Retour à Whitechapel, de Michel Moatti

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À la mort de son père, en septembre 1941, Amelia Pritlowe apprend dans sa lettre testamentaire sa filiation avec Mary Jane Kelly, la dernière victime de Jack l'Éventreur. Amelia n'avait que deux ans au moment des faits, confiée aux bons soins paternels, jamais personne n'a osé lui avouer toute la vérité sur l'identité de sa mère, prétendant que celle-ci était décédée d'une maladie pulmonaire. Cinquante ans plus tard, alors que la ville de Londres subit les bombardements sauvages des allemands, Amelia, qui est infirmière au London Hospital, convoque les membres de la Filefox Society, tous ripperologues actifs, pour se plonger dans les archives et revoir chaque pièce du dossier. La tâche est ardue, mais également minutieuse et exaltante, car Amelia va littéralement remonter dans le temps pour revivre les heures sombres de la plus grande énigme criminelle et raviver les cendres froides des dépouilles du serial killer, entre août et novembre 1888. Le lecteur aussi va participer à cette étude longue et pointilleuse de l'affaire, en s'immergeant jusqu'au cou dans les quartiers pauvres pour constater la misère sociale, avec un souci du détail parfois pesant et indigeste. L'atmosphère nocturne et angoissante de l'East End du XIXe siècle y est dépeinte sans artifice. C'est glauque, miteux et effroyable, cela procure une sensation inconfortable et étourdissante. La reconstitution est d'ailleurs semblable à celle du film From Hell, dans sa volonté de souligner l'antagonisme social et d'apporter une autre lumière à cette intrigue. Michel Moatti propose en effet sa propre solution quant à l'identité de Jack l'Éventreur en une démonstration, aussi hypothétique soit-elle, pertinente et crédible. En gros, ses conjectures tiennent la route. Après, il faut s'attendre à une lecture au style factuel et un peu lourd, même si le livre se lit avec intérêt et s'apprécie pour son authenticité et son thème obsessionnel - Jack l'Éventreur reste un mythe absolu et alimente les spéculations les plus folles aux plus sordides. L'ouvrage découle d'un travail de longue haleine (Michel Moatti était employé aux archives victoriennes de Londres et membre de la Whitechapel Society de Londres). C'est peu de dire qu'il connaît son sujet sur le bout des doigts ! Lecture appréciable et intéressante.

10-18, coll. Grands Détectives, décembre 2015

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