Profession libraire

Profession libraireJ'ai rencontré Paméla à la librairie Pantoute de la rue St-Jean. Une jeune librairie allumée comme je les aime! Sa curiosité et son regard pétillant m'ont donné envie de la bombarder de questions, tant sur la libraire que sur la lectrice, avec quelques suggestions de lecture en prime. LA LIBRAIRE
Comment es-tu devenue libraire?Je crois que je suis devenue libraire par nécessité. Je me souviens encore des yeux ronds de ma mère quand je lui ai annoncé que c'était fini, que plus jamais je ne travaillerai dans un magasin à grande surface ou dans la restauration rapide: je serai sans emploi tant et autant que je ne trouverai pas de travail dans mon domaine. Heureusement pour moi, je n'ai pas attendu longtemps. Je pense quand même qu'on devient libraire par passion, que ça vient des trippes.

Comment qualifierais-tu la clientèle de la librairie Pantoute?Allumée. Curieuse. Vivifiante. Je crois sincèrement que les gens savent où ils sont, quand ils entrent chez nous: soit une librairie indépendante tenant un fond littéraire incroyable, et que c'est d'autant plus motivant pour eux de venir nous voir nousQu'est-ce qui te plaît le plus dans le métier de libraire?Petite tranche de vie pour illustrer comme ce métier est incroyable et rempli de surprises: après une longue journée, un client vient me voir pour me demander conseil en poésie québécoise. Déjà, le sourire me revient: la poésie, quel univers fantastique. En se dirigeant vers la section, il me parle de haïkus. Je sautille presque, c'est tellement rare que les gens demandent ce genre de conseil! En fouillant un peu, je remarque, déçue, que ce que je voulais lui proposer n'est plus distribué. Je lui parle quand même de Carol Lebel, de sa poésie, de son sens du haïku. Carol Lebel, qu'il me dit? J'ai lu une anthologie de haïkus écrit par plein d'écrivains, et les siens étaient mes préférés. Wow. Il est parti avec un recueil de Carol Lebel dans lequel il n'y avait pas de haïkus et moi, deux jours plus tard, je suis passée à son travail pour lui passer les trois recueils de haïkus que j'avais de Lebel. Il était heureux. J'étais heureuse. C'est ça, qui me plait le plus, dans mon métier.Quelles sont les ingratitudes de ton métier?Hmmm… Je crois que le point le plus faible est le salaire. Malheureusement, vendre des livres, ça ne paie pas tellement. Étrangement les gens pensent souvent le contraire. De toute façon, je suis presque certaine que même sans la carotte au bout de la semaine, beaucoup de mes collègues ne voudraient pas quitter leur travail: c'est ça, la passion.Profession libraireDe quoi est le plus friand le lecteur que tu conseilles?Quand un client me demande conseil, c'est souvent pour du québécois. C'est-à dire qu'à la librairie, tout le monde a son domaine d'expertise. Marco, c'est la bande dessinée. Vicky, c'est la littérature jeunesse. Émilie trippe science-fiction. Christian est un as en histoire. Moi, ce que j'aime le plus, c'est la littérature québécoise. Poésie et roman confondus. Inévitablement, donc, quand un client veut se faire conseiller du québécois, c'est moi qui s'en occupe!Te demande-t-on plus souvent un livre précis ou une suggestion?C'est difficile de trancher: je dirais que généralement les gens savent ce qu'ils veulent. Ou croient le savoir. Et c'est là que ça devient un défi d'être libraire: trouver le livre bleu dont on a parlé à Radio Canada à l'hiver 2015.La question la plus étrange que l'on t'ait posée?Si on vendait des cache-pots pour bébé. Encore aujourd'hui, je ne suis pas certaine de comprendre de quoi il s'agit, et surtout je me questionne encore sur les raisons qui ont poussé ce client à croire qu'une librairie serait le genre d'endroit où il fallait chercher ça.Un livre que tu aurais envie de conseiller à tous les lecteurs?Chaque automne j'ai envie de mourir, par Véronique Côté et Steve Gagnon. Je ne me lasse pas de le lire encore et encore: c'est un livre d'une douceur et d'une poésie fabuleuses.


DES CONSEILS…

Un livre décoiffant?Les choses de l'amour a marde et Lastcall les murènes, tous deux de Maude Veilleux. Ça ouvre les bobos. Avec pas de plasteur.Un livre au style exceptionnel?Toute la poésie de Jacques Brault.Un livre terrifiant?Terrifiant parce qu'incroyablement touchant et tranchant: Testament de Vicky Gendreau. La première fois où je l'ai lu, je l'ai trouvé bon. La deuxième fois, j'ai pleuré. On aurait dit que je venais de réaliser toute la teneur de ce simple livre.Un livre pour se coucher moins niaiseux?L'insoutenable légèreté de l'être. Pour l'Histoire. La philosophie. Parce qu'il apporte avec simplicité la complexité des choses. Cher Kundera.Un livre qui fait du bien?Je vais tellement me répéter, mais je vais dire Chaque automne j'ai envie de mourir.

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LA LECTRICE
Combien d’heures lis-tu par semaine?Pas assez. Je dirais une dizaine d'heures par semaine.

Combien de livres lis-tu par mois?Ça dépend de tellement de choses! Mais j'essaie de lire un livre par semaine. Donc 4 ou 5 par mois, dépendant de la grosseur, du temps, etc.Où lis-tu le plus souvent?Chez moi. Dans ma cour arrière, sur ma petite table. Avec thé et chats. Je peux rester là des heures sans me rendre compte de rien.Quel livre t'a donné la piqure de la lecture?La série de Peggy Sue, quand j'étais adolescente. J'essaie actuellement de les retrouver en usagés parce qu'ils ne se distribuent plus. Serge Brussolo, un jour je vais te dire merci en personne!

Trois de tes auteurs fétiches?François Racine, ses romans Truculence et Tabagie, je les ai tellement conseillés que j'en ai perdu le compte! ♦ Patrice Desbiens et sa poésie du quotidien. ♦ Romain Gary, parce que c'est Romain Gary.

Ton plus récent coup de cœur?Les choses de l'amour a marde de Maude Veilleux. Ça fait mal là où il faut.Termines-tu un livre qui t'ennuie?Par orgueil, et pour pouvoir mieux chialer après, oui.Un livre que tu pensais donc aimer, mais qui t'as profondément déçue?Je sens que je vais faire un sacrilège en disant Maria Chapdelaine de Louis Hémon…La rentrée littéraire arrive. Quels sont les cinq livres que tu veux absolument lire?♦ Pas de deux de Anne Guilbault (XYZ). Tous ses romans sont d'une douceur incroyable. ♦ Prague de Maude Veilleux (Septentrion). J'ai adoré sa poésie décapante et j'ai hâte de me lancer dans ce roman! ♦ L'impureté de Larry Tremblay (Alto), parce que les livres des éditions Alto sont une valeur sûre. ♦ Police Lunaire par Tom Gauld (La Pastèque). Sa dernière bande dessinée, Vous êtes tous jaloux de mon jetpack était fabuleuse!

♦ À l'abri des hommes et des choses par Stéphanie Boulay.
Profession libraireJe vous le disais, elle est allumée, la fille. Sa passion est contagieuse. Et des réponses de même, ça me donne envie de filer à la librairie!
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