Décidément, le mois d'Avril est un bon mois de lecture : quand je regarde mon petit carnet (celui où je note toutes mes lectures), je me rends compte que j'ai rarement été dans une si bonne lancée. On en reparlera le jour du bilan mais mon côté pessimiste flippe un peu pour la suite, ça ne peut pas durer aussi longtemps, si ? Bref, tout ça pour vous mettre en appétit : ce bouquin, un roman historique, genre qui ne fait pourtant pas vraiment partie de mes lectures habituelles (ou alors avec un savant mélange avec notre présent), a fait gaiement et tristement son chemin et m'a fichu une claque hallucinante. C'est parti pour les explications.
De quoi ça parle
France, 1939. Dans le village de Carriveau dans la Loire, Vianne Mauriac fait ses adieux à son mari qui part au front et se retrouve seule avec sa fille. Elle ne peut imaginer que les nazis vont envahir le pays. Pourtant, lorsqu'un capitaine allemand réquisitionne sa maison, elle est forcée d'accueillir un officier sous son toit. Et fait le choix de protéger sa fille avant la liberté de son pays... Sa sœur Isabelle, 18 ans, a passé son enfance dans des pensionnats depuis la mort de leur mère, et son père décide de l'envoyer vivre avec Vianne. Mais son tempérament rebelle met en danger leurs vies à toutes. Isabelle décide donc de partir vivre à Paris, le jour de l'entrée des Allemands dans la ville. Impétueuse et pleine d'idéaux, elle s'engage très vite dans la Résistance sous le nom de code "le Rossignol" et fait régulièrement passer des aviateurs anglais en Espagne. Deux sœurs, deux destins et deux façons de survivre à la guerre et à l'envahisseur. Un grand roman sur l'amour, la liberté, les idéaux et sur le rôle des femmes pendant la guerre.
Et ça donne quoi
Habituellement, je ne suis pas particulièrement friande de récit se déroulant pendant l'une des deux guerres mondiales, j'ai l'impression que le sujet a été traité en long, en large et en travers. Du coup, je ne peux pas vraiment vous dire pourquoi celui-là m'a assez tapé dans l’œil pour que je me décide à l'acheter (même si je me doute que c'est juste à cause de la dernière petite phrase de la quatrième de couverture : "le rôle des femmes pendant la guerre"). Et bien m'en a pris ! Ce roman est magnifique. Si le sujet de la guerre est souvent abordé, j'ai l'impression que celui de l'occupation l'est moins (ou alors, c'est moi qui choisis mal mes lectures, mea culpa). Ici, nous avons le point de vue de deux femmes qui, si elles sont liées par le sang, semblent ne rien avoir en commun : Vianne est une mère de famille aimante et douce, qui a tendance à se cacher derrière son mari pour toutes les décisions importantes et Isabelle est un jeune esprit libre, impétueuse, irréfléchie et pleine de courage. Les deux femmes sont tour à tour agaçantes (Vianne par son immobilisme et Isabelle par son côté casse-cou) puis, petit à petit, nous en venons à apprécier et à comprendre leurs défauts et leurs qualités. Leur évolution est magnifique et très réaliste et nous pouvons facilement nous identifier (surtout en tant que femme) à l'une ET à l'autre (même s'il est toujours difficile de savoir comment nous nous serions comportés dans les mêmes situations...).
Chaque page, chaque chapitre gagne doucement en intensité et on n'en peut plus d'attendre la fin, pas celle du roman mais celle de cette foutue guerre qui détruit tout (pardon pour la banalité mais cette phrase a ici toute sa place). Je n'ai pas compté le nombre de fois où j'ai vérifié une fois, deux fois, trois fois la date pour savoir si les personnages avaient encore une chance de tenir un an ou quelques mois de plus. L'humanité dans ses aspects les plus beaux (mais aussi les plus sombres) y est décrite avec beaucoup de sensibilité, que ce soit par les actes de la Résistance mais aussi par toutes les petites choses du quotidien qui deviennent de plus en plus dures au fil des pages.
S'il est difficile de parler de tous les aspects de ce roman sans trop en dévoiler, ce que je vais surtout retenir tourne autour de cette phrase, que l'on trouve au milieu du roman : "La France est devenue un pays de femmes", on a toujours tendance à minimiser les actes féminins pendant la guerre puisque, et c'est encore plus vrai à l'époque, ce ne sont pas elles qui vont directement se battre. Pourtant, nous insistons ici un véritable combat, plus insidieux, peut-être plus subtil mais qui vaut vraiment la peine que l'on ne l'oublie pas.
4,5/5
En Bref
Un superbe roman coup de cœur sur un sujet difficile, juste et réaliste, qui ne verse pas dans le pathos, un magnifique témoignage sur la vie des femmes et des hommes de la Résistance et sur ceux qui ont "juste" lutté pour leur vie et pour celle de leurs proches. L'autrice arrive à nous faire redécouvrir notre propre pays et notre propre histoire, une véritable réussite ! Ne le laissez pas passer...