Les écrivains qui devraient changer de métier

Par Ciena Ollier @cienaollier

Oui je l’avoue le titre est provocateur. En réalité c’est juste pour faire écho à mon dernier article sur les éditeurs mais aussi pour poser le point principal du développement de celui-ci : être écrivain est un métier et ne s’invente pas.

Je voudrais dans un premier temps définir ce que pour moi, est le métier d’écrivain. Je précise encore une fois pour les esprits bouchés que ceci est MON POINT DE VUE. Il est donc inutile de remplir mon email d’injures, chacun ayant son propre point de vue qu’il a le droit d’exprimer du moins tant qu’on est en démocratie. De ce fait je ne répondrai désormais plus qu’aux remarques constructives c’est à dire du type (je ne suis pas d’accord et voici pourquoi) et bloquerai toutes les autres c’est à dire du type (pauvre c..; qu’est ce que tu en sais) qui, je le sais, seront de toute façon présentes tant ce genre de personne a un système de pensée autistique … mais passons.

Pour moi donc, hors de question de considérer comme écrivain toute personne tenant un stylo. Toute personne qui écrit un document,un livre, une nouvelle ou tout écrit construit qu’il soit pour son propre usage ou celui des autres est un auteur. Il y en a de mauvais, il y en a de bons mais dans tous les cas un objet écrit a été créé et donc la personne qui lui a donné vie est appelé Auteur.

Un auteur n’est pourtant pas forcément un écrivain.

Il y a quelques années, avant que l’auto-édition ne soit si développée, l’auteur présentait donc son manuscrit à l’éditeur. Celui-ci se chargeait de transformer l’écrit en produit fini. De nos jours, certains auteurs se chargent eux-même de cette transformation. Par transformation je n’entends pas seulement passer d’un manuscrit à un livre papier ou ebook mais aussi de sa commercialisation et de la communication autour de l’objet afin de le rendre disponible à la vente.

Un écrivain pour moi c’est donc : un auteur qui se charge de la création, de la fabrication de la transformation et enfin de la mise à disposition de son oeuvre auprès du public.

Il fut un temps où un auteur avait juste besoin d’écrire. Le marché étant ce qu’il est, c’est à dire concurrentiel, cette manière de fonctionner est devenue obsolète. Les éditeurs se sont donc de plus en plus concentrés sur les auteurs acceptant de prendre en charge une partie du processus de transformation ce qui leur a permis, par la même occasion, d’éditer plus d’auteurs tout en restant compétitifs. De l’autre côté on a vu émerger des auteurs qui ont volontairement pris les rênes du processus “transformatif” en entier et du coup sont devenus à la fois auteurs et éditeurs de leurs oeuvres.

Aujourd’hui je ne parlerai pas du rôle de l’éditeur et ne rentrerai pas encore dans la polémique bon, mauvais éditeur.

Mon objet sera d’expliquer que je pense que si tout écrivain est pas nature auteur, tout auteur ne peut pas s’improviser écrivain.

L’auteur est un artiste. Que son oeuvre soit mauvaise ou non n’entre pas en ligne de compte : il produit une oeuvre de ses tripes, il s’exprime, il rédige, il crée.

Le problème lorsqu’on crée quelque chose c’est l’humilité. Ce n’est pas parce qu’on a créé quelque chose qu’on est supérieur aux autres ou qu’on sait tout or tout artiste est sensible et supporte difficilement les critiques en particulier quand ce qu’il considère comme une oeuvre d’art n’est pas forcément publiable. Il le trouve assez bon pour lui, il devrait l’être pour les autres.

Lorsqu’il en arrive à ce stade, l’auteur a donc deux possibilités : se cantonner à la première attitude (et insulter au passage toute personne qui ne verra pas son oeuvre comme un chef-d’oeuvre) ou commencer un second travail créatif qui est de polir, présenter son oeuvre, sans la dénaturer, au public.

Si je devais me permettre une allégorie je dirais que ces deux travaux correspondraient à l’extraction d’une pierre précieuse, jolie en elle-même ou pas et à sa taille qui la rendra jolie pour tous sans pour autant changer la nature même de la pierre.

C’est à partir de ce second travail créatif que l’auteur devient, pour moi, un écrivain.

Je passerai sur le travail concernant la réécriture car je ne suis pas, loin s’en faut, une experte en ce domaine, pour parler un peu plus de ce qui se passe après.

Une fois le texte poli (et certains écrivains vous diront que cela met beaucoup plus de temps que l’écriture du livre lui-même) il reste la partie malheureusement indispensable mais oh combien pénible de la commercialisation.

Comme je l’ai dit plus haut, à une certaine époque les rôles étaient clairs : à l’auteur l’écriture et à l’éditeur le reste. De ce fait, ce partenaire indispensable restait dans l’ombre. Ce n’est plus le cas aujourd’hui et l’auteur donc a le choix entre endosser le rôle d’éditeur ou lui confier la majeure partie de la commercialisation.

C’est là que je dis que certains écrivains feraient mieux de changer de métier ou plus prosaïquement que certains auteurs feraient mieux de ne pas essayer d’être écrivains s’ils ne se sentent pas la capacité (financière, physique et de travail) ou l’humilité de bien faire cette partie en croyant que le livre va se vendre tout seul.

Prenons un auteur qui décide donc de devenir écrivain. Que devrait t’il faire ? Sans rentrer dans le détail car il faudrait un livre entier, et après avoir “poli son manuscrit”, il devra être au fait de tous les moyens d’impression (papier et électronique), de graphisme, de communication (directe et indirecte via le biais des salons, des réseaux sociaux etc…), de marketing (et oui encore lui), de comptabilité et j’en passe certainement d’autres.

Même si un écrivain a, admettons, les ressources financières pour déléguer les tâches il devra toujours être aux commandes de tout.

Je vais donc malheureusement être claire : un écrivain qui vend un livre avec des fautes, qui est “invisible” pour ses lecteurs, qui ne sait pas communiquer, qui ne sait pas tenir son budget édition, faire sa pub etc…. est voué à l’échec et reste un auteur quelque soit la hargne dont il pourra faire preuve envers les éditeurs (ils publient n’importe quoi), les écrivains qui ont réussi (je suis meilleur qu’eux), les lecteurs qui n’aiment pas (ce sont des moutons) etc….

Je connais des écrivains qui maîtrisent TOUS les aspects de l’édition. Je peux vous dire que je n’envie pas du tout leur emploi du temps. J’en connais même un qui a fini en dépression grave. Etre écrivain est un métier qui, s’il peut peut-être s’apprendre sur le tas, ne s’improvise en tout cas pas.

Je suis hallucinée quand je vois une personne qui veut faire connaître son livre, me dire qu’elle ne sait pas utiliser un réseau social, n’a aucun moyen d’être contactée sauf à, moi, faire des recherches intensives pour trouver son email perso, ou veut vendre son livre en ebook mais ne sait même pas ce qu’est une liseuse !!!! Je vous rassure, j’ai aussi vu des “éditeurs” faire ça mais j’en ai déjà parlé.

Pour finir de façon positive tout de même, quelle serait la solution pour un bon auteur de devenir écrivain ? Et bien heureusement il y en a quelques unes : la plus facile est de vraiment polir son manuscrit et le proposer à des éditeurs. Pour cela sachez que la communauté des lecteurs et des écrivains est là pour vous aider. A cet effet il existe des sites du genre wattpad qui vous permet de demander l’aide de vos pairs (ce qui m’amènera à parler du plagiat un peu plus bas).

Certains éditeurs sont ravis lorsqu’un auteur veut prendre part directement au processus de commercialisation. Après tout ce sont des professionnels et ils connaissent les ficelles du métier. Tout ce que vous pourrez faire ils n’auront, eux pas à le faire pour vous ce qui leur permettra de dégager du temps pour développer d’autres parties de ce processus. A cet effet d’ailleurs je ne comprends pas ces auteurs qui me disent “c’est ma première oeuvre et je ne veux pas d’un éditeur parce qu’il n’est pas assez gros”. A ceux-là je dis, et bien envoyez votre manuscrits aux plus gros mais sachez que la plupart du temps ils ne dépenseront pas plus d’énergie qu’un petit éditeur qui croit en votre texte et veux vous faire réussir. A vous de voir si vous voulez au final un bon produit édité par un éditeur moyennement connu ou un mauvais édité par un spécialiste de “la rentrée littéraire”.

Si vous ne souhaitez pas du tout passer par un éditeur, nous sommes à une époque où il est tout à fait possible de passer par l’autoédition. Pourquoi pas ? Si vous avez le temps de vous former au métier de l’édition ça peut être jouable mais attention, l’apparente facilité à “publier” un livre par autoédition ne fait pas de cadeau : ou votre livre est vraiment bon et vous avez fait le nécessaire pour qu’il soit visible ou il sera noyé dans les millions de livres disponibles.

Ce que je veux dire par là c’est que dans tous les cas vous ne ferez pas l’impasse de la phase de commercialisation.

Enfin sachez que depuis quelques temps je vois fleurir des maisons d’éditions qui vous proposent un moyen terme entre être édité et autoédité. Si je ne suis pas encore convaincue par ce système qui me fait penser à cette vieille pub où on appelle le même chirurgien pour s’occuper d’un blessé, d’une opération du coeur et d’un soin vétérinaire, je dis à voir.

Avant de finir cet article je voudrais faire une aparté sur le plagiat. Il y a quelques années je m’étais prise d’une passion pour la création de bijoux en perles. Après avoir acheté quelques livres et du matériel j’ai été sur internet et me suis inscrite sur quelques groupes espérant partager les différentes connaissances avec des personnes plus “pro” que moi. Je n’avais pas l’intention d’en faire un métier, juste de créer des choses pour mon plaisir et j’ai été surprise de l’agression de certaines d’entre elles qui ne voulaient pas partager par peur du plagiat. J’ai donc eu le temps de réfléchir à ce sujet et voilà ce que j’en pense :

Vous ne pourrez jamais empêcher quelqu’un qui sait tenir un stylo d’essayer de vous copier mais au final qu’avez-vous peur qu’il vous copie ? Votre idée d’histoire  ou votre talent ? Dans le premier cas, il est fort probable que vous ne réalisiez pas quelque chose : à moins d’être autobiographique une histoire ne vous appartient pas. Si vous avez, par exemple, créé l’histoire d’une personne qui se venge d’une autre personne car on a tué sa femme et sa fille , vous vous doutez bien qu’il est peu probable que depuis les débuts de l’écriture personne n’ai jamais écrit sur le sujet. Par contre votre talent d’écriture, lui sera inimitable si vous l’avez suffisamment travaillé.

Pour dire les choses plus simplement : l’abruti qui vous plagiera vous piquera peut-être une idée et après ? Il fera un livre mais pas deux car personne ne sera dupe qu’il n’a pas le talent suffisant pour être écrivain. S’il l’avait il n’aurait pas besoin de plagier. Vous par contre, vous vous ferez voler une idée mais votre talent vous permettra sans problème d’en trouver une autre, dix, cent et surtout personne ne pourra vous retirer votre style, votre façon d’écrire.

Je serais vous je ne m’inquiéterais pas trop du plagiat : un bon écrivain est inimitable. Autrement nous serions déjà envahi de clones de Proust, de Voltaire ou de Zola.