Epilogue

Par Carolynepotter1

EPILOGUE

Frédéric SOULIER

Martial Chaînard, 84 ans, coule des jours paisibles et qui se ressemblent tous dans un EHPAD - acronyme moderne et politiquement correct désignant un mouroir. Mais lorsque le destin lui joue un dernier tour de cochon et l'oblige à sortir du rôle de spectateur dans lequel il s'est toujours complu, le vieillard terne et effacé décide d'offrir à son insipide biographie le plus brillant des épilogues.


Extrait :
Sentant qu'on l'observait, Martial releva la tête de son bol. Une goutte de café perlait à la pointe de son nez. Sur le palier se tenait Georgette Archambaud, sa voisine de chambre. Elle flottait dans son tablier à fleurs et plissait sa vilaine trogne de mégère constipée, soutenue en station debout par le déambulateur dont elle ne se séparait jamais, comme une extension insécable de son corps – un modèle pliable ultra-léger équipé d'un panier dans lequel elle fourrait tout un bric-à-brac. Si Isaac Newton avait eu les nichons de cette vieille-là face à lui comme Martial les avait en ce moment même, il en aurait conçu sa théorie de la gravitation universelle plus vite qu'en observant les pommes tomber!

**************************

Frédéric Soulier, je m'y étais essayée l'année dernière avec Le trou de ver dans la maison du crack, une nouvelle qui m'avait laissé une très bonne impression. Du coup, comme je n'ai peur de rien, je me suis lancée dans un roman du sieur. Il en a commis quelques uns apparemment (dont encore un il n'y a pas si longtemps que cela, sorti début mars), mais c'est celui-ci, Epilogue, qui m'a attiré l'oeil... par le limite mauvais goût de sa couverture! Un dentier dans un verre d'eau, non mais c'est d'un chic! LOL. Et ma foi, tant mieux, parce que sans ce détail, eh bien je pense que jamais je n'aurai choisi d'acheter ce titre-là, le pitch ne m'emballant pas plus que cela : un petit vieux qui s'emmerde dans sa maison de retraite, mouais, bof, j'ai lu le vieux qui ne voulait pas fêter son anniversaire, j'avais déjà donné dans le retraité quoi.

Je me suis donc mise à lire Epilogue. Et je me suis demandée où je partais comme cela. C'était d'un plat. Il ne se passait rien, si ce n'est le triste quotidien d'une maison de retraite mal tenue. En temps normal, un truc aussi plat, j'arrête, je laisse tomber, je passe à un autre e-book et basta. Mais là, c'était Frédéric Soulier. Je me suis méfiée. Tout ce calme, ça ne pouvait pas durer éternellement. J'attendais le deuxième effet kiss-cool.

Donc j'ai lu.

Et j'ai lu.

Et j'ai lu.

Au bout de quelques pages, j'étais déjà tombée deux fois sur le mot "cacochyme". Mot que je croyais être seule en France à utiliser (la tête de mon mec la première fois où il m'a entendue le dire, impayable!). Puis est venu "alacrité"... Et tout un tas d'autres mots oubliés... Là je me suis dit que le mec, soit il avait un dictionnaire des synonymes bien balèze, soit il avait du vocabulaire. Qu'importe, quel que soit le cas, j'étais conquise. Parce que ces mots oubliés, ils étaient bien placés, à aucun moment ça ne faisait ampoulé, c'était très fluide, pas d'impression d'un auteur qui se regarde écrire. Donc, eh bien : j'ai lu, j'ai lu, j'ai lu (c'est agaçant ces répétitions hein)

Et arrivée à quelque chose comme 40% de lecture -ce qui est énorme sur un bouquin- pinaise, ça y était, il y avait de l'action. Le train-train pépère de notre paisible Martial, notre retraité de 84 ans, héros de cette histoire, le train-train pépère de Martial donc, se prenait une sacrée claque. Et notre paisible Martial, après cette "claque", il nous a fait un virage à 180°. A partir de là, Frédéric Soulier, il a tourné la poignée des gaz, lâché l'embrayage, et il m'a emmené avec lui carrément tambour battant. Moi qui attendais mon deuxième effet kiss-cool, je n'ai pas été déçue.

Je ne vous raconte rien de l'histoire. Rien de ce qui se passe dans la première partie "plan-plan", et rien de ce qui se passe dans la deuxième partie qui décoiffe. Parce que finalement, selon mon ressenti, ce n'est pas l'histoire qui compte dans Epilogue. C'est l'atmosphère. Alors bien évidemment, si, l'histoire compte hein, sinon pourquoi se coltiner l'équivalent de 250 pages, pourtant je trouve que  vous faire un résumé ça n'est pas une bonne idée. Soulier, c'est un genre de coach. Mine de rien, avec son bla-bla de la première partie, il vous met en condition pour aller plus loin, l'échauffement, et de ma part, vous donner des bribes de ce qui se passe, de ce qui se dit, hum, ben non : pas bonne idée!