— Eaux turbides. Les grandes religions sont des torrents que brouillent les matières en suspension. Le promeneur veut-il y boire ? Il puise à l’aide d’un seau, puis laisse reposer le liquide, jusqu’à ce que toutes les scories amoncelées de l’histoire – préjugés, coutumes, superstitions, traits culturels tribaux… – reposent au fond. Alors, il pourra boire à l’essentiel, étancher sa soif.
« Laisse l’eau décanter », disait mon grand-père.
Souvenir d’enfance. — Un extrait de l’ouvrage d’Alain Gaudey, 1001 petites choses que vous ignoriez sur la sexualité, me ramène en mémoire un souvenir significatif et cocasse : « La pudibonderie, qui sévissait dans les écoles de la République française, touchait l’absurde. Jusqu’en 1924, lorsque les jeunes filles apprenaient l’alphabet, elles ne devaient pas prononcer la lettre Q jugée obscène. »
J’ai connu ce régime pudibond au Québec. Encore aujourd’hui, je me surprends à dire « que » au lieu de « qu ».
Franz Liszt, propos sur l’art et le divin —
« La vie terrestre n’est qu’une maladie de l’âme, une excitation que les passions entretiennent. L’état naturel de l’âme, c’est la quiétude. »
[À rapprocher de cet extrait sur l’âme de la Bhâgavata Gîta : « 25. Invisible, ineffable, immuable, voilà ses attributs ; puisque tu la sais telle, ne la pleure donc pas. 26. Quand tu la croirais éternellement soumise à la naissance et à la mort, tu ne devrais pas même alors pleurer sur elle. »]
« L’art pour l’art est une absurdité. Le perfectionnement de l’être dont il manifeste le progrès en est le but. »
« Le plus haut devoir de l’artiste est de fournir au divin des modes d’expression perpétuellement nouveaux. »
« S’il était constaté que toutes les preuves métaphysiques à l’appui de l’existence de Dieu sont réduites à néant par les arguments de la philosophie, il en resterait toujours une, absolument invincible : l’affirmation de Dieu par nos gémissements, le besoin que nous avons de Lui, l’aspiration de nos âmes vers son amour. Cela me suffit et je n’en demande pas plus long pour rester croyant jusqu’au dernier souffle de ma vie. »
(Tirés de La vie de Franz Liszt, par Guy de Pourtalès.)
L’auteur…
Auteur prolifique, Alain Gagnon a remporté à deux reprises le Prix fiction roman du Salon du Livre du Saguenay–Lac-Saint-Jean pour Sud (Pleine Lune, 1996) et Thomas K (Pleine Lune, 1998). Quatre de ses ouvrages en prose sont ensuite parus chez Triptyque : Lélie ou la vie horizontale (2003), Jakob, fils de Jakob (2004),Le truc de l’oncle Henry (2006) et Les Dames de l’Estuaire (2013). Il a reçu à quatre reprises le Prix poésie du même salon pour Ces oiseaux de mémoire (Le Loup de Gouttière, 2003), L’espace de la musique (Triptyque, 2005), Les versets du pluriel (Triptyque, 2008) et Chants d’août (Triptyque, 2011). En octobre 2011, on lui décernera le Prix littéraire Intérêt général pour son essai, Propos pour Jacob (La Grenouille Bleue, 2010). Il a aussi publié quelques ouvrages du genre fantastique, dont Kassauan, Chronique d’Euxémie et Cornes (Éd. du CRAM), et Le bal des dieux (MBNE) ; récemment il publiait un essai, Fantômes d’étoiles, chez ce même éditeur . On compte également plusieurs parutions chez Lanctôt Éditeur (Michel Brûlé), Pierre Tisseyre et JCL. De novembre 2008 à décembre 2009, il a joué le rôle d’éditeur associé à la Grenouille bleue. Il gère aujourd’hui un blogue qui est devenu un véritable magazine littéraire : Le Chat Qui Louche 1 et 2 (https://maykan.wordpress.com/).