Animosity #1

Le petit nouveau Aftershock Comics a de très bons titres à nous proposer. Et il le prouve une fois de plus avec Animosity, scénarisé par Marguerite Bennett (auteure d' Insexts, également chez Aftershock) et Rafael De Latorre, un artiste brésilien au talent remarquable. On y parle d'animaux qui prennent conscience d'eux même et c'est incroyable.

Il y a des œuvres qui vous serrent le cœur, qui vous mettent les larmes aux yeux et qui vous prennent aux tripes. Animosity est de celles là.

Jesse est une petite fille qui adore son chien, Sandor. Sandor adore aussi Jesse, d'ailleurs, un beau jour, il le lui dit. " I love you Jesse. " Ce jour, c'est le jour de l'éveil. Le jour où tous les animaux du monde prennent conscience de leur individualité, de leur condition, le jour où ils se mettent tous à parler. Certains sont plus énervés que d'autres, plus enragés contre l'espèce humaine qui les maltraite, plus enclin à une folie sanguinaire qui les poussent à tuer tous leurs tortionnaires. Et d'autres aiment Jesse, aiment ceux qui les ont nourri, adoré, aiment ceux qui ont pris soin d'eux. Il y a ceux qui veulent tuer tous les humains et ceux qui veulent protéger leur humain à eux, celui qu'ils aiment. Voilà qui promet des batailles éthiques, épiques et moralement difficiles à gérer.

Si vous aimez les animaux, vous aller chialer un peu dans votre âme. J'aime autant vous prévenir. Si vous ne les aimez pas, mieux vaut qu'on en reste là parce que ce bouquin sera pour vous un vrai film d'horreur tendance prophétie potentielle et je vous le déconseille. Restons donc entre amis des bêtes, entre personnes qui font "aaw" quand un petit chien rate une marche et "ooh" quand un aigle prend son envol. Dans Animosity, tous les animaux ont leur place : du panda au chat, du rat au moineau, en passant par tigres, orques et corbeaux. La question qui est posée à toutes ces espèces : quelle sera leur première réaction en prenant conscience d'eux-même ? Le résultat est passionnant, surprenant et génial.

Animosity #1

Spoiler : à la fin, on devient tous végétariens.

Je dois vraiment faire attention à ne pas trop en dire car je ne veux pas vous gâcher la surprise : les réactions sont si diverses, si bien pensées... c'est fou. On pourrait résumer Animosity de cette façon : une idée simple, une exécution d'excellence. C'est la grande, très grande force de ce premier numéro. Les idées sont riches et présentées de façon très claire, très efficace. Parfois drôle, parfois violent et tragique, Animosity joue avec nos émotions et on en redemande. Le second numéro est attendu pour le 14 septembre et le troisième pour le 19 octobre, les deux sont servis pas des couvertures qui promettent de gros morceaux de baston et de tragédies qui vont nous traumatiser. J'avais déjà les larmes aux yeux avec ce premier numéro (Le chien ! La vache ! Les pandas !), c'est désormais certain, je prépare les mouchoirs pour les suivants.

La partie artistique est également incroyable. C'est superbe. Le dessin est vif, ultra concentré sur des personnages soignés et des animaux divers et toujours parfaitement détaillés. On sent le travail de l'artiste, Rafael De Latorre, les recherches qu'il a du faire pour dessiner autant Animosity #1d'espèces différentes. C'est considérable. Le dessin est magnifiquement flatté par un boulot de couleur également à la hauteur d'un grand titre. J'en profite pour vous faire remarquer que chez AfterShock Comics, on crédite les coloristes et les lettreurs sur la couverture. Ce qui est absolument génial pour la reconnaissance de ces métiers trop souvent oubliés, cantonnés à l'ombre dans le milieu du comic book. Citons donc Rob Schwager à la couleur et Marshall Dillon au lettrage qui, eux aussi, font du très bon boulot. Sur Twitter, Aftershock justifie cette décision en disant "Chaque livre inclut les noms de tous ceux qui ont participé au comic book ! Nous sommes une grande famille." Si seulement cela pouvait être aussi naturel pour tous les éditeurs.

Enfin, vous aurez peut-être remarqué en lisant, par exemple, ma critique de Faith que je suis attachée aux questions de représentation. J'y ajoute avec plaisir l'amour de l'égalité et l'aspiration à une société plus juste. Vous me direz, quel rapport avec un livre qui parle d'animaux ? Mais tous les rapports mes amis, tous les rapports ! Parce qu'alors qu'on ne parle pas d'humains, on réussit à mettre des hétéros, des gays, des gens de toutes les couleurs, des mecs violents avec leur meuf qui se font engueuler comme les petites merdes qu'ils sont et même, mais cette fois chez les animaux, des couples en crise, des rébellions de poules contre leur coq et des réflexions de ouf sur la violence animale, des hommes envers les animaux et des animaux entre eux (j'utilise un pluriel mais on est d'accord que pour certaines de ces occurrences, il ne s'agit que d'une case, ce qui est déjà bien !). Joli boulot de Marguerite Bennett, qui m'a l'air très portée sur toutes ces passionnantes questions sociales et qui ne craint pas de les aborder, de les exploiter, de mettre les pieds dans le plat sans en faire ni un fromage, ni un argument de vente. La diversité est là et c'est juste normal.

Je ne sais pas qui s'est rendu coupable de la mise en page et des choix de narration mais ils sont également merveilleux. Trois grandes doubles pages qui fourmillent de détails drôles et touchants, des pleines pages superbes pour exprimer toute la force de l'attachement entre Sandor et Jesse... le petit 18 pages d' Animosity a des tas de choses à dire et parvient à le faire avec une élégante fluidité. On oublie jamais le danger, la violence, même si on est déjà plein de cet amour magnifique qui peut lier les hommes et les bêtes. Un titre qui remet délicatement mais fermement en question vos choix et vos comportements envers les êtres vivants qui vous entourent.

Animosity #1Animosity #1

AflterShock Comics * Par Marguerite Bennett, Rafael De Latorre, Rob Schwager & Marshall Dillon * $3.99
Ça a été mon coup de cœur de la semaine et ce sera, sans doute, celui du mois si ce n'est plus. Animosity #1 développe une idée simple : les animaux prennent soudain et tous en même temps conscience d'eux-même et sont dès lors capables de parler. Narration, dessin, couleur, l'équipe rassemblée autour du titre est de grande qualité et nous en mets plein les yeux, la tête et le cœur. J'espère que la suite sera d'aussi grande qualité. J'y crois.