Après une longue pause sur le blog, je reviens avec une nouvelle chronique, autour du dernier livre de Serge Joncour, Repose-toi sur moi (août 2016, Flammarion). En balade à Paris, sans livre dans le sac à main (!) pour occuper la soirée qui s’annonçait, je suis passée par hasard (ou pas) devant la FNAC du côté de Bercy Village. J’hésitais entre deux titres… A ce moment précis, j’avais grand besoin d’optimisme, de bienveillance, d’une lecture qui me ferait du bien à l’esprit. C’est pourquoi, rien qu’à la lecture du titre, «Repose-toi sur moi », je me suis emparée de ce roman…
Ludovic et Aurore n’ont rien en commun, si ce n’est une cour partagée sur leur lieu de résidence. Une cour qui sépare deux mondes à part. Elle, patronne de sa propre entreprise, qui détient sa marque dans le milieu de la mode, et à qui la vie sourit depuis toujours. Lui, employé pour une entreprise de recouvrement de dettes, seul à Paris après avoir perdu sa femme et renoncé aux terres familiales qui lui étaient promises… Cet homme n’inspire rien qui vaille à Aurore, jusqu’au jour où cet homme abat les corbeaux qui envahissaient la cour et la terrorisait depuis un moment… Cet acte, c’est comme un point de départ… Celui d’une histoire entre deux destins que rien ne semblait réunir, si ce n’est le hasard, pour assembler deux êtres en mal d’aimer…
En plus du titre du roman qui m’inspirait grandement, j’avais en mémoire le souvenir de ma lecture de L’amour sans le faire. En discutant avec une libraire, j’ai compris que ce livre était dans le même esprit. Impression qui s’est confirmée au fil des pages, mais… celui-ci est à la fois semblable et différent. Semblable, parce que la base de l’histoire est à peu près la même. On y retrouve cette dualité entre la ville et la campagne, bien présente encore cette fois, à travers le personnage de Ludovic, qui vient de la ferme, qui n’arrive pas à trouver sa place à Paris. Le contraste avec le personnage d’Aurore, son tempérament, est saisissant. Il se matérialise sous la forme d’une cour qui les sépare ; d’un côté, l’immeuble bourgeois, où réside Aurore, et de l’autre, un immeuble vieillissant, pour les « pauvres », celui de Ludovic. Point de rencontre entre ces deux univers parallèles : la cour commune, et ces corbeaux, oiseaux de mauvaise augure ?
Alors oui, vous vous doutez probablement de ce qui peut bien se passer entre Aurore et Ludovic, mais c’est vraiment loin d’être banal, ou mièvre. C’est d’une telle justesse, d’une telle subtilité, au contraire. Ce qui m’a frappée, c’est cette solitude que vivent et ressentent les deux personnages, dont l’auteur sait parfaitement rendre compte avec ses mots. Et l’appui, l’aide, le réconfort, qu’ils vont trouver l’un chez l’autre, malgré les épreuves et les questionnements qui ne manqueront pas de les effleurer. Leur rencontre, c’est comme un nouvel éveil, un renouveau de leur existence. Un échappatoire à la morosité du quotidien. L’amour, en résistance… Qu’il est bon de savoir que l’on existe dans le regard d’une autre personne, alors qu’on y croyait peut-être plus…
Derrière la trame apparente de l’histoire, Serge Joncour semble en profiter pour aborder des sujets de société qui font écho à de récents débats : l’avenir des entreprises en France, entre les problématiques de délocalisation pour réduire les coûts et le « made in France », gage de luxe et de qualité ; les difficultés éprouvées par le milieu agricole, les productions, les dettes… Tout autant de thématiques au cœur de l’actualité.
Pour tout vous dire, j’ai eu du mal à lâcher ce roman. Difficile de laisser mon quotidien reprendre le dessus, tellement ce livre (m’a) fait du bien. Du bien au moral, du bien à l’âme. L’auteur et son livre m’ont donné l’envie d’y croire encore et plus fort… Alors rien que pour ces quelques heures de bonheur passées au gré de votre histoire, à un moment où j’en avais vraiment besoin, je vous dis merci, M. Joncour…