Ma vie de pingouin, Katarina Mazetti

Ma vie de pingouin, Katarina Mazetti


Il y a déjà un bon nombre d'année, j'avais été charmée par le ton léger et le sujet dont nous parlait Katarine Mazetti dans Le mec de la tombe d'à côté.

Dans Ma vie de pingouin, on change de cadre, et c'est heureux (on ne va quand même pas passer sa vie à relire sempiternellement les mêmes histoires...Ah, on m'indique que c'est pourtant ce que font les lecteurs de Musso... Bon et bien relisez, mes amis...), et j'ai immédiatement retrouvé le regard décalé et humoristique porté par l'auteur sur ses personnages, en connivence avec le lecteur.

Néanmoins, et c'est sans doute ce qui a le plus affecté ma lecture, les personnages se révèlent rapidement posséder des traits exacerbés qui les rendent tristement peu crédibles. Ainsi le personnage de Linda, cette vieille bique aigrie qui semble totalement dénuée d'humanité puisque qu'elle n'inspire pas la moindre sympathie, ainsi le personnage de sa soeur, irrémédiablement soumise à sa bonne volonté, ainsi Brittmari, la dévergondée de service, et même les protagonistes, Wilma et Tomas, campent des postures faciles et, à ce titre, agaçantes.
Imaginez-vous que le pauvre Tomas passe sa vie à se plaindre. Bon, pas forcément pour rien non plus, Madame s'est barrée avec les gosses, mais on comprend bientôt qu'il était imbuvable. Wilma, quant à elle, et comme tout bon caractère féminin, se doit d'incarner la joie de vivre débordante, l'attitude positive qui, bien évidemment, va donc se briser comme une vague contre le rocher Tomas (désolée, les comparaisons sont à la hauteur de l'intrigue).
A tout cela s'ajoutent de petits mystères cousus de fil blanc (mais que cherche bien à faire Tomas dans cette expédition?), du pathos légèrement dégoulinant (Wilma est en réalité un personnage profond, sa bonhomie cache sa détresse), et trop, beaucoup trop de pingouins dont on se cale sévère.

Alors, attention, tout n'est pas à jeter. Il y a des passages intéressants sur toutes sortes de sujets, et certains personnages secondaires, bien que très linéaires, sont relativement amusants, sans parler d'Alba, qui apporte beaucoup, notamment grâce à sa tendance à comparer les humains à des animaux (saine occupation, que je vous recommande à tous).

Malheureusement, cela ne suffit pas à faire du roman autre chose qu'un exemple de feel-good litterature, qui remplit dignement les objectifs assignés, sans pour autant aller au-delà.
Parfait pour un dimanche pluvieux, sans autre prétention.


"Voir les humains comme des animaux est un passe-temps agréable et instructif, ça nous rend tous un peu plus stupides, mais aussi plus émouvants."

"Et soudain, j'ai aperçu mon premier pingouin! Il a envoyé valser toutes mes idées reçues. Parce qu'il ne se dandinait pas tout mignon vêtu d'un frac, il était couché dans un trou et me dévisageait d'un air furieux."

"Les marins anglais pensaient que les albatros étaient les âmes des marins noyés, et ils avaient probablement raison. Je les sens parfois fourmiller en moi, toutes ces vies, leurs histoires et leurs pensées."

"_Le sarcasme est la forme le plus vulgaire du trait d'esprit, ai-je murmuré." (Je n'ai qu'une chose à dire. Ceci est tout à fait faux.)

"Je suppose que toi, tu grignotais du Proust et du Kafka, mas les mères au foyer n'ont pas franchement le temps de lire les œuvres complètes de Proust, si tu vois ce que je veux dire!" (...)

"Les geignards et les pleurnicheurs, je sais les remettre à leur place, alors que les déprimés... J'ai souvent l'impression d'avoir pour vocation de les gaver de joie de vivre.
[...] Les gens malheureux adoptent souvent la mauvaise habitude d'exiger de la compassion, ils voient cela comme un droit, si toutefois ils en sont conscients."

"_Wilma, tu es incroyable, tu le sais? Tu n'as pas une seule hormone féminine en toi? Pourquoi tu ne me plains pas? Pourquoi tu ne pleures pas en serrant ma tête contre tes seins?" (Cet extrait m'afflige profondément).