Ce livre n’est pas un roman mais une suite de récits tournant tous autour de la pêche. Pêche à la truite, au bar rayé ou au tarpon sur des lieux allant du Montana à la Floride en passant par l’Argentine et la Russie, McGuane sait tout de cet art aussi vieux que le monde, que ce soient des techniques que du matériel. C’est aussi le point faible de ce bouquin, si vous n’êtes pas pêcheur comme moi – et je ne lui jetterai pas la pierre – certains passages sont particulièrement ardus à lire pour ne pas dire ennuyeux, accentués par le parti-pris compréhensible et expliqué par le traducteur, de conserver les termes anglais quand ils n’existent pas dans notre langue (« Le flat à bonefish est un terrain de signes complexe, presqu’aussi indéchiffrable qu’un chalk-stream d’Angleterre » Heu.. ?). Il faudra donc s’autoriser des accélérations dans la lecture pour profiter des points forts qui sont heureusement nombreux.
D’abord c’est bien écrit, on voit que nous avons là un véritable écrivain et c’est particulièrement visible quand Thomas McGuane s’éloigne de la pêche proprement dite, élargissant son propos par ses remarques sur la vie, ses réflexions existentielles (« Notre condition de mortels étant ce qu’elle est, toute nouvelle rivière pourrait être notre dernière ») ou les portraits de pittoresques personnages de rencontres. On s’amuse à lire sous sa plume qu’il « tient pour un chef-d’œuvre de la littérature mondiale, le catalogue du fabricant de cannes Paul Young, More Fishing and Less Fussing »…
On retiendra surtout de cet ouvrage, hymne à la nature, le militantisme écologique de Thomas McGuane, « tout pêcheur doit se faire garde-rivière, intendant de hauts-fonds marins, veilleur de haute mer », passant par une forme de solitude assumée, « solitude, qui n’est pas, notez bien, la même chose que l’isolement. »
Un livre qui trouvera tout naturellement sa place à côté de celui de John Gierach (Traité du zen et de l’art de la pêche à la mouche) par exemple.