Interview Nicolas Bara pour « Le Concile des Arbres »

Par Un_amour_de_bd @un_mour_de_bd

Une petite interview (à bâtons rompus) avec Nicolas Bara, le jeune dessinateur du « Concile des arbres », ça vous tente ?


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Peux-tu te présenter rapidement ? Quel est ton parcours ?
N. B. Je suis de Lyon et je dessine depuis tout petit, avec une certaine passion pour la BD. J’ai suivi une formation à l’école Emile Cohl, spécialisée dans les métiers du dessin. En sortant de l’école, j’ai commencé par travailler dans le jeu vidéo, en faisant du character design et du décor, et également de l’illustration. Puis j’ai signé chez Dargaud (avec Pierre Boisserie) pour « Le Chant des Malpas ». J’ai ensuite bossé pendant plus de 4 ans dans une boite de e-learning où j’étais Lead Artist 2D pour la création de personnages et décors. Puis je me suis remis à mon compte en bossant à nouveau dans l’illustration et le jeu vidéo, principalement du character design pour des grosses boites de jeux vidéo Américaines. Et parallèlement je bossais (quand j’arrivais à trouver un peu de temps) sur « Le Concile des Arbres ».
Actuellement je suis toujours principalement dans le character design de jeu vidéo, mais j’ai aussi quelques autres projets en tête.

Quelles sont les références (films, cinéma, littérature) pour cet album ? On pense bien entendu à “Tim Burton”, mais aussi aux enquêtes anglaises, façon “Agatha Christies”…
N. B. Pour cet album, principalement « Sleepy Hollow » de Tim Burton effectivement, qui m’avait marqué à sa sortie par sa splendide ambiance, et je m’étais toujours dis qu’il faudrait que je fasse une BD dans cet esprit un jour.
Sinon, on peut retrouver une petite influence d’Indiana Jones « L’arche Perdue » vers la fin de l’album, film emblématique de mon enfance que j’ai dû voir 200 fois à l’époque

Un peu plus grand public que les films de Burton, néanmoins… A quel public est destiné l’album ?
N. B. C’est clairement une bande dessinée grand public, pour ado-adulte aimant l’aventure et les ambiances mystérieuses. Il peut être lu par le plus grand nombre.

Sur certaines scènes (rues ou intérieurs), les décors sont très fouillés. J’ai l’impression que tu y es particulièrement à l’aise.
N. B. J’ai toujours aimé les scènes avec pleins de détails dans les BD, pas forcément de partout, mais avoir certaines cases très détaillées m’éclate. Pouvoir balader son regard partout, chercher les petits détails.
Par exemple, sur la planche 21, dans le QG de Casimir et Artémis, je voulais qu’il y en ait de partout, qu’on sente qu’ils y passent du temps, qu’il y ait de la vie.
D’une manière générale, la BD est principalement une affaire de dessin pour ma part. Si une BD ne me plait pas graphiquement, je ne l’achèterai pas. Je veux en avoir pour mon argent. Si je veux seulement lire une histoire, j’achète un livre classique. La richesse et la qualité du dessin sont mes critères principaux ! Mais cela est sans doute dû à mon métier et à ma passion pour le dessin et la mise en scène ^^

Comment as-tu traduit (graphiquement) le coté “sombre” et inquiétant ?
N. B. Je pense que cela vient des cadrages et de la couleur. J’essaye au maximum, quand le propos me le permet, de trouver des cadrages peu conventionnels et qui renforcent le message que l’on veut faire passer. C’est une des phases dans la bd que je préfère; la mise en scène, la recherche de cadrage…

Casimir et Artémis forment un beau duo antinomique. C’est une des particularités et des plaisirs de l’album ?
Oui, ça a été très agréable de bosser avec eux ! Je me suis beaucoup attaché à ces personnages. Il y aurait encore beaucoup à apprendre et à approfondir sur eux.

Coté graphisme, ton trait est souple, très franco-belge. As-tu des dessinateurs en référence ?
N. B. Je n’ai plus vraiment de dessinateur de référence en BD, mais j’étais fan absolu de Loisel étant ado, et ça a sans doute laissé quelques traces dans mon dessin.
Sinon, j’aime beaucoup Nicolas de Crécy, il a beaucoup influencé mon style à une époque, même si on ne le retrouve pas directement dans mes dessins.

Tu as réalisé une mise en couleur traditionnelle. Pour garder le contrôle ?
N. B. C’était quelque chose que je voulais absolument faire pour cet album !
Pour garder le contrôle effectivement et créer l’ambiance que j’imaginais. Lorsque la couleur est faite par quelqu’un d’autre, ce n’est jamais totalement comme on se l’imaginait. Pour « Le chant des Malpas » je n’avais pas fait la couleur, le résultat était plutôt pas mal, mais ce n’était pas exactement comme ça que je voyais les choses. Il y a toujours une petite frustration.

Pour le Concile je voulais pouvoir maitriser cette partie. Et c’était aussi un challenge personnel, réussir à faire 62 pages à l’aquarelle !
Le choix de l’aquarelle parce que c’est le rendu que je préfère en BD (je n’aime pas trop les couleurs à l’ordi), et c’est une technique qui me plait ! C’est assez délicat, on n’a pas vraiment le droit à l’erreur et il y a surtout une longue réflexion sur chaque page avant de commencer, il faut savoir exactement où on va. Il faut s’imaginer la scène dans sa tête, l’ambiance que l’on veut, où sera placée la source lumineuse etc…
Et après on se jette à l’eau !
Il faut réussir à garder confiance pendant la réalisation de la planche, car au début (pour ma part) ça ne ressemble pas à grand-chose, et ça prend réellement forme quand on commence à poser les ombres et les ombres portées.
Bref, c’est assez périlleux et c’est vraiment sur les deux dernières heures que la planche prend enfin vie, mais c’est très excitant !
En fait, j’aime les challenges globalement ☺

Seul regret, pour ma part, l’humour est (presque) absent de l’album…
N. B. Ha bon ? Personnellement je ne trouve pas, je trouve même qu’il y en a beaucoup !
Si j’avais fait cette histoire seul, l’humour aurait sans doute été quasiment absent et l’histoire beaucoup plus sombre.

Est-ce un one-shot ou le premier tome d’une série ? (personnellement, j’aimerais beaucoup retrouver Casimir et Artémis dans de nouvelles aventures).
N. B. Le Concile des Arbres a été conçu comme un One-Shot, mais avec l’optique de pouvoir en faire une série où l’on retrouve Casimir et Artémis sur de nouvelles enquêtes, une série de one-shot en quelque sorte. L’univers est assez riche et permet de développer pas mal d’histoires, les personnages ont des zones d’ombres qui pourraient être éclairées au fil des albums et l’ambiance me convient parfaitement. Mais malheureusement l’album est paru dans la collection « Long Courrier » qui privilégie les one-shot, il n’y aura donc certainement pas de suite… A moins peut être d’un certain succès…
Pour le moment je commence à réfléchir à d’autres choses, soit en collaboration avec un scénariste, soit totalement seul au dessin, à la couleur et au scénario.
Bref, rien n’est fait pour l’instant, je suis en phase de réflexion, affaire à suivre…