Alters #1

Par Noisybear @TheMightyBlogFR

Paul Jenkins a décidé de profiter de la liberté de ton du jeune éditeur AfterShock Comics afin de créer Alters dont le personnage principal est transgenre en pleine transition et qui devient une super-héroïne du nom de Chalice.

La transition est quelque chose que la plupart d'entre nous ne saisirons jamais parce qu'elle s'avère marginale et, surtout, il faudrait la vivre pour mieux la comprendre. Nous devons en revanche comprendre son utilité et le besoin qu'éprouvent des hommes et des femmes à subir cette phase compliquée. Après lecture de ce premier épisode, il me semble évident que Paul Jenkins n'essaye pas de partager l'expérience de Charlie, au début de sa transition, mais de nous montrer un personnage différent qui n'a qu'un seul besoin, avoir le corps qui lui correspond.

Comme souvent un vent de critiques vient à critiquer le fait que Jenkins, cisgenre, écrive l'histoire d'un transgenre parce qu'il n'a pa vécu la transition, c'est un peu remettre en question le métier de scénariste. Il me semble que jamais Stan Lee et Jack Kirby n'ont voyagé dans l'espace et cela ne les a pas empêchés d'écrire Fantastic Four. Je fais de la démonstration par l'absurde afin d'expliquer qu'un bon scénariste - et Jenkins en est un très bon - est capable de tout écrire, sur n'importe quel sujet et avec n'importe quel personnage.

À l'instar du débat sur Strange Fruit - qui était bien plus de mauvaise foi, celui-ci pointe le fait que malgré le nombre d'auteurs transgenres actifs dans l'industrie des comics aucun d'entre eux n'est invité par les grands éditeurs à écrire. Par contre, dire que l'histoire d'un transgenre ne doit être raconté que par un autre, ce n'est pas vrai. Ce n'est pas les leçons à tirer de la diversité. Ça reviendrait à dire qu'un auteur transsexuel ne peut pas écrire une histoire avec des personnages cisgenres alors que c'est faux !

Et, à la lecture d' Alters, Paul Jenkins montre que son intention n'est pas de nous écrire une biographie mais nous montrer une fiction dans laquelle un personnage va changer de corps. Et, de manière claire, il veut utiliser ce contexte pour raconter une bonne histoire de super-héros.

Dans le monde d' Alters, des personnes ont développé des pouvoirs comme les Inhumains de chez Marvel. Le problème est devenu planétaire surtout que certains d'entre eux sèment un vent de panique. Un groupe de scientifiques essaie de recruter les nouveaux Alters afin de combattre ceux qui ont mal tourné. Chalice est ainsi repérée par le groupe.

Sauf que Chalice est en fait l'alter-ego de Charlie, transgenre en transition, qui est un simple garçon dans une famille d'Américains moyens. L'épisode se concentre essentiellement sur ce contexte familial avec, notamment, l'un des jeunes frères de Charlie handicapé.

Nous découvrons ainsi que Charlie est bien seul pour vivre son début de transition. Ses parents ne sont pas au courant et puis, il y a l'assistance de son entourage pour qu'il trouve une fille. Et, le seul moyen que Charlie a trouvé d'être ce qu'il est vraiment est Chalice.

L'épisode est larmoyant au possible tellement la situation est proche de ce que nous pouvons vivre tous les jours, je veux dire sans parler du problème de transidentité de Charlie. Mais, là, encore je trouve ça réussit lorsque Charlie met sa perruque et explique qu'il ne peut être lui-même que lorsqu'il est travesti fait couler les larmes.

À côté de ça, j'aime beaucoup l'insistance de l'entourage de Charlie autour du fait qu'il "doive" chasser de la fille. Que ça soit le petit frère - pas celui handicapé l'autre - ou le meilleur ami de Charlie, ils essaient toujours de le caser avec une insistante lourde mais montrée comme une mauvaise habitude à laquelle Charlie s'est finalement fait.

J'espère néanmoins que le prochain épisode sera moins mélancolique et que Chalice nous montrera qu'elle est une super-héroïne intéressante. Le contexte est intéressant et mérite d'être développé mais Jenkins promet aussi une histoire de super-héroïne.

Les dessins de Leila Leiz ne sont pas désagréables même si ce n'est pas très joli. D'un côté, la dessinatrice nous offre une narration exemplaire mais les visages manquent cruellement de personnalité. C'est assez dommage.

Alters #1

AfterShock Comics * Par Paul Jenkins & Leila Leiz * $3.99
Ce premier épisode d' Alters est en soit très bien mais un peu trop larmoyant pour dire que c'est génial. Faut dire que Jenkins aborde de nombreux thèmes et à en former un tout avec intelligence. Il ne manque que la partie super-héroïne à être développée d'avantage.