Bonjour à tous !
Aujourd’hui j’avais (je=Yoko, Mlle Jeanne apporte quant à elle ses avis sur ces deux romans) envie de vous parler de littérature ado-adulte. Je lis beaucoup de ce type de romans depuis à peu près quatre ans et, même si j’en ai adoré une très large majorité, je trouve de plus en plus frustrant que la vision de l’adolescence qui y est souvent donnée soit aussi éloignée de la réalité. J’ai de plus en plus l’impression qu’un très grand nombre d’auteurs idéalisent leur adolescence ou la montrent d’une manière beaucoup plus romanesque qu’elle peut être en réalité. Ce reproche s’adresse à des romans comme ceux de John Green (dont j’ai lu Nos étoiles contraires et La face cachée de Margot), de David Levithan (A comme Aujourd’hui), comme L’été où je suis devenue jolie (le titre assez niais aurait dû m’alerter mais c’est une série qui est énormément lue), comme Lèche vitrines, Cinder, La pire mission de ma vie, Hunger Games, etc. Bref la liste est longue (et, même si cela peut paraître anecdotique, beaucoup sont des bestsellers) et véhicule un certain nombre de clichés ou de situations types qui deviennent rapidement lassantes. D’où cette envie de vous parler de romans qui sortent du lot : aujourd’hui L’année solitaire et Songe à la douceur, mais je ne peux que vous renvoyer vers d’autres articles du blog comme ceux sur Frangine, Là où tombent les anges, Le livre de Perle, etc.
Quatrième de couverture : On est censés vivre la plus belle période de notre vie.
On est jeunes, on est en train de décider de notre avenir (c’est en tout cas ce qu’on nous répète), on a des amis. Mais en fait, tous, on attend que quelque chose change. Becky, ma meilleure amie avec qui je rigole de moins en moins. Lucas, qui réapparaît dans ma vie après toutes ces années. Mon frère Charlie, la plus belle personne que je connaisse. Michael Holden, avec son sourire trop grand. Et moi, la fille la plus misanthrope et pessimiste du lycée.
On attend tous que quelque chose change.
Il y a un certain nombre de raisons qui font que j’avais envie de vous parler de l’Année Solitaire. Parce qu’on a une adolescente complètement misanthrope, mal dans sa peau isolée au sein d’un groupe d’amies, mais tout de même forte : un personnage nuancé assez proche de certains adolescents. Tori se cherche, a des idées noires, continue pourtant à avancer et (point important) n’attend pas le prince charmant. Parce que ce roman sent le vécu : Alice Oseman, l’auteure, n’avait que 18 ans lorsqu’elle l’a écrit. Parce que c’est un roman ancré dans son époque, avec des personnages pour qui bloguer, par exemple ;), est quelque chose de banal. Parce que vous allez rire, vous intéresser à ces personnages dans lesquels vous vous retrouverez d’une manière ou d’une autre, parce vous aller vous interroger.L’intrigue paraît simple, voire même un peu clichée : un mystérieux individu qui annonce sur son blog chacun de ses piratages du lycée, mais elle se révèle complexe, de telle sorte qu’on ne sait jamais vraiment où l’auteure nous emmène (hormis la fin, peut-être un peu facile).On trouve dans l’écriture d’Alice Oseman, dans sa manière de peindre ses personnages, d’aborder avec finesse leur psychologie, une authenticité. Cette authenticité qui est l’exact opposé de l’idéalisation de l’adolescence dont je parlais plus haut.
Je ne peux pas vous garantir que ce livre vous plaira, mais je vous conseille vraiment de le lire, ne serait-ce que par curiosité et parce qu’il est différent.
L’avis de Mlle Jeanne : J’ai vraiment adoré L’année solitaire ! C’est un roman écrit par une jeune femme de 18 ans qui a un regard très vrai sur l’adolescence. Tori, bien qu’elle soit pessimiste et misanthrope (j’ai appris un nouveau mot !), comme le dit le résumé, et comme elle le reconnaît dans le roman, est un personnage très attachant. En fait, tous les personnages secondaires sont attachants : Michael, Charlie, Becky, Lucas… Ils font des erreurs (et Tori aussi), mais c’est aussi ce qui les rend plus vrais, plus authentiques…
Par contre, la ouverture n’est pas très belle (j’ai un peu l’impression qu’elle a voulu se rapprocher de celle de « Nos étoiles contraires », mais ce n’est pas très réussi je trouve)…
Je remercie encore l’équipe des éditions sarbacane pour m’avoir offert ce roman pendant un stage !
résumé de l’éditeur : Quand Tatiana rencontre Eugène, elle a 14 ans, il en a 17 ; c’est l’été, et il n’a rien d’autre à faire que de lui parler. Il est sûr de lui, charmant, et plein d’ennui, et elle timide, idéaliste et romantique. Inévitablement, elle tombe amoureuse de lui, et lui, semblerait-il… aussi. Alors elle lui écrit une lettre ; il la rejette, pour de mauvaises raisons peut-être. Et puis un drame les sépare pour de bon. Dix ans plus tard, ils se retrouvent par hasard. Tatiana s’est affirmée, elle est mûre et confiante ; Eugène s’aperçoit, maintenant, qu’il la lui faut absolument. Mais est-ce qu’elle veut encore de lui ? Songe à la douceur , c’est l’histoire de ces deux histoires d’un amour absolu et déphasé – l’un adolescent, l’autre jeune adulte – et de ce que dix ans à ce moment-là d’une vie peuvent changer. Une double histoire d’amour inspirée des deux Eugène Onéguine de Pouchkine et de Tchaikovsky – et donc écrite en vers, pour en garder la poésie.
Avec Comme des images et Les petites reines, Mlle Jeanne et moi étions déjà tombées sous le charme de la plume et des idées de Clémentine Beauvais. Pourtant cette fois-ci, lorsque j’ai débuté Songe à la douceur, ça a été différent. Il n’y a pas beaucoup de romans que vous souhaiteriez ne jamais finir. En fait pour l’instant je pourrais les compter sur les doigts de la main (et les livres de cet article monopolisent deux doigts).
Pour ce qui est de l’histoire, on suit un couple de personnages et leur entourage à deux moments de leurs vies. Tatiana et Eugène adolescents et Eugène et Tatiana adultes. Au début ils tombent amoureux, ou plutôt Tatiana est amoureuse d’Eugène et lui ne veut pas d’elle, puis dix ans plus tard, alors qu’ils n’auraient jamais dû se recroiser, la situation se complique encore plus. La partie adolescente m’a parue extrêmement juste et bouleversante. Si cette partie du roman est romantique, c’est un romantisme simple et touchant. Le narrateur omniscient et, qui semble nous raconter l’histoire, nous fait nous sentir très proche très vite des deux personnages. On comprend cet amour à sens unique, un peu pathétique un peu tragique un peu exagéré (tout à fait ce qu’on peut ressentir à l’adolescence), et on comprend que ça ne peut pas bien se terminer, que de manière réaliste, Eugène va la rejeter, persuadé d’en savoir plus qu’elle sur la vie, complètement désillusionné alors qu’elle, elle vit encore de ses illusions. Et là où le roman devient vraiment exceptionnel c’est que l’on comprend progressivement que cette adolescence, cet amour adolescent, a façonné la personnalité d’Eugène et Tatiana adultes : la partie adolescente conditionne la partie adulte, qui est en quelque sorte la conséquence de l’été où ils se sont rencontrés.Vous aurez surement saisi le tragique du roman à travers la situation, un tragique que l’on retrouve dans l’écriture versifiée et dans ce narrateur, qui nous présente les personnages et leurs actions un peu à la façon du chœur des tragédies grecques.
Lisez ce roman, amusez-vous à lire en vers, rencontrez ces personnages. Et vous verrez qu’Eugène et Tatiana ne vous quitteront plus tout à fait ! Au point que personnellement, je n’ai qu’une envie ( et Mlle Jeanne a la même) : trouver le roman de Pouchkine et retrouver ces deux personnages !
L’avis de Mlle Jeanne : J’ai lu deux autres romans de Clémentine Beauvais (Les petites reines et Carambol’ange), mais Songe à la douceur est de loin le plus original des trois. Si au début, j’ai eu un peu de mal à rentrer dans l’histoire, en partie parce que je faisais plus attention à la forme (système métrique des vers, rimes, etc) qu’au fond, je me suis vite rendue compte qu’il fallait lire ce roman comme un autre, sans chercher à tout analyser. Songe à la douceur est centré -presque- uniquement sur l’histoire d’amour, qui n’est généralement pas la partie que je préfère, et pourtant, j’étais captivée par ma lecture ; Clémentine Beauvais arrive à donner du suspens à cette histoire d’amour. Eugène et Tatiana ont des personnalités complexes, mais très intéressants, autant pendant leur adolescence que dix ans plus tard. Songe à la douceur montre à quel point on peut changer en dix ans – et c’est rassurant ! Je ne suis pas sure d’être très convaincante, mais j’ai vraiment adoré ce livre ; c’était la première fois que je lisais un roman en vers !
La couverture est magnifique et énigmatique (et elle fait un peu penser à celle de Quelqu’un qu’on aime de Séverine Vidal, également aux éditions Sarbacane).
la même marguerite pour les deux romans !