Parmi mes ami(e)s, j'ai de nombreux fans de Jane Austen. Il y a peu, l'une d'entre elle, connaissant ma passion folle furieuse pour 1) les listes, et 2) les recommandations littéraires, m'a demandé ce qu'elle pourrait bien lire après être tombée totalement et irrémédiablement amoureuse d' Orgueil et Préjugés (1813).
C'est son roman plus connu du grand public (et le plus adapté au ciné), ce qui me semble être un bon point de départ pour cette thématique Si vous avez aimé Jane Austen. (Je serai assistée dans ce proiet par mes fidèles minions et quelques invités, dont vous verrez les noms apparaître ici et là.)
Plus qu'une histoire à l'eau-de-rose, Orgueil et Préjugés est une véritable satire de la haute société anglaise de la fin du dix-septième siècle. Si vous aimez les romans sociaux, drôles et romantiques, agrémentés de costumes d'époque et de valeurs des siècles passés, courrez donc aussi lire... (Par Bloup)
(Je vous devine tout ébouriffés par cette audace. Si vous voulez passer à la suite, sautez directement au point 2.)
D'autres titres de cette romancière, alors, mais lesquels ? Par exemple :
C'est un roman où chacune apprend de la sensibilité de l'autre, tout en faisant face aux embûches de la société (très à cheval sur les positions sociales) dans laquelle elles évoluent. C'est dramatiquement romantique, délicieusement ironique, et même si tout porte à croire le contraire, ça se finit bien. (Par Bloup, dont c'est le favori)
Et encore trois gros pavés des familles :
the masterpiece. Beaucoup d'élégance dans la narration. Ce roman est donc centré sur le personnage d'Emma, jeune, belle, riche, intelligente, qui se distrait en jouant les entremetteuse avec plus ou moins d'habileté. Shenanigans ensue. Elle reçoit beaucoup d'attention de divers jolis partis mais non merci. (En plus, Emma a une fâcheuse tendance à lâcher des mots d'esprits contrariants, du coup, faut être à la hauteur.) 14 retournements de situations et 7 révélations dramatiques plus tard, on réalise en même tant qu'Emma que... non mais vous avez cru que j'allais vous spoiler la fin ?
Mansfield Park (1814), où Fanny est envoyée vivre chez ses cousins riches qui la méprisent gentiment, sauf Edmund qui la prend sous son aile et l'accompagne dans son apprentissage de la vie et des vertus (le JH veut entrer dans les ordres, pour situer). C'est un roman je dirais un peu plus moral que les autres, ce qui ne l'empêche pas d'explorer et de se moquer beaucoup des standards et double-standards sociaux de l'époque. On s'y épouse, on s'y trompe, on s'y enfuit en Écosse, on s'y dit ses quatre vérités en passant par 18 chemins, et tout est bien qui finit bien.
Voilà pour un avant-goût de Jane Austen : comme tout le reste de la liste, ce n'est qu'une sélection, bien sûr, faites vous votre opinion, etc.
À savoir que les textes de Jane Austen étant tombés dans le domaine public (70 ans après sa mort et, pour les traductions, 70 après la mort du traducteur), vous pouvez les trouver gratuitement sur le net (ici : ), et dans diverses éditions : il y en a pour tous les goûts. Je vous ai plutôt mis des couvertures old-school à base de tableaux impressionnistes et autres portraits de demoiselles, mais il existe une nouvelle charte graphique proposée par 10/18 qui fait plus pep's et moderne, si c'est votre dada !
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Donc, quand vous avez épuisé Jane Austen, vers quoi vous tourner ? Par exemple vers...
Où une petite orpheline, maltraitée et meurtrie pendant son enfance et son adolescence (passées dans un pensionnat ultra-strict où la moindre once de curiosité et d'espièglerie sont punies sévèrement), se retrouve gouvernante d'une charmante fillette. Le problème vient de son protecteur, Mr Rochester, un type bourru et antipathique qui est toujours de méchante humeur, mais ça, Jane, ça la soule très vite. Faut pas déconner non, plus, c'est pas paske t'as un château que tu peux agir n'importe comment. Et pis, sous la carapace, y a peut-être un vrai être humain, qui sait ? (Par Bunny)
Et si vous aimez Jane Eyre, essayez... d'autres romans des sœurs Brontë, notamment :
Et de la même époque mais plus hexagonal, on vous conseille aussi...
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Si les sœurs Brontë ne sont pas votre tasse de të...
(Je les recommande car je vois très bien la parenté avec Jane Austen (époque, thèmes, romantisme) et de nombreux fans de cette dernière apprécient les premières. Mais moi, hmpf.)
...je vous inviterais bien à croquer un morceau de :
Cette situation est en partie due à l'un des boss, John Thornton ; on voudrait le détester, mais en même temps il est ultra sexy. Margaret est conflicted, comme nous, et alors que la grève gronde, elle découvre le petit côté sensible de John. Ceci dit, la mère de John est une sale ordure de chienne et ferait une affreuse belle-doche ! Que faire ?! et en plus de ça, le frère de Margaret est recherché pour mutinerie (oui, ça c'est un peu l'élément WTF de l'intrigue). Allez lis ! lis ! C'est romanesque comme tout ! (Par Clémentine Beauvais)
Et du coup là si ça vous a plu, vous avez plein d'Elizabeth Gaskell à vous mettre sous la dent, à commencer par exemple par Cranford (1851-53).
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Bon alors par contre, pour ces deux-là, alerte MÉGA PAVÉS. On est sur du 1000 pages, facile. (Mais c'est bien. C'est très très bien.) (En plus court, y a La mort d'Ivan Ilitch (1886), sinon. Pas lu, désolée.)
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Emma, elle lit plein de bouquins romantiques dramatiquement romanesques qui lui font tourner la tête. Attirée par un idéal d'amour transi, rêvant au prince charmant, elle s'ennuie terrib' avec son Charles, un médecin de campagne un peu boulet. Du coup, elle fricote à droite à gauche, à la recherche d'aventure et d'amour dignes de son âme, et ne récolte que des bourrins et du kitsch. Tout ceci est fort drôle car complètement moqueur : c'est la rencontre de l'esprit Romantique avec le dur principe de réalité. Plus on avance dans le roman, plus notre dramaqueen d'héroïne espère avec passion une expérience à la hauteur de son cœur enflammé, qui semble de moins en moins probable. On se délecte de l'humour de Flaubert et des déboires de ses personnages.
Et si vous avez aimé Madame Bovary, alors direction L'éducation sentimentale (1869).
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Ancien militaire désargenté, celui qu'on appellera Bel-Ami croise un ancien pote à lui devenu journaliste qui le prend en pitié et lui propose un emploi de catégorie C. Et voilà-t-y pas que Bel-Ami se met à draguer tout ce qui bouge, y compris la belle de son pote ! Franchement, ça se fait pas.
C'est l'ami que tu ne veux surtout pas présenter à ta chérie en soirée. C'est une histoire d'ascension sociale par la séduction. C'est le tapin chez les bourgeois. C'est Bel-Ami.
Le bonus : une bonne couche de satire sociale sur le journalisme, la politique et les milieux d'affaires, milieux intimement mêlés qui nous apparaissent comme complètement pourris et arrivistes - et ce qui est agréable, tu vois, c'est que ça a beaucoup changé.
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Honoré, épris d'un amour sans cesse renouvelé pour la belle Françoise, est un fragile tourmenté. Quand il va bien, il s'émeut d'un rien, quand il va mal, je te raconte pas l'angoisse. Le drame interne est déclenché dans son petit cœur en pétales de roses lorsqu'il apprend que sa Françoise, sa parfaite Françoise, a la réputation d'être une femme facile. Ouch ! Honoré mord brutalement le fruit amer qu'on appelle jalousie...
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Eté 1922, New York. Tous les week-end, le quartier de West Egg résonne des fêtes fastueuses données par un certain Gatsby dans son château au bord de l'hudson river. De l'autre côté de la rive, vit Daisy, mariée au riche (et crétin) Tom Buchannan. Pour faire court nous sommes en pleine telenovela version années folles : Gatsby (qui a l'agacante manie d'apeller tout le monde " vieux frére ") aime Daisy (la cousine de Nick, le narrateur de cette histoire où il ne sert pas à grand chose) ; Daisy, la seule gonzesse avec Cristina Cordula à être capable de pleurer à la vue d'une magnifaïque chemise, s'ennuie auprès de Tom qui de son côté a une aventure avec Myrtle qui est mariée avec Georges (un vulgaire garagiste, d'ailleurs le seul à avoir un vrai métier dans cette histoire...).
Bref, ajoutez à ça des fêtes sompteuses dans des villas qui ne le sont pas moins, un détour par l'hotel Plazza (garanti sans DSK), plus de luxe que dans le numéro de rentrée de Vanity Fair, deux morts (je ne vous dis pas lesquels sinon c'est pas drôle) et vous comprendrez que les scenaristes d' Amour gloire et beauté n'ont rien inventé... mais bon, tant qu'à faire, préférez l'original aux contrefaçons : éteignez la télé et lisez Gatsby, The Great Gatsby. (Par Marine Carteron)
L'illustration ci-dessus est tirée de la bande-dessinée Gatsby adaptée par Melchior-Durand et Bachelier, chez Gallimard, qui est ma foi plutôt dans le haut du panier.
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Une veuve anglaise rencontre à Monte-Carlo un jeune homme consumé par son addiction au jeu et, voulant le sauver, se donne bientôt entièrement... jusqu'à se perdre ? En l'espace de vingt-quatre heures, c'est l'histoire d'un coup de foudre auquel se mêle une étrange relation maternelle, où l'addiction incontrôlable vous ferait tout sacrifier - y compris votre confortable vie dans la bonne société - pour fuir avec votre délicieux poison.
Zweig est le champion des nouvelles psychologiques, qui nouent avec délicatesse les éléments des conflits intérieurs qui traversent (et parfois bouleversent) nos existences. C'est à la fois tout plein de jolies choses et... sombre. (Parce que les choix dans la vie d'une femme à l'époque ne se prennent pas à la légère.)
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Il ne vous aura pas échappé que nous nous rapprochons de plus en plus de l'époque contemporaine, de recommandation en recommandation. Avant de passer la frontière de la deuxième moitié du XXe, je vous propose un intermède.
Fin de l'intermède.
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Nous entamons la deuxième moitié du XXe et avec, nous allons enfin pouvoir vous proposer... de la jeunesse ! Mais si !
Années 30 . La famille Mortmain vit sans le sous dans un vieux château d'Angleterre. Cassandra et sa sœur Rose partagent la même chambre et leurs secrets, à l'image des héroïnes de Jane Austen ou Charlotte Brönte, qu'elles admirent profondément. Rêvant de richesses qui leur permettraient de sortir de leurs misère, leur quotidien est soudain bouleversé par la famille héritière américaine du manoir voisin... et accessoirement leurs nouveaux fortunés propriétaires. Simon Cotton, l'aîné des deux frères, fait particulièrement forte impression à Rose...
Cassandra, la narratrice (drôle, moderne, intelligente) n'épargne personne : son père écrivain en panne (" Mortmain, " main morte ") aux réactions ridicules ; sa belle-mère Topaz, fière et digne qui ne se laisse pas marcher sur les pieds et fait bien tout ce qu'elle veut en se moquant du regard des autres ; Mrs Fox-Cotton, riche et hautaine photographe en mal de jeunesse...
Introspection, description honnête de son entourage, tout y est ! Sensible et empathique, son récit est ponctué de remarques parfois ironiques sur la situation. Un grand classique de la littérature jeunesse en GB, ce texte est un plaisir à découvrir encore aujourd'hui.
(Extraits de la chronique de Bloup du Château de Cassandra, parue il y a quelques jours.)
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Dans ce livre terriblement réconfortant, le quotidien de ces cinq sœurs, bousculé par le burlesque de leurs aventures anodines, emporte, réjouit, donne le sourire et met un petit point au cœur. Votre nouveau livre doudou, comme votre " plus-gros-plus-vieux-pull ", c'est lui. (Par Nathan)
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La magie anglaise est en train de mourir de sa belle mort quand s'ouvre ce roman titanesque. On en garde le souvenir vague de ces choses en passe de devenir légende. Jusqu'au jour où Mr Norrell, une sorte de notaire compassé anti-sexy au possible, la ressuscite et devient une super-star dans le royaume. Tout va pour le mieux dans le roman le plus documenté du monde - qui nous offre tant de notes de bas de page que, par moment, on se demande si, euh, en fait, ben, ce serait pas un livre d'Histoire... comment ça il n'y a pas eu de navires de pluie ni de zombies dans les guerres napoléoniennes ? - quand Mr Norrell voit apparaître un concurrent : le jeune, beau et fringant Jonathan Strange. #troBG
Jonathan Strange & Mr Norrell est une fresque historico-romantico-politico-magique tout à fait unique, qui rien que d'y penser refait palpiter le ventricule gauche de mon petit cœur rêveur - celui où s'est coincé le doigt ensorcelé de Lady Pole, découpé par un homme fée. Oui, vous avez bien lu, c'est étrange et légèrement inquiétant. La raison et la folie s'y côtoient constamment, les légendes prennent vie dans les prés, et tout le monde reste, pendant ce temps là, très, très anglais. On s'y courtise, on s'y manipule, c'est fantastique. Allez-y.
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(VF à paraître à la rentrée 2016 chez Gallimard Jeunesse)
Lady Helen, jeune femme couvée, fait son entrée dans le monde précieux de la Régence Britannique, en essayant de faire oublier le trouble héritage de sa mère (mystère...) pour décrocher un beau mariage. Tout va pour le mieux dans le Londres de 1912 quand la belle horlogerie de la vie d'Helen se détraque. Son cortège de bals est alors augmenté d'une donnée significative : des démons au mode opératoire vampirique tout à fait étrange et parfaitement répugnant, rôdent dans la ville. Un certain Lord Carlston (un noble de très mauvaise réputation) lui apprend que le Club des mauvais jours, dont il est un membre éminent, est chargé d'en faire la chasse. Et voilà notre chère Helen recrutée (un peu de force) par ce club très étrange.
Saura-t-elle changer de mode de vie... et s'approprier ses nouveaux pouvoirs ?
Lady Helen est un ovni. J'ai quelques reproches à lui faire du point de vue de la narration, mais plusieurs chapeaux à lui tirer côté univers, aussi, peut-être reviendrai-je vous en parler dans une chronique.
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Il ne vous aura pas échappé, cette fois que nous avons atteint des livres pas encore sortis en 2016 et que cette liste touche donc à sa fin.
Avant de vous quitter, je vous propose une nouvelle sélection. Ce coup-ci, les livres ont été lus (entièrement ou partiellement) et... , bon, voilà, ils ont été lus. Je ne les vous recommande pas forcément en tant qu'œuvre littéraire, cependant, si vous êtes fans d' Orgueil et Préjugés, vous pouvez difficilement passer à côté d'un plaisir aussi simple et honnête :
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Sur ce, c'est l'heure de nous quitter. J'espère que vous aurez apprécié la diversité des plumes ayant œuvré à cet article et le sérieux exemplaire avec lequel nous vous avons fait (re)découvrir ce panel romantique. Le sérieux, c'est quelque chose de très important pour moi. C'est un peu ce qui cristallise ma relation à la littérature, ok.