Jean-Bernard Pouy, né en 1946 à Paris, est écrivain de roman noir et directeur de collections littéraires. Il est notamment le créateur du personnage du Poulpe, aux éditions Baleine dont il est un des fondateurs. Il participe aussi à l'émission Des Papous dans la tête sur France Culture. Son premier roman est paru en 1983, Le Cinéma de papa en 1989.
Bertrand, le narrateur, vit au Brésil depuis deux ans quand il apprend le décès de sa mère, assassinée par un rôdeur. De retour en France, cette mort brutale ajoutée à celle du père – noyé il y a très longtemps sans que le corps n’ait jamais été retrouvé – va l’inciter à vouloir en savoir plus. Une curiosité légitime mais non sans risques qui va le mettre sur la piste d’obscurs collectionneurs de très vieux films comme l’était son père, prêts à tout – donc au pire – pour satisfaire leurs désirs.
Ce bouquin, c’est son titre qui m’a poussé à le lire et cette première phrase qui claque, « Ma mère est morte et la langouste est excellente. », outre le fait non négligeable que son auteur en soit Jean-Bernard Pouy. Un titre bien naze et ringard comme les affectionne la Série Noire, donc génial car il dit bien ce qu’il veut dire, tant du sujet que de son traitement. Je ne vais pas m’étendre sur l’intrigue qui tourne autour d’un film très mystérieux, « De vieux militants staliniens recherchent ce film… », « Il y avait une séquence sur Trotsky, tournée à Barbizon en juillet 34, où mon père avait été invité… »
Rien ne nous rajeunit dans ce polar – encore que justement ce soit l’inverse pour moi ! -, ni le cœur du sujet, ni le présent du texte et je m’en suis délecté. Ici on peut lire des phrases qu’on n’écrit plus de nos jours (« Un feulement derrière la porte. Le cri de la pantoufle. ») à moins que l’on ne tombe sur des objets qui n’ont carrément plus cours (« Trouver un Minitel. »). Amateurs de modernité passez votre chemin, fanatiques de technologie et d’action allez voir ailleurs. Ceux qui feront ce voyage, à travers nos provinces françaises, le feront en compagnie de Robert Musil, Albert Camus, Robert Louis Stevenson ou Daniel Biga (qui m’était complètement inconnu jusqu’à ce jour), la culture sait se nicher partout.
J’admets que ce polar n’est pas un chef-d’œuvre (c’est quoi cette scène incongrue, à la fin, entre Bertrand et sa sœur ?) mais c’est un bon petit roman (Gniark ! Gniark ! Gniark !), de ceux qui nous donnent des bonheurs de lecture simples, pour ainsi dire basiques. Une littérature qui porte en elle les traces d’un ancien monde, pas si lointain mais certainement complètement exotique pour un jeune lecteur.