Le problème à N corps de Catherine Quilliet aux éditions Paul & Mike
" Il relut, interloqué, les phrases qu'il avait commencé à parcourir distraitement, et dont il réalisait soudain qu'elles ne réveillaient aucun écho en lui. Son écriture n'avait pas vraiment changé, pas de doute, c'était bienlui qui avait écrit ces lignes. Mais quand ? Et la fille, c'était qui ?.
Les réponses lui reviendraient forcément quand il lirait la suite.
Mais plus il avançait dans sa lecture et moins le récit s'ajustait à ses souvenirs de jeunesse. Chaque anecdote l'éloignait davantage de lui-même. Il n'avait aucun visage à mettre sur les obsessions déroulées page après page. "
Petit à petit ce pan de son passé oublié va obnubiler Vincent, il va s'insinuer dans lesmoindres recoins de sa vie. Il faut qu'il sache, qu'il retrouve cette Marianne, qu'il découvre pourquoi, comment il a pu oublier cette histoire. Cette quête va perturber son travail et surtout sa vie de couple, il va peu à peu délaisser Claire.
Il va faire appel à un écrivain qui, dans une interview, révélait que quand il terminait un livre il ne se souvenait plus de tout de ce qu'il avait écrit. Il va partir à la recherche de cette Marianne pour l'interroger. Il va faire appel à des logiciels de reconnaissance lexicales pour comparer ce pan de son journal avec le reste de ses écrits dont il se souvient. Ce qu'il va découvrir, je ne vous en parlerai pas, il vous faudra lire le livre pour le savoir.
Ce roman est un véritable thriller. Un thriller sans meurtre, sans assassin, sans policier. Un roman dans lequel le héros va se mettre à enquêter sur son passé, d'ailleurs son nom n'est pas innocent : Vincent Estière (est hier) . Une enquête pleine de rebondissements et de surprises. C'est un roman dont le centre est la trahison dans la relation amoureuse, le mensonge qui fausse la donne.
Je vous invite à découvrir ce véritable thriller mené de main de maître par Catherine Quilliet. Un roman dont la construction et le style vous prennent dès la première ligne, vous happent et ne vous lâchent plus.
" -Votre journal, Vincent. Le vôtre, pas le fascicule supplémentaire. Vous le relisez à quelle fréquence, à peu près ?
-C'est difficile de parler de fréquence. Je ne le relis pour ainsi dire jamais" Vincent hésita. " Enfin quand je dis jamais ..."
Son vis-à-vis s'enfonça davantage dans son moelleux fauteuil de cuir brun, croisa les jambes, attendit. Vincent mordilla l'une de ses phalanges, puis se fit violence pour parler.
"En fait, ça m'est arrivé une fois, il y a assez longtemps. Pendant ma thèse. Au début, il me semble. C'était... comment dire... surprenant. Presque désagréable. J'ai reconnu les événements, tout au moins les plus marquants, mais quasiment rien des détails. Comme s'il ne s'agissait pas de moi, mais du roman de la vie d'un autre que j'aurais fréquenté autrefois. Quelqu'un qui avait finalement très peu de points communs avec moi, mon moi de maintenant. C'est déstabilisant de de pas se retrouver là où on croyait s'être laissé. Ça m'a suffisamment déplu pour que je n'aie pas envie de recommencer l'expérience. Il est plus confortable d'entretenir l'illusion qu'on est soi de toute éternité, et que ce qu'on vit à un instant donné restera ancré dans notre mémoire jusqu'à la fin ... "