Avant de partir pour Epinal, j'avais lu beaucoup et écrit peu. Il va maintenant falloir terminer les lectures entamées, en attaquer d'autres, car juin sera encore chargé, et écouler les billets en retard. Direction la Grande-Bretagne, pour y découvrir le premier tome d'une trilogie fleuve de fantasy épique, "Blood Song", dont chaque tome frôle les 700 pages, et signée par Anthony Ryan, romancier écossais installé à Londres. "La voix du sang", premier volet, publié chez Bragelonne, comme les deux tomes suivants, nous propose un roman d'apprentissage puissant et inquiétant, mais qui augure d'une suite qu'on imagine particulièrement mouvementée. Avec, en son coeur, une bande de gamins destinés à devenir les fers de lance d'un ordre religieux, et un jeune héros redoutable et redouté, mais en proie au doute et à de profonds questionnements existentiels... Classique, mais efficace.
Vaelin al Sorna est le fils d'un des grands noms du Royaume, le Seigneur de Guerre, un des proches conseillers du Roi et l'un de ses plus grands guerriers. Issu d'une famille noble et puissante, le jeune garçon devrait grandir sans se soucier de l'avenir, assuré de reprendre, dans quelques années le flambeau paternel. Mais, son destin sera tout autre.
Il n'a qu'une dizaine d'années quand son père le conduit jusqu'à l'entrée d'un lieu assez austère, abritant la loge d'un des ordres au service de la Foi, le Sixième Ordre, celui qui, justement, forme les religieux dont la principale activité concerne la chose militaire. Et le Seigneur de Guerre abandonne là son rejeton, sans un adieu, sans se retourner.
Sans même expliquer les raisons de cette décision qui fend le coeur de Vaelin, qui perd là bien des illusions, en réalisant que la personne à qui il faisait le plus confiance l'a trahi, délaissé. Mais, pas le temps pour les états d'âme, car Vaelin va devoir rapidement se lancer dans le difficile apprentissage des aspirants du Sixième Ordre.
Sous la férule d'Arlyn, Aspect de ce fameux Sixième Ordre, et de Sollis, le plus sévère des instructeurs de la Loge, Vaelin va endurer bien des épreuves et des entraînements afin de devenir un véritable guerrier au service de la Foi, peut-être plus encore que du Royaume, même si les intérêts des deux entités semblent converger.
Et, si tout cela semble terrifiant pour un si jeune enfant, peut-être même assez inhumain, c'est le point de départ d'une incroyable aventure qui sera marquée par une forte amitié avec certains de ses camarades, eux aussi envoyés là par leurs familles : Nortah, Barkus, Caenis, Dentos, Jennis... Tous venus de régions différentes, issus de milieux différents, tous dotés de qualités différentes...
Mais tous, désormais, doivent oublier qui ils étaient avant d'entrer dans le Sixième Ordre. Ils n'ont plus de famille, plus de père, ils n'appartiennent plus qu'à l'Ordre qui les façonne, à la dure, opérant une sorte de sélection naturelle dont seuls sortiront les plus forts... Ce premier tome, c'est d'abord le récit de cet apprentissage sans répit, qui va tanner le cuir de ces gamins encore bien tendres.
On découvre, pardonnez-moi pour la trivialité de la description, qu'il y a une sorte de tronc commun à cette formation, avant que chacun ne travaille d'arrache-pied le domaine où il est le meilleur. Pour Vaelin, incontestablement, c'est l'épée qui est son arme, et ce sont bientôt de féroces combattants qui prennent forme, comme des papillons sortant de leurs cocons.
Je n'entre pas dans les détails des épreuves traversées par nos jeunes héros en devenir, vous les découvrirez par vous-mêmes, mais, croyez-moi, c'est coton. Nombreux sont ceux qui n'en sortent pas vivants, car c'est bien l'enjeu de certains de ces tests grandeur nature auxquels sont soumis les apprentis soldats.
Une tâche rendue encore un peu plus difficile pour Vaelin, qui comprend rapidement qu'il a droit à un traitement de faveur : manifestement, on en veut à sa vie, et ce n'était pas prévu au programme... De plus, il développe certaines aptitudes qui le troublent et qu'il peine à la fois à comprendre et à maîtriser. Un peu comme si, par moments, une voix s'emparait de lui et le guidait...
Qui est vraiment Vaelin ? Si j'avais des certitudes à son sujet, je ne les partagerais évidemment pas ici, mais je dois dire qu'il reste encore énormément à apprendre à son sujet. Dans ce premier tome, on le voit grandir, entrer, alors qu'il est encore bien jeune, dans une vie d'adulte qui sera celle d'un chef de guerre. Il a été formé pour cela, mais, plus encore, ils semble né pour cela.
Si l'on s'en tient à l'aspect purement roman d'apprentissage, on ne rend pas justice à "la Voix du sang", qui s'avère plus complexe que cela. D'abord, parce que, bien vite, à cela, s'ajoute une quête initiatique, qui va occuper une bonne partie de la deuxième moitié du roman, lorsque Vaelin n'est plus un élève mais bien un officier supérieur, recevant des ordres et les appliquant.
Cette épreuve du feu, si je puis dire, va en effet s'accompagner d'une réflexion personnelle quant à la finalité de ces actes. Vaelin est une machine à tuer, c'est certain, mais l'apprentissage de la Loge du Sixième Ordre n'a pas tué en lui toute humanité, ni tout libre arbitre, bien au contraire. Pris entre les ambitions d'un monarque rêvant de porter ses valeurs au-delà des frontières et un ordre religieux cachant bien des secrets, Vaelin doute...
Il ne doute pas de lui, car il connaît ses forces, mais bien de ceux pour qui il agit. Vaelin est intègre et les ordres qu'il reçoit font grincer son sens moral. Jusqu'à l'usure, jusqu'à se sentir désabusé, éreinté de n'être que l'instrument d'un dessein qui le dépasse mais qu'il devine injuste. Illégitime. Je ne révèle rien, rassurez-vous, en disant tout cela : on le constate très tôt dans le roman.
En effet, Anthony Ryan a choisi une narration particulière, jouant sur les flash-backs et d'autres ficelles, assez classiques mais qui fonctionnent bien : le récit que j'ai évoqué jusque-là est le coeur du roman, évidemment, mais il est encadré par autre chose. On comprend, au fil des pages, qu'on lit le récit de Vaelin, ses souvenirs livrés sans fard, sans rien cacher.
Mais, dans le même temps, on sait que le vaillant guerrier, dans une situation délicate qu'il reste à préciser, se livre à un interlocuteur, en lui révélant une vérité partielle, voire carrément arrangée à sa sauce. Ce dialogue, qui ouvre le livre lors du prologue et que l'on retrouve ensuite à intervalles réguliers, nous donne une image assez paradoxale de Vaelin.
On l'y devine ennemi n°1 du peuple auquel appartient son interlocuteur. Un monstre qui inspire frayeur et dégoût. La simple liste de ses surnoms, dont le plus fameux, le Tueur d'Espoir, fait frémir et l'on imagine que les récits de ses abominables hauts faits doivent alimenter les veillées et faire frissonner des plus petits aux plus grands.
Mais, celui que l'on nous décrit comme un croquemitaine n'apparaît pas au lecteur sous ce jour-là. Au contraire, comme je l'ai dit plus haut, c'est un homme blasé, démotivé, sans illusion qui se dresse devant nous. Oh, le combattant, s'il le faut, est encore capable de bien des exploits, armes à la main, mais à quoi bon, désormais ? Les idéaux inculqués au fil des ans lui paraissent factices, indéfendables.
Vaelin tient sur ses épaules ce premier tome, et sans doute, par la suite, toute la trilogie. Il a tout du héros épique, sans peur, sans reproche, invincible et aussi craint par les uns qu'admiré par les autres. Et pourtant, il se démarque de cela. Personnage arthurien dans le sens où il semble élu (mais par qui et dans quel but ?), il prend sur la fin les accents d'un Lawrence d'Arabie, en suivant le respect que lui inspire ses ennemis désignés.
Lors des récentes Imaginales, Anthony Ryan a participé à une table ronde autour de la question de l'Empire, qu'on défend ou qu'on combat. Vaelin, d'une certaine façon, et sans empiéter sur la suite du cycle, qui m'intrigue énormément, se trouve des deux côtés de la barrière : au service de l'empire, officiellement, il s'avère surtout dévoué au culte de la Foi, avant de se détacher de ces deux influences. Jusqu'à se retourner contre elles ?
Héros superbe et valeureux, capable de remporter à lui seul de grandes victoires, mais plus sûrement encore, de mener une armée sûre de sa force à son but, Vaelin se mue peu à peu en héros tragique, dont le destin est entre les mains de puissances supérieures, dont certaines sont encore floues. Risque-t-il de basculer dans une dimension qui lui vaudra l'étiquette de traître ? C'est bien possible...
"La Voix du Sang" débute comme un roman de fantasy picaresque, mais peu à peu, l'insouciance de l'enfance s'efface pour laisser place à des tensions bien plus dramatiques. L'amitié entre les jeunes hommes composant le groupe dont fait partie Vaelin, les premiers émois amoureux, aussi, la fidélité et la loyauté sont les moteurs de ce premier tome.
Mais, dans le même temps, les mensonges, les manigances, de lourds secrets dont on ne fait encore que deviner l'ampleur et les implications, apparaissent et font planer une menace croissante. Vaelin est un guerrier sans égal, sans doute, mais sa jeunesse, vécue à l'écart du monde, en a fait un naïf, en tout cas, quelqu'un d'inexpérimenté en matière de relations humaines.
Vaelin sert des idéaux, autour de lui, d'autres servent des projets, des ambitions, sont à la recherche de pouvoirs dont l'idée n'effleure même pas le jeune homme. Parmi eux, un personnage qui va certainement prendre de l'ampleur dans les deux prochains tomes : la princesse Lyrna. J'ai gardé son cas pour la fin, car je dois avouer que je suis assez perplexe à son sujet...
De la même génération que Vaelin, on la découvre pourtant bien plus rouée que lui, élevée aux intrigues de cour et l'ambition chevillée au corps. Mais, faut-il se méfier d'elle ou, au contraire, s'appuyer sur elle pour essayer d'y voir plus clair dans les jeux d'influence en action dans le royaume ? Je suis bien incapable de le dire pour le moment.
Vous l'aurez compris, au-delà de sa dimension éducative et de son côté épique qui monte en puissance au fil des chapitres, ce premier tome pose aussi bien des questions. Le lecteur se retrouve dans l'expectative, comme Vaelin, mais, celui-ci prend tout le monde à contre-pied. Vous vous attendez à un énorme cliffhanger, un rebondissement de dernière minute qui vous scotchera et vous poussera à attaquer illico la suite ?
D'une certaine façon, c'est le cas, mais difficile de faire plus inattendu que cette fin de premier tome. Vaelin est imprévisible, mais pas seulement sur le champ de bataille. C'est aussi un garçon qu'on sent prématurément épuisé, en particulier sur le plan mental. Et son état d'esprit, alors qu'on a encore deux tomes à découvrir, est déroutant.
Ce sera d'ailleurs la première des curiosités du tome 2 : la situation exacte de Vaelin et comment elle va évoluer. Qu'il le veuille ou non, entre ceux qu'il sert, ou est censé servir, ceux pour qui il aimerait prendre fait et cause et cette voix, il aura bien du mal à reprendre les rênes de son destin en main. Et n'en est sans doute qu'au début de ses aventures...
Vaelin al Sorna est le fils d'un des grands noms du Royaume, le Seigneur de Guerre, un des proches conseillers du Roi et l'un de ses plus grands guerriers. Issu d'une famille noble et puissante, le jeune garçon devrait grandir sans se soucier de l'avenir, assuré de reprendre, dans quelques années le flambeau paternel. Mais, son destin sera tout autre.
Il n'a qu'une dizaine d'années quand son père le conduit jusqu'à l'entrée d'un lieu assez austère, abritant la loge d'un des ordres au service de la Foi, le Sixième Ordre, celui qui, justement, forme les religieux dont la principale activité concerne la chose militaire. Et le Seigneur de Guerre abandonne là son rejeton, sans un adieu, sans se retourner.
Sans même expliquer les raisons de cette décision qui fend le coeur de Vaelin, qui perd là bien des illusions, en réalisant que la personne à qui il faisait le plus confiance l'a trahi, délaissé. Mais, pas le temps pour les états d'âme, car Vaelin va devoir rapidement se lancer dans le difficile apprentissage des aspirants du Sixième Ordre.
Sous la férule d'Arlyn, Aspect de ce fameux Sixième Ordre, et de Sollis, le plus sévère des instructeurs de la Loge, Vaelin va endurer bien des épreuves et des entraînements afin de devenir un véritable guerrier au service de la Foi, peut-être plus encore que du Royaume, même si les intérêts des deux entités semblent converger.
Et, si tout cela semble terrifiant pour un si jeune enfant, peut-être même assez inhumain, c'est le point de départ d'une incroyable aventure qui sera marquée par une forte amitié avec certains de ses camarades, eux aussi envoyés là par leurs familles : Nortah, Barkus, Caenis, Dentos, Jennis... Tous venus de régions différentes, issus de milieux différents, tous dotés de qualités différentes...
Mais tous, désormais, doivent oublier qui ils étaient avant d'entrer dans le Sixième Ordre. Ils n'ont plus de famille, plus de père, ils n'appartiennent plus qu'à l'Ordre qui les façonne, à la dure, opérant une sorte de sélection naturelle dont seuls sortiront les plus forts... Ce premier tome, c'est d'abord le récit de cet apprentissage sans répit, qui va tanner le cuir de ces gamins encore bien tendres.
On découvre, pardonnez-moi pour la trivialité de la description, qu'il y a une sorte de tronc commun à cette formation, avant que chacun ne travaille d'arrache-pied le domaine où il est le meilleur. Pour Vaelin, incontestablement, c'est l'épée qui est son arme, et ce sont bientôt de féroces combattants qui prennent forme, comme des papillons sortant de leurs cocons.
Je n'entre pas dans les détails des épreuves traversées par nos jeunes héros en devenir, vous les découvrirez par vous-mêmes, mais, croyez-moi, c'est coton. Nombreux sont ceux qui n'en sortent pas vivants, car c'est bien l'enjeu de certains de ces tests grandeur nature auxquels sont soumis les apprentis soldats.
Une tâche rendue encore un peu plus difficile pour Vaelin, qui comprend rapidement qu'il a droit à un traitement de faveur : manifestement, on en veut à sa vie, et ce n'était pas prévu au programme... De plus, il développe certaines aptitudes qui le troublent et qu'il peine à la fois à comprendre et à maîtriser. Un peu comme si, par moments, une voix s'emparait de lui et le guidait...
Qui est vraiment Vaelin ? Si j'avais des certitudes à son sujet, je ne les partagerais évidemment pas ici, mais je dois dire qu'il reste encore énormément à apprendre à son sujet. Dans ce premier tome, on le voit grandir, entrer, alors qu'il est encore bien jeune, dans une vie d'adulte qui sera celle d'un chef de guerre. Il a été formé pour cela, mais, plus encore, ils semble né pour cela.
Si l'on s'en tient à l'aspect purement roman d'apprentissage, on ne rend pas justice à "la Voix du sang", qui s'avère plus complexe que cela. D'abord, parce que, bien vite, à cela, s'ajoute une quête initiatique, qui va occuper une bonne partie de la deuxième moitié du roman, lorsque Vaelin n'est plus un élève mais bien un officier supérieur, recevant des ordres et les appliquant.
Cette épreuve du feu, si je puis dire, va en effet s'accompagner d'une réflexion personnelle quant à la finalité de ces actes. Vaelin est une machine à tuer, c'est certain, mais l'apprentissage de la Loge du Sixième Ordre n'a pas tué en lui toute humanité, ni tout libre arbitre, bien au contraire. Pris entre les ambitions d'un monarque rêvant de porter ses valeurs au-delà des frontières et un ordre religieux cachant bien des secrets, Vaelin doute...
Il ne doute pas de lui, car il connaît ses forces, mais bien de ceux pour qui il agit. Vaelin est intègre et les ordres qu'il reçoit font grincer son sens moral. Jusqu'à l'usure, jusqu'à se sentir désabusé, éreinté de n'être que l'instrument d'un dessein qui le dépasse mais qu'il devine injuste. Illégitime. Je ne révèle rien, rassurez-vous, en disant tout cela : on le constate très tôt dans le roman.
En effet, Anthony Ryan a choisi une narration particulière, jouant sur les flash-backs et d'autres ficelles, assez classiques mais qui fonctionnent bien : le récit que j'ai évoqué jusque-là est le coeur du roman, évidemment, mais il est encadré par autre chose. On comprend, au fil des pages, qu'on lit le récit de Vaelin, ses souvenirs livrés sans fard, sans rien cacher.
Mais, dans le même temps, on sait que le vaillant guerrier, dans une situation délicate qu'il reste à préciser, se livre à un interlocuteur, en lui révélant une vérité partielle, voire carrément arrangée à sa sauce. Ce dialogue, qui ouvre le livre lors du prologue et que l'on retrouve ensuite à intervalles réguliers, nous donne une image assez paradoxale de Vaelin.
On l'y devine ennemi n°1 du peuple auquel appartient son interlocuteur. Un monstre qui inspire frayeur et dégoût. La simple liste de ses surnoms, dont le plus fameux, le Tueur d'Espoir, fait frémir et l'on imagine que les récits de ses abominables hauts faits doivent alimenter les veillées et faire frissonner des plus petits aux plus grands.
Mais, celui que l'on nous décrit comme un croquemitaine n'apparaît pas au lecteur sous ce jour-là. Au contraire, comme je l'ai dit plus haut, c'est un homme blasé, démotivé, sans illusion qui se dresse devant nous. Oh, le combattant, s'il le faut, est encore capable de bien des exploits, armes à la main, mais à quoi bon, désormais ? Les idéaux inculqués au fil des ans lui paraissent factices, indéfendables.
Vaelin tient sur ses épaules ce premier tome, et sans doute, par la suite, toute la trilogie. Il a tout du héros épique, sans peur, sans reproche, invincible et aussi craint par les uns qu'admiré par les autres. Et pourtant, il se démarque de cela. Personnage arthurien dans le sens où il semble élu (mais par qui et dans quel but ?), il prend sur la fin les accents d'un Lawrence d'Arabie, en suivant le respect que lui inspire ses ennemis désignés.
Lors des récentes Imaginales, Anthony Ryan a participé à une table ronde autour de la question de l'Empire, qu'on défend ou qu'on combat. Vaelin, d'une certaine façon, et sans empiéter sur la suite du cycle, qui m'intrigue énormément, se trouve des deux côtés de la barrière : au service de l'empire, officiellement, il s'avère surtout dévoué au culte de la Foi, avant de se détacher de ces deux influences. Jusqu'à se retourner contre elles ?
Héros superbe et valeureux, capable de remporter à lui seul de grandes victoires, mais plus sûrement encore, de mener une armée sûre de sa force à son but, Vaelin se mue peu à peu en héros tragique, dont le destin est entre les mains de puissances supérieures, dont certaines sont encore floues. Risque-t-il de basculer dans une dimension qui lui vaudra l'étiquette de traître ? C'est bien possible...
"La Voix du Sang" débute comme un roman de fantasy picaresque, mais peu à peu, l'insouciance de l'enfance s'efface pour laisser place à des tensions bien plus dramatiques. L'amitié entre les jeunes hommes composant le groupe dont fait partie Vaelin, les premiers émois amoureux, aussi, la fidélité et la loyauté sont les moteurs de ce premier tome.
Mais, dans le même temps, les mensonges, les manigances, de lourds secrets dont on ne fait encore que deviner l'ampleur et les implications, apparaissent et font planer une menace croissante. Vaelin est un guerrier sans égal, sans doute, mais sa jeunesse, vécue à l'écart du monde, en a fait un naïf, en tout cas, quelqu'un d'inexpérimenté en matière de relations humaines.
Vaelin sert des idéaux, autour de lui, d'autres servent des projets, des ambitions, sont à la recherche de pouvoirs dont l'idée n'effleure même pas le jeune homme. Parmi eux, un personnage qui va certainement prendre de l'ampleur dans les deux prochains tomes : la princesse Lyrna. J'ai gardé son cas pour la fin, car je dois avouer que je suis assez perplexe à son sujet...
De la même génération que Vaelin, on la découvre pourtant bien plus rouée que lui, élevée aux intrigues de cour et l'ambition chevillée au corps. Mais, faut-il se méfier d'elle ou, au contraire, s'appuyer sur elle pour essayer d'y voir plus clair dans les jeux d'influence en action dans le royaume ? Je suis bien incapable de le dire pour le moment.
Vous l'aurez compris, au-delà de sa dimension éducative et de son côté épique qui monte en puissance au fil des chapitres, ce premier tome pose aussi bien des questions. Le lecteur se retrouve dans l'expectative, comme Vaelin, mais, celui-ci prend tout le monde à contre-pied. Vous vous attendez à un énorme cliffhanger, un rebondissement de dernière minute qui vous scotchera et vous poussera à attaquer illico la suite ?
D'une certaine façon, c'est le cas, mais difficile de faire plus inattendu que cette fin de premier tome. Vaelin est imprévisible, mais pas seulement sur le champ de bataille. C'est aussi un garçon qu'on sent prématurément épuisé, en particulier sur le plan mental. Et son état d'esprit, alors qu'on a encore deux tomes à découvrir, est déroutant.
Ce sera d'ailleurs la première des curiosités du tome 2 : la situation exacte de Vaelin et comment elle va évoluer. Qu'il le veuille ou non, entre ceux qu'il sert, ou est censé servir, ceux pour qui il aimerait prendre fait et cause et cette voix, il aura bien du mal à reprendre les rênes de son destin en main. Et n'en est sans doute qu'au début de ses aventures...