Chronique « Les voyages d’Ulysse »
Scénario de Sophie Michel, dessin de Emmanuel Lepage,
Public conseillé : Adultes et adolescents,
Style : Aventure romanesque,
Paru aux éditions Daniel Maghen, le 29 septembre 2016, 272 pages couleurs, 29 euros,
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L’Histoire
Istambul, fin du fin du XIXeme siècle. Jules Toulet, peintre obscur, a perdu le goût de peindre. Après avoir embrassé une jeune femme, il lui dit adieu. Il doit partir, reprendre la mer à la recherche de sa muse, Anna…
Après quelques errances, il tombe sur la mystérieuse Salomé, capitaine de l’Odysseus. Cette femme, aussi belle qu’accomplie, passionnée de peinture, est à la recherche d’un peintre nommé Ammon…
Le marché est vite conclu. Jules, qui a des informations sur ce peintre, l’aide à le retrouver. Il embarque sur l’Odysseus s’il se remet au dessin pour les beaux yeux de Salomé.
Un auteur à part
Emmanuel Lepage est pour moi un auteur essentiel. Après la série Nevé (scénario de Dieter), il a trouvé son style graphique à lui, bien reconnaissable. Couleurs directes à l’aquarelle, personnages fragiles et attachants, histoires humaines, La terre sans mal (avec Anne Sibran) et Muchacho en solo en sont des exemples grandioses.
Et puis, est venu le temps des essais, des recherches. Avec Un Printemps à Tchernobyl, Voyage aux îles de la désolation et La lune est blanche, il invente une nouvelle forme de documentaire-fiction beau et profondément humain. Avec ses paysages maritimes et ses croquis des hommes et femmes rencontrés, il nous plonge dans une vérité réinventée. Avec Les voyages d’Ulysse, Emmanuel Lepage se détache de ce style documentaire et revient à la fiction.
Ce que j’en pense
Bon, c’est vrai, j’ai plongé dans cette lecture avec un a-priori positif et gourmand. Amoureux du dessin d’Emmanuel (encore plus quand il s’agit de paysages maritimes), amateur de récits classiques, je ne pouvais qu’aimer cette fiction biographique autour du personnage antique de Salomé !
Pour le scénario, Emmanuel s’est associé avec Sophie Michel, une bretonne, professeur de collège, qui avait déjà collaboré avec lui sur « Oh, les filles », édité chez Futuriopolis.
A travers ce portrait de femme inspiré des récits d’Homère, les deux auteurs racontent dans un beau duo, leurs amours. L’amour du dessin, de la peinture que Salomé recherche éperdument, l’amour de la mer, du voyage, du lointain toujours plus beau… Sans oublier l’amour des hommes et des femmes que le destin nous fait croiser.
Que des thèmes particulièrement forts et évocateurs que les deux auteurs abordent avec une connivence impressionnante.
Très référencé de récits antiques, Sophie adopte un style courant dans ses dialogues et très littéraire dans les récitatifs et voix-off. Des passages de textes antiques sont savamment insérés au milieu des planches. Vous n’êtes pas obligé de les lire, mais ça serait dommage de s’en priver.
Le dessin d’Emmanuel est toujours aussi spectaculaire. Dans un style graphique qui rappelle beaucoup ses derniers albums parus chez Futuropolis, il m’a ravi par ses paysages maritimes, ses personnages tout en douceur, en fragilité et bien sur pas ses couleurs rayonnantes.
Il nous offre des planches de paysages lointains, d’hommes et de femmes beaux/belles, touchants, sensible. Tout en émotions, l’ambiance de Les Voyages d’Ulysse m’a emporté au long court, dans un voyage introspectif et lointain…
Deux dessinateurs pour le prix d’un ?
Tiens, encore une particularité à cet album ! Les peintures du peintre recherché (Ammon) sont réalisées par René Follet. D’une force visuelle impressionnante, ces planches sont d’une expressivité folle et contrastent avec la douceur des aquarelles d’Emmanuel.