1938. Pereira est journaliste culturel dans un quotidien
conservateur à la botte du dictateur Salazar. Il vit à Lisbonne et passe ses
journées seul, avec pour passions sa femme décédée, à qui il parle
quotidiennement, et la traduction des grands auteurs français. Bedonnant,
flegmatique, sans véritable conviction politique, Pereira se contente de sa
petite vie bien rangée jusqu’au jour où il rencontre un étudiant et sa compagne
proches des milieux révolutionnaires antifascistes. Un couple pour lequel il va
se prendre d’affection et qui va peu à peu faire évoluer sa perception des
choses et de la vie en général.
Adapté d’un roman d’Antonio Tabucchi, cet album déroule le cheminement personnel et la métamorphose intime d’un apathique un peu falot. Pierre-Henry Gomont a eu l’intelligence de se libérer du texte original tout en en respectant l’esprit. Avec son trait nerveux, ses couleurs écrasées par la chaleur lisboète, sa lumière parfois glaciale, il restitue un Portugal où le temps semble être suspendu. L’ensemble est fluide, croqué sur le vif à la manière d’un carnet de voyage avec des trouvailles graphiques aussi audacieuses que réussies, notamment l’incarnation des doutes et des hésitations du héros par des ombres rouges symbolisant la dualité de ses sentiments entre bonne et mauvaise conscience.
Pereira, fermant d’abord les yeux sur les exactions d’un régime totalitaire qui l’indiffère, va entrer, à sa manière, en résistance. L’obèse cardiaque à l’apparente mollesse s’engageant presque malgré lui sur la voie de la subversion pour combattre le totalitarisme et la censure est un personnage attachant et impossible à juger. Est-il lâche ou courageux ? Cherche-t-il à fuir une dictature ou refuse-t-il de voir la vérité en face ? Il nous pousse en tout cas à nous demander ce que nous aurions fait à sa place. Et franchement, bien malin celui qui peut répondre à cette question avec une absolue certitude.
Après Rouge Karma et Les nuits de Saturne, Pierre-Henry Gomont m’enchante à nouveau, avec un album totalement différent de ses deux illustres prédécesseurs, tant au niveau du contenu que de l’ambiance. Il confirme ici son immense talent et se classe parmi les talents incontournables de la BD actuelle.
Pereira Prétend de Pierre-Henry Gomont (d’après le roman d’Antonio Tabucchi). Sarbacane, 2016. 160 pages. 24,00 euros.
L’avis de Moka
Adapté d’un roman d’Antonio Tabucchi, cet album déroule le cheminement personnel et la métamorphose intime d’un apathique un peu falot. Pierre-Henry Gomont a eu l’intelligence de se libérer du texte original tout en en respectant l’esprit. Avec son trait nerveux, ses couleurs écrasées par la chaleur lisboète, sa lumière parfois glaciale, il restitue un Portugal où le temps semble être suspendu. L’ensemble est fluide, croqué sur le vif à la manière d’un carnet de voyage avec des trouvailles graphiques aussi audacieuses que réussies, notamment l’incarnation des doutes et des hésitations du héros par des ombres rouges symbolisant la dualité de ses sentiments entre bonne et mauvaise conscience.
Pereira, fermant d’abord les yeux sur les exactions d’un régime totalitaire qui l’indiffère, va entrer, à sa manière, en résistance. L’obèse cardiaque à l’apparente mollesse s’engageant presque malgré lui sur la voie de la subversion pour combattre le totalitarisme et la censure est un personnage attachant et impossible à juger. Est-il lâche ou courageux ? Cherche-t-il à fuir une dictature ou refuse-t-il de voir la vérité en face ? Il nous pousse en tout cas à nous demander ce que nous aurions fait à sa place. Et franchement, bien malin celui qui peut répondre à cette question avec une absolue certitude.
Après Rouge Karma et Les nuits de Saturne, Pierre-Henry Gomont m’enchante à nouveau, avec un album totalement différent de ses deux illustres prédécesseurs, tant au niveau du contenu que de l’ambiance. Il confirme ici son immense talent et se classe parmi les talents incontournables de la BD actuelle.
Pereira Prétend de Pierre-Henry Gomont (d’après le roman d’Antonio Tabucchi). Sarbacane, 2016. 160 pages. 24,00 euros.
L’avis de Moka