Les raisons de ne pas s'opposer au mariage Gay

Il ne s'agit pas de pédérastie ou d'exploitation sexuelle des esclaves comme c'était souvent le cas de l'Antiquité ; il ne s'agit pas de la pure et simple satisfaction de besoins sexuels ou affectifs. Nous voyons autour de nous des couples homosexuels stables, fidèles, aimants, et qui ont une très réelle fécondité au sein de notre société.

Cela doit nous amener à changer le regard que nous portons encore trop souvent sur les personnes homosexuelles - beaucoup d'entre nous l'ont déjà fait, et que personne ne se sente ici accusé d'homophobie - mais aussi à revoir un cadre législatif qui ne permet pas de prendre en compte leur situation de façon appropriée.

Il aurait sans doute été préférable que notre Eglise ne s'implique pas à ce point dans ce débat avant d'avoir réfléchi en profondeur à la validité de son enseignement ; nous sommes tous responsables de cet état de fait. Il y a une distinction à faire entre la Vérité que nous avons pour vocation d'annoncer au monde, et ce qui n'est peut-être qu'une mauvaise habitude de pensée, une tradition obsolète.

Elle permettra à des couples qui souhaitent donner un cadre juridique à leur union de le faire dans les mêmes conditions que les autres.

Nous n'avons aucune raison de juger a priori leur attachement superficiel ou insincère. Nous n'avons aucune raison de refuser à deux personnes de même sexe formant un couple de se transmettre leur patrimoine dans les mêmes conditions que les autres, de tisser entre elles la même solidarité que celle qui peut unir les autres.

Quand la situation se présente, nous n'avons aucune raison de leur refuser d'élever ensemble des enfants dans les mêmes conditions que les autres. Le fait d'élever un enfant, d'être son père ou sa mère, n'a jamais été, dans aucune société humaine, consubstantiellement lié au fait d'avoir participé à sa conception.

On ne saurait parler à ce sujet de mensonge (outre que ce terme est profondément blessant) - ou alors les parents célibataires sont des menteurs, les parents divorcés sont des menteurs, les parents qui adoptent sont des menteurs, ce qui fait beaucoup de menteurs.

L'histoire des sociétés humaines montre que ce modèle n'est ni plus " universel ", ni plus " naturel " qu'un autre. L'Eglise elle-même a toujours reconnu la diversité des états de vie : mariage, célibat, vie consacrée, sacerdoce, vie religieuse communautaire.

A cet égard, les couples homosexuels ne me semblent pas représenter un bouleversement majeur ; il suffit d'en connaître quelques-uns pour saisir à quel point ce qu'ils vivent ressemble profondément à ce que vivent les couples hétérosexuels.

Quant à vouloir préserver l'institution du mariage de tout changement : on oublie un peu vite qu'il n'y a pas si longtemps, se marier, c'était débuter une vie commune avec quelqu'un qu'on avait rarement choisi - vie commune marquée par la domination de l'un des deux membres du couple sur l'autre. (Je ne crois pas qu'il y ait eu, en ce temps, de grandes manifestations contre le mariage tel qu'il était.)

Pour autant qu'il soit possible d'en juger au for externe, de ce mariage et de celui de deux personnes homosexuelles aujourd'hui, lequel vous paraît le plus éloigné d'un hypothétique modèle d'union chrétienne ? Il me semble que la question mérite d'être posée.

Si l'Eglise ne considère pas la plupart des formes de procréation médicalement assistée comme moralement acceptables, c'est pour des raisons qui s'appliquent tout autant à un couple hétérosexuel qu'à un couple homosexuel.

Il aurait pu être pertinent de mettre un million de personnes dans la rue lorsque la fécondation in vitro (et la production d'embryons surnuméraires qui y est hélas associée) a été autorisée : il est étrange de ne s'en préoccuper à ce point - même si je n'ignore pas toutes les actions entreprises par des catholiques pour combattre cette pratique - qu'à l'heure où les couples homosexuels pourraient y avoir accès.

Quant à la gestation pour autrui, elle n'est à l'heure actuelle pas légale en France, que le couple intéressé soit homosexuel ou hétérosexuel. La plupart des couples qui recourent à ce procédé dans les pays qui l'autorisent sont hétérosexuels.

Bref, s'il y a un risque de reconnaissance d'un " droit à l'enfant ", c'est un problème global, c'est le problème de tous les couples, qu'ils soient homosexuels ou hétérosexuels, et stigmatiser les couples homosexuels comme nécessairement " égoïstes " dans leur désir d'enfant est injuste et mensonger.

Leur permettre de faire ce choix, ce n'est pas manquer de reconnaissance à nos parents et éducateurs ; cela n'a rien de contradictoire avec les choix que nous avons faits, si différents qu'ils puissent nous paraître.

Pour toutes ces raisons, en tant que catholique, il me semble impossible de manifester le 13 janvier, et je me permets de vous faire une proposition alternative : prier pour que, si la loi est votée, les couples homosexuels qui choisiront de se marier civilement en tirent tout le bien possible.