L'été, le temps de lire, du lourd et du léger, du français et de l'étranger, des romans et des récits. L'été, le temps de relire aussi.
Sans faire de recherches, plein de longues oreilles me reviennent encore en mémoire: les "Petit Lapin" de Marie Wabbes, "Max" de Rosemary Wells, les lapins d'Olga Lecaye et de son fils Grégoire Solotareff, le "Petit Lapin" de Harry Horse, "Miffy" de Dick Bruna, ceux de Richard Scarry, de Claude Boujon, "Lulu" d'Alex Sanders, sans oublier ceux de Malika Doray (lire ici), Audrey Poussier, Komako Sakai (lire ici) et bien sûr le "Simon" de Stephanie Blake.
Une belle série de nouveautés
A tous ces titres s'en ajoutent d'autres, sortis en 2016.
Fort bien mis en pages, illustré avec recherche de documents anciens, de citations et d'œuvres d'art contemporain, ce numéro aborde le lapin, et un peu le lièvre son cousin, sous toutes ses coutures. Il évoque plusieurs situations où hommes et lapins vivent au même endroit, avec leurs conséquences, positives ou négatives, domestication, élevage, gestion des écosystèmes. Le lapin qu'on moque souvent pour ses capacités de reproduction nous montre surtout la limite humaine à la maîtrise du vivant. De la peluche au gibier à cuisiner, de l'animal de laboratoire à celui de compagnie, le lapin a plus d'une histoire à nous raconter, la sienne d'abord, la nôtre ensuite, et plein d'anecdotes qu'il est passionnant de découvrir dans cet ouvrage passionnant bien fait, réalisé par des intellectuels, des philosophes et des artistes. Pour les ados et les adultes.
Le style de l'auteur-illustrateur s'identifie tout de suite, et dans l'image, privilégiant le noir comme une couleur à part entière, et dans le ton. C'est l'histoire d'un frère et d'une sœur qui aiment jouer et qui aiment encore plus jouer à se faire peur. Un soir, la tombée du jour les surprend et ils sont obligés de passer la nuit dehors, dans le creux d'un rocher qu'ils connaissent. Quand ils se réveillent dans le noir, ils entendent des loups. C'est aussi le moment que choisit Jean pour raconter à Jeanne l'histoire du terrible sorcier Abraham!
Pas facile de se rendormir le ventre creux... Jeanne décide de rendre visite au potager du voisin. La voilà partie sous la lune, "sur la pointe des pieds". Elle récolte des carottes et se fait surprendre par... OUIIIIII. Vous avez deviné, Abraham. Jean lui vient en aide et rencontre aussi un incongru. Frère et sœur s'en sortiront toutefois brillamment et resteront persuadés qu'ils ont croisé le magicien cette nuit-là. Un album hautement graphique qui joue sur le plaisir d'avoir peur et de tourner la page pour se rassurer. Dès 4 ans.
Papa et Maman Lapin rusent avec Dame Tortue pour traverser facilement la rivière. Ils l'invitent à faire le compte de leurs enfants respectifs. Ils profitent surtout du pont flottant que leur offrent tous les bébés tortues alignés. Mais leurs moqueries leur coûteront cher: alors qu'ils font leurs derniers bonds sur les carapaces, les tortues mordent leurs longues queues et les leur arrachent. "C'est depuis ce jour que les lapins n'ont plus, en guise de queue, qu'une petite boule touffue, pour avoir voulu duper madame Tortue", conclut l'album dont les douces illustrations tempèrent l'efficacité du texte. Dès 3 ans.
Des mêmes auteurs, un autre album très réussi, "Le Plouf" (Editions des Eléphants, 32 pages), un petit conte de randonnée jouant sur la peur, la bêtise et la rumeur et qui illustre savoureusement l'adage "réfléchir avant d'agir".
Ils adorent le pré et ses fleurs jaune d'or. Il faut toutefois voir leur tête quand une voix leur explique que ce sont des pissenlits (= tampopo). La coccinelle parlante sera vite rejointe par d'autres insectes qui vont expliquer à Fû (= le vent) et Hana (= la fleur) le cycle de la vie en se basant sur leurs prénoms. Une initiation teintée de poésie, illustrée de dessins aux crayons de couleur particulièrement expressifs. Dès 4 ans.
Tous les moyens lui seront bons même les plus grands, les plus démesurés. Les deux récits donnent les visions différentes des protagonistes. Au centre, le lecteur appréciera les quiproquos, les mauvaises compréhensions, les allers et les retours, jusqu'à la pirouette finale qui réconciliera les anciens ennemis. C'est parfois un peu compliqué mais riche et attachant. Dès 6 ans.
Les erreurs de cartes deviennent le fil d'une histoire drôle et poétique. Quand Lapin cherche l'autre lapin, il découvre un avion rouge. Parti à son bord, il interroge les oiseaux, "Où est l'autre lapin?", mais il rencontre un autre groupe d'oiseaux qui tous vont ailleurs. Lapin atterrit en urgence sur une île où il découvre un autre avion rouge en panne. Là il fait la connaissance d'un roi qui voit arriver non l'autre lapin mais l'autre roi. L'histoire se poursuit de loufoqueries en étrangetés avec toujours le fil rouge du Memory, jusqu'à ce que chaque paire soit reconstituée. En fin d'ouvrage, un vrai jeu de Memory. C'est aussi charmant que déconcertant, innovant dans le bon sens du terme en tout cas. Dès 4 ans.
Rappel
DTPE 1: "Le Roi René", René Urtreger par Agnès Desarthe (Odile Jacob).
DTPE 2: "Cœur Croisé", Pilar Pujadas (Mercure de France).
DTPE 3: "Sens dessus dessous", Milena Agus (Liana Levi).
DTPE 4: "La reine du tango", Akli Tadjer (JC Lattès).