Qui dit Netflix dit aussi grande attention à l'image, à la photographie. Là encore le travail accompli mérite d'être loué, avec une prédominance de tons sépias et de lumières tamisées, qui ajoutent un coté rétro à un quartier, un tissu urbain, qui n'est pas sans évoquer d'autres séries qui ont fait l'histoire, comme The Wire par exemple. Par contre, le spectateur distrait qui commence à regarder le premier épisode à minuit, sans être un fan intrinsèque de Luke Cage, risque fort d'être pris par un coup de sommeil à l'improviste. Le rythme est assez lent, avec un héros taciturne, et une première heure et demie qui place ses pions sur la table sans se presser, et sans accélérations notables. Par la suite, quand ça commence à castagner, on note malheureusement que les plans rapprochés, les chorégraphies de la violence, sont clairement moins crédibles ici que dans Daredevil, où elles sont d'une qualité exceptionnelle. Ici Cage arrache des portières de voiture et fonce dans le tas, distribue des taquets à tout le monde, mais on n'a pas droit à de moments mémorables, de street fighting au dernier sang, à rester en haleine. C'est du basique, avec en plus un protagoniste qui triche, car invulnérable. Du coup pour le détruire, mieux vaut s'en prendre à sa réputation, ses affects, tenter de le miner, de l'ostraciser, et c'est ce coté qui est le plus intéressant, ceci alors que Cage lui même tente de faire tomber Cottonmouth en contournant le problème, et en le neutralisant en amont. Cotés influences assumées, nous avons déjà parlé du hip hop et de la musique urbaine (forcément, avec notamment des titres d'épisodes empruntés à Gang Starr) mais soulignons en outre les clins d'oeil au travail d'Ennio Morricone (l'invention du western hip hop?) qui scandent certains des moments forts de cette série. Ce que nous avons moins apprécié, ce sont les trouvailles toujours plus discutables, comme les balles pour stopper Luke (banal subterfuge) ou la montée en puissance du choc entre Cage et Diamondback, qui n'a pas le sel et la force narrative d'un face à face entre Murdock et Wilson Fisk. On prend plaisir celà dit à retrouver des visages connus (Claire Dawson, notre infirmière de choc) ou à apprendre à connaître de nouveaux personnages de l'univers Marvel (Misty Knight) mais on sent aussi que réaliser une série de treize épisodes sur un personnage n'ayant jamais obtenu un véritable titre moderne à son nom, et se contentant de jouer les seconds rôles chez les Avengers (il devient intéressant, la plupart du temps, quand c'est son interaction avec Jessica Jones, et leur bébé, qui est placée en avant) n'est pas une mince affaire. Trop enfermés dans la volonté de suivre fidélement les codes attendus pour ce genre de produit (dès le générique qui est par trop évident, là où les autres séries Netlix ont eu une audace et un soin extrêmes) et pénalisés par l'impossibilité de mettre en scène des événements trop spectaculaires ou novateurs, Cheo Hodari Coker et sa bande ont accouché d'un produit qui mérite le détour, justifie son statut de nouveau chaînon menant à la création des Defenders, mais échoue à la comparaison avec les premières séries Netflix. Certes, si vous regardez Arrow juste après, vous comprendrez qu'à coté, Luke Cage est en course pour un Ours de Berlin.
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