévoile sa vision du monde à travers ses mots – oscillant entre prose et poésie – et quelques croquis, au ton humoristique, dans lesquels elle met en scène des tranches de vie : http://blogmaestitia.xawaxx.org/