Résumé :
« Cela faisait seize ans qu’Amélie Nothomb n’était pas retournée au Japon, ce pays qu’elle n’a cessé d’imaginer, de réinventer. Sous sa plume et dans son coeur, il était devenu fiction. Mais dans ce récit autobiographique, tout se veut réel. L’auteur de Stupeur et tremblements retrouve des lieux, des êtres qui ont compté (Nishio-san, sa nounou adorée et l’amoureux éconduit de ses 20 ans), nous raconte ses émotions, ses impressions. Elle évoque ses rapports avec la langue apprise dans son enfance, puis oubliée. Et laisse, sans crainte ni regrets, remonter les souvenirs. »
Mon avis :
Voici déjà ma cinquième lecture de la fabuleuse écrivaine qu’est Amélie Nothomb. Tout comme Stupeurs et tremblements, il s’agit d’un récit autobiographique. Même si j’avais beaucoup aimé ce dernier, je me suis rendue compte que je l’avais moins apprécié que les œuvres non-autobiographiques de cet auteur. Je n’avais pas eu le même enthousiasme et surtout je n’avais pas eu de coup de cœur. Je n’irais pas jusqu’à dire que j’appréhendais ma lecture de La Nostalgie heureuse, mais j’avais peur que cette petite pointe de déception refasse surface. Eh bien… J’avais tort. J’ai trouvé ce livre très intéressant, addictif, émouvant, passionnant… Bref, un Amélie Nothomb comme on les aime!
– Non. Il n’y a pas de Mizuno à Tokyo.
Il ne s’en rendait pas compte, mais cela revenait à dire qu’il n’y avait pas de Durand à Paris. Rinri est un prénom aussi exceptionnel que, chez nous, Athanase, sans doute pour compenser la banalité de son nom.
Dans La Nostalgie heureuse, l’auteure nous raconte son voyage au Japon en 2012. Une équipe de télévision voulait réaliser un reportage sur les traces d’Amélie Nothomb au pays du Soleil Levant. Or, cela fait seize longues années qu’elle n’y a pas été et elle est nostalgique à la moindre évocation de ses souvenirs d’enfance. En effet, l’une des personnages ayant le plus marqué ses jeunes années n’est autre que sa nourrice, Nishio-san, qu’elle considérait comme sa deuxième maman, et qu’elle est sur le point de revoir après tout ce temps. C’est également au Japon qu’elle a rencontré Rinri, un jeune homme fou amoureux d’elle qui gardera toujours une place spéciale dans son coeur. En réalité, plus qu’un livre autobiographique, c’est un véritable journal intime dans lequel Amélie Nothomb nous dévoile ses sentiments les plus enfouis…
Que dire à part « wouah » ? Honnêtement, j’ai un peu de mal à trouver les mots pour décrire ce que j’ai ressenti pendant cette lecture, c’était tellement… intense. Quand on lit une oeuvre de cette auteure, on se retrouve au milieu d’un univers qui parait parfois un peu étrange. En revanche, dans La Nostalgie heureuse, c’est bien la réalité et non la fiction qu’Amélie Nothomb décrit. Nous ne sommes pas au cœur d’un monde fictionnel dans lequel on aime se réfugier en tant que lecteurs, on se retrouve face à une réalité que l’on ne connait que trop. De plus, l’auteure se met véritablement à nu. Elle ne cherche pas à cacher les détails un peu trop personnels de son histoire, bien au contraire. Cela est loin d’être anodin car, les confessions de l’auteure associées à l’omniprésence de la réalité, poussent le lecteur à se poser des questions sur sa propre réalité et ses propres sentiments. Cette lecture a donc été, pour moi, très intense du début à la fin.
A la question de savoir si la madeleine de Proust est nostalgique ou natsukashii, elle penche pour la deuxième option. Proust est un auteur nippon.
Amélie Nothomb a indiscutablement un don pour l’écriture, mais bien sûr, je ne vous apprends rien. C’est justement ce talent qui fait qu’elle est capable de décrire ses sentiments avec une telle exactitude que c’en est presque effrayant. Parfois on a l’impression d’être la seule personne au monde à ressentir telle ou telle émotion, on pense que personne n’a jamais été aussi heureux ou malheureux que nous. Lisez ce livre et vous changerez d’avis. Vous vous rendrez compte que l’auteure arrive à mettre des mots sur des émotions très complexes que l’on a tous déjà ressenti au moins une fois dans notre vie.
Il ne reste rien du kenshō, sinon le genre de gueule de bois particulière qui succède aux extases prolongées : je suis à bout, sans énergie, un lambeau de néant fatigué.
Vous l’aurez donc compris, le gros point fort de ce livre est son côté très personnel. Cela est d’autant plus émouvant que l’histoire dont nous fait part Amélie Nothomb est très touchante. Comme elle le dit au début de son livre, elle a vécu ses premières années au Japon. Elle allait à l’école japonaise, aimait aller au parc admirer les cerisiers en fleurs, était en adoration devant sa nourrice et tout à coup, son père ne travaillant plus à l’ambassade de Belgique dans ce pays, elle est arrachée au pays où elle a tous ses repères. Tout semblait si parfait qu’elle avait parfois l’impression d’avoir inventé tous ses souvenirs, que tous ceux-ci n’était que le fruit de son imagination et qu’elle n’avait jamais vécue toute ces choses si merveilleuses. Lorsqu’elle retourne dans ce pays, c’est toute son enfance et également sa jeune vie d’adulte (puisqu’elle y ait retourné vers l’âge de vingt ans) qui lui reviennent en mémoire. Lorsqu’elle revoit Nishio-san et Rinri, elle peine à croire qu’elle a réellement vécu à leur côté. Tout s’est passé il y a si longtemps qu’elle a encore du mal à y croire. J’ai trouvé ça très émouvant car, sauf si on l’a vécu, on ne peut qu’imaginer ce que ça fait d’être déracinée à l’âge de cinq ans, de devoir recommencer sa vie à zéro comme si la précédente n’avait jamais eue lieue.
Pourvu que ce soit un enlèvement. Ce chauffeur travaille pour la yakuza, qui demandera une rançon à mon éditeur. Et ce dernier ne la versera pas, trop content d’avoir trouvé une manière si romanesque de se débarrasser de moi.
En résumé, ce livre est littéralement une grosse claque. On est submergé par toutes les émotions qu’a ressenti Amélie Nothomb lors de son voyage au Japon. Bien évidemment, ce livre m’a donné envie de continuer ma découverte de l’oeuvre de cette auteure, en général. Mais, plus particulièrement, il me pousse à découvrir le livre Ni d’Eve ni d’Adam qui raconte son idylle avec Rinri. J’ai vraiment hâte de le lire et d’en apprendre plus sur leur relation et sur les raisons qui ont poussé Amélie Nothomb à ne pas s’unir à lui pour la vie…
Note : 20/20
Les installations portuaires sont aussi anéanties que si elles avaient été bombardées. Il faut un effort constant de la mémoire pour se rappeler qu’une telle destruction est l’oeuvre de la nature : dans un saccage aussi laid, on croirait reconnaître la patte de l’homme.