La Guerre d’Algérie – Patrice Gélinet

Couverture La Guerre d'Algérie

Résumé :

« La nuit du 31 octobre au 1er novembre 1954 marque la naissance du Front de libération nationale et le début de la guerre d’Algérie. Une guerre qui durera huit ans, des attentas terroristes presque quotidiens, l’envoi en Algérie de plus d’un million de soldats du contingent, la chute de la IVe République, l’emploi de la torture, une tentative de putsch militaire, l’exode en 1962 de plus de huit cent mille pieds-noirs, le massacre des harkis et l’indépendance d’une colonie sur laquelle le drapeau français flottait depuis cent trente-deux ans. Comment en rendre compte ? A la fin des années 1980, Patrice Gélinet a donné la parole à quarante témoins, les principaux acteurs de la guerre d’Algérie, de part et d’autre de la Méditerranée : militaires français, combattants du FLN, activistes de l’OAS, pieds noirs, journalistes et hommes politiques… Aujourd’hui, plus d’un demi-siècle après la conclusion des accords d’Evian qui scellent l’indépendance de l’Algérie, ces témoignages permettent de saisir la passion qui animait les principaux protagonistes et aussi de tenter, le recul aidant, d’aborder une histoire douloureuse avec la sérénité nécessaire. »

Mon avis :

Je tiens tout d’abord à remercier Babelio et les éditions Acropole pour l’envoi de ce livre!

Cette année nous célébrons les 100 ans de la bataille de Verdun. C’est une bataille dont tout le monde a entendu parler que ce soit en primaire, au collège ou au lycée. On l’étudie pour ne pas oublier l’horreur des tranchées et le sacrifice de nos ancêtres. Mais qu’en est-il de la guerre d’Algérie ? Personnellement, je me souviens avoir passé trente petites minutes dessus en classe de première. C’est tout. Je ne sais quasiment rien sur ce conflit et pourtant, l’un de mes grand-père a été envoyé en Algérie et y a combattu. C’est pourquoi lors de la masse critique organisée par Babelio j’ai choisi ce livre, pour en apprendre un peu plus sur cette page très sombre de notre Histoire qui est souvent passé sous silence par nos professeurs…

Afficher l'image d'origine

Loin d’être un simple livre explicatif de la guerre d’Algérie, ce livre est en fait un recueil de témoignages et de déclarations officielles. En 1987, le journaliste Patrice Gélinet décide de consacrer dix émissions radiophoniques à la guerre d’Algérie et interroge donc de multiples témoins directs : des généraux français, des combattants Algériens, des pieds-noirs… En 2016, il décide de rassembler ses témoignages dans un livre et des les mêler à des discours officiels notamment du général De Gaulle ou à des extraits de reportages diffusés à la radio française en plein milieu du conflit. En remettant tous ces éléments dans l’ordre, l’auteur nous offre un aperçu de la guerre d’Algérie du point de vue de ceux qui se sont battus, qui ont du prendre des décisions plus difficiles les unes que les autres, qui ont tué des innocents pour une cause qu’ils pensaient juste. En fait, l’auteur se met en retrait. Ses écrits sont très courts et ne servent qu’à faire la jonction entre deux témoignages ou à nous expliquer quelques petits détails (notamment tous les acronymes tels que FLN, ALN, OAS). L’essentiel de ce livre est donc constitué de témoignages souvent émouvant, parfois choquant ou agaçant. Il est donc assez difficile de faire une chronique sur ce livre car je ne peux pas dire Untel ment, Untel exagère… Ces hommes et femmes nous racontent leur expérience de ce conflit meurtrier afin que nous, les jeunes générations, n’oublions jamais ce qui s’est passé là-bas.

Les guerres, c’est comme ça, ça rend aveugle. La passion qui habite les gens leur fait commettre toutes sortes de choses qui seraient inconcevables en temps de paix.

Je dois avouer que l’auteur a été très habile dans sa façon de compiler les différents témoignages. En effet, lorsqu’on lit les déclarations d’un ex-membre du FLN (Front de libération nationale), on lit ensuite celles d’un général ou d’un pied-noir en faveur d’une Algérie française. Tous les points de vue sont donc représentés, à proportion égale. Quoiqu’il arrive, le lecteur n’est nullement influencé : chacun est libre de se forger sa propre opinion.
J’ai aussi apprécié le fait que les personnes interrogées soient d’un milieu différent. Patrice Gélinet n’aurait pu interroger que des « soldats » français et algériens puisque, après tout, ce sont eux qui faisaient la guerre. Mais non. Il a aussi laisser la parole a des pieds-noirs, à un évêque, à un curé… Grâce à ces témoignages-là, on a aussi le point de vue des civils et c’est particulièrement touchant.

Patis

Ce livre présente plusieurs particularités. Tout d’abord, on retrouve fréquemment des flashcodes qui, grâce à notre téléphone, nous permettent d’accéder aux extraits radiophoniques des déclarations que nous sommes en train de lire. Je ne me suis pas servi de tous les flashcodes. J’avoue que, admirant ce très grand homme (au sens propre comme figuré), j’ai surtout écouté les discours du général de Gaulle. Ce principe est un atout pour ce livre car il permet de nous plonger directement à l’époque où ces déclarations ont été faites. En un clic, on se retrouve au coeur de cette époque troublée et cela donne une dimension très réelle au livre.

De Gaulle était un homme d’une telle stature qu’on ne pouvait pas « s’amuser » avec lui. Ou bien on le renversait, ou bien on le brisait, mais en aucun cas on ne pouvait s’amuser à vouloir le chatouiller, l’égratigner, car nous savions bien que le personnage avait une telle dimension historique que c’est lui qui nous briserait, qui nous écraserait.

Autre particularité, l’auteur a réuni à la fin de ce livre les biographies de toutes les personnes que nous avons rencontré au cours de notre lecture. C’est particulièrement utile car, j’avoue, on se perd un petit peu entre les différents généraux français, les combattants Algériens, les pro-Algérie française, les pro-Algérie indépendante… On retrouve aussi bien la biographie de Marie Elbe, une pied-noir, que celle de Jacques Massu, qui fut préfet d’Alger, ou encore celle de Yacef Saadi, figure emblématique du FLN.
Enfin, après les biographies, on retrouve une chronologie complète et détaillée du déroulement de la guerre d’Algérie. Elle est intéressante, bien écrite et surtout très instructive. J’ai d’ailleurs appris tout un tas de chose lors de ma lecture, et rien que pour ça, ce livre mérite une très bonne note.

Je crois que le but de la guerre, c’est de s’arrêter un jour, non ?

Si je devais cependant ajouté une petite note négative, je dirais que parfois deux témoignages successifs ne traitent pas d’un même sujet. Sans introduction préalable, on se retrouve un peu perdu et on se demande pourquoi il parle de ceci alors que juste avant, on parlait d’autre chose. Mais bon, je chipote peut-être un peu, ça n’arrive pas très souvent au cours du livre.

Ce qui était intolérable à cette époque, c’était cette espèce de monstrueuse hypocrisie des pouvoirs publics. C’était Guy Mollet disant « les cas [de torture] se comptent sur les doigts de la main » alors qu’il y en avait des milliers.

En bref, je remercie vraiment Babelio et les éditions Acropole de m’avoir permis de découvrir ce livre et de m’avoir aidé à en apprendre beaucoup plus sur un conflit dont on ne parle pas assez. Nous y avons été tour à tour bourreau puis victime, nous y avons laissé de nombreux soldats et civils mais nous avons aussi pris de nombreuses vies. Personne ne voulait de cette guerre et pourtant elle a eu lieu. En lisant, on perçoit dans les déclarations des témoins des sentiments aussi variés que contradictoires : la haine, la peur, la culpabilité, l’acceptation, le soulagement… Je pense que ce livre est adapté à une première lecture sur la guerre d’Algérie puisqu’il est loin d’être ennuyeux, l’auteur ne nous assomme pas avec des dates ou des faits historiques, il nous fait réellement vivre le conflit.

(Mettre un GIF où le général de Gaulle apparaît
en compagnie du Président Kennedy est, vous vous
en doutez, totalement indépendant de ma volonté.
En réalité il existe très peu de GIF du général!)

Note : 17/20
Afficher l'image d'origine

Le cas de conscience, c’est une affaire intime. Vous savez très bien quand une bombe explose ; puis on vous montre dans le journal un gosse de cinq ou six ans qui a une jambe coupée. Vous ne pouvez pas rester insensible, mais vous fermez les yeux, vous vous dites que c’est la guerre.