Huit mois pour te perdre de Marie-Diane Meissirel aux éditions Daphnis et Chloé
Emma vit depuis de nombreuses années dans les Balkans. Aussitôt ses études de droit terminées, elle a choisi de se consacrer au sein d'organisations internationales, à la défense des victimes de l'épuration ethnique dans ces nouvelles républiques issues de l'ex-Yougoslavie. À la veille de l'entrée de la Croatie dans l'Union Européenne, elle travaille sur la corruption qui gangrène le pays. Son métier la passionne et elle est constamment en déplacements. Emma a un fils, Bruno, qu'elle élève seule avec l'aide de Dunja, sa nounou croate.
Alors qu'elle arrive à Zagreb, elle apprend que son appartement vient d'être cambriolé. Un deuxième appel plus important et plus alarmant lui apprend que sonfils et sa nounou ne sont pas rentrés à la pension de famille dans laquelle Dunja et Bruno sont en vacances en attendant d'être rejoints par Emma. La disparition devient vite inquiétante. Emma prend la route pour partir à la recherche de son fils.
Pendant tout le trajet qui va la mener à Hvar, Emma panique, elle culpabilise. Et si Bruno avait été enlevé. De nombreuses personnes lui en veulent dans la région. On ne fait pas carrière dans la poursuite des criminels de guerre sans se créer des ennemis. Elle fustige son implication dans son travail. Elle s'en veut de n'avoir pas été assez présente pour son fils. Pourtant elle l'attendait avec impatience, ce bébé, le fruit de son amour avec Adam. Mais Adam a pris la fuite pour rejoindre sa famille aux Etats Unis. À la naissance de Bruno, plus rien. Emma se sent dans l'incapacité de s'occuper de son fils. Vite excédée par la tyrannie de ce petit braillard à laquelle elle ne peut opposer que ses cris. Elle n'a eu d'autre choix que de s'en remettre totalement à Dunja. Et si c'était Dunja qui avait enlevé son fils ? Elle l'aime tant ce petit garçon.
Huit mois pour te perdre est un roman à deux voix. Le portrait de deux mères sur fond de disparition. L'une, Emma, mère peu présente auprès de son fils, incapable de tisser un lien avec lui. L'autre, Dunja qui a perdu un fils, assassiné, et ne reconnaît plus le deuxième, Ratko, violent avec elle et qui file un mauvais coton. C'est l'amour maternel qui est disséqué dans ce livre, l'amour ou sa difficulté à exister et la culpabilité qui en résulte. Marie-Diane Meissirel nous dresse un portrait au scalpel, sans concession de ces deux mères, leur autocritique. Toutes les deux son attachantes mais de manières différentes. Je ne peux que vous conseiller la lecture de ce livre qui m'a tenu en haleine de bout en bout . Huit mois pour te perdre est le troisième roman de Marie-Diane Meissirel. Nul doute que je meprocurerai les deux premiers très rapidement.
" C'est trop lourd, ce poids qui s'abat sur mes épaules. Je n'ai plus la force d'avancer, j'essaie de me replier sur la bande d'arrêt d'urgence. J'aimerais pouvoir pleurer. Comment en suis-je arrivée là ? Et si j'appelais Adam ? J'ai besoin que nous soyons deux pour retrouver notre enfant. Ma gorge se noue. Je sais pertinemment que c'est peine perdue. Je ne peux rien attendre de sa part. Il n'y a jamais eu de " notre " enfant, Bruno n'a toujours été que " mon " enfant et cela depuis le jour où j'ai annoncé à Adam que j'étais enceinte. Ce choix de garder mon bébé, je l'ai fait seule et je l'assume seule... Enfin c'est ce que je pensais avant de réaliser que j'en étais incapable. J'ai volontairement laissé la place à Dunja, elle remplit si bien mes vides de tendresse, de patience et de gaieté, et peut-être même d'amour. "