La vieille anglaise et le continent et autres récits de Jeanne-A Debats

La vieille anglaise et le continent et autres récits de Jeanne-A DebatsMe voilà de retour avec des critiques de livres. Ce début de mois de novembre a été assez chaotique au niveau du boulot et j'ai malheureusement laissé de côté le blog. Je vais essayer de me rattraper d'ici la fin du mois.

Je me remets au boulot avec un billet sur un recueil de nouvelles d'une auteure dont je vous ai déjà parlé de nombreuses fois : Jeanne-A DEBATS. La vieille anglaise et le continent et autres récits est un recueil de neuf nouvelles dont la principale est La vieille anglaise et le continent qui avait été publiée antérieurement chez Griffe d'encre. Les huit autres nouvelles avaient également été publiées chez le même éditeur sous le titre de Stratégies du réenchantement. Je vais donc vous présenter rapidement ces neuf histoires dont certaines font partie du même univers.

L'histoire

La vieille anglaise et le continent

Ann Kelvin est une éco-warrior en fin de vie. Un de ses anciens étudiants, Marc Sénac, lui propose de transférer son esprit non dans un clone plus jeune mais dans le corps d'un grand cachalot. Cela lui permettrait de vivre un peu plus longtemps et surtout d'offrir un avenir à un grand cachalot mort après avoir échoué sur les plages de Bretagne. Ann accepte la proposition et là voilà à traverser les océans du monde. Évidemment elle aura un rôle à jouer dans la préservation des baleines.

Cette nouvelle se déroule dans le même univers que la précédente mais des années plus tard. Une vieille race de taureau a été ressuscitée, une de celle qui servait au corrida dans le passé. Il n'en faut pas plus pour relancer cette vieille tradition, la première aura lieu à Mexico. Nous allons donc suivre la cuadrilla de Jefe se préparant pour cet évènement. Les dissensions au sein de l'équipe doivent disparaitre afin de leur donner le plus de chance de remporter cette corrida mais l'arrivée de deux jeunes gitans de Madrid rejetés par le chef est un mauvais présage.

Alors que les deux précédentes nouvelles se déroulent dans un univers SF, Aria Furiosa se positionne dans un genre plus fantastique. En pleine occupation nazie, le colonel allemand Seifert exige qu'Orlando, castrat à la retraite, chante pour la visite du colonel Rommel. Ce dernier commence par refuser mais les pressions sur son amant et son amie, Marie, ancienne danseuse juive devenue infirme, le font changer d'avis.

Changement de style et d'univers, nous voilà à mi-chemin entre conte gore, fantastique et fantasy avec une verve et un humour plus marqué. Mme Archambaud est mariée à Tanguy, un serial killer plutôt spécialisé dans les fées mais qui n'hésite pas à aller voir ailleurs non plus. Un jour, il ramène une sorte de nain, Goliath. Ce dernier a le pouvoir d'exaucer un vœu. Mme Archambaud se laisse tenter, elle veut une vie normale.

Stratégies du réenchantement

Dans un futur plus ou moins proche ou dans une autre forme de notre monde, le Sida a muté en Sida 4, terriblement mortel. Avant de tuer les gens, il annihile toutes les émotions des malades, les rendant dangereux pour les autres. Notre protagoniste a été contaminé par son ex sciemment. Elle lui laisse aussi une fille, Edeline. Nous allons suivre sa longue évolution dans la maladie.

Privilège insupportable

Dans cette nouvelle post apocalyptique, la majorité de la population vit sous terre, rationnée en oxygène. Les morts vont dans une sorte de fosse commune où ils sont transformés en compost pour permettre de développer l'agriculture. Seuls quelques uns ont le droit d'aller dans les étages supérieurs où l'oxygène n'est pas rationner notamment les mères en fin de grossesse et leur nouveau né. Alors que Tami rejoint les étages supérieurs pour accoucher, son mari en profite pour continuer à creuser dans le sol afin de pouvoir planter des graines et produire son propre oxygène. Il est prêt à tout pour y arriver.

Toujours dans un univers post apocalyptique, Gilles a survécu mais il est seul. Il décide de créer de nouvelles générations d'humains qu'il élève et éduque. Alors qu'il passe pour un bon samaritain sauveur de l'humanité, Gilles cache un lourd humain.

Fugues et fragrances aux temps du Dépotoir

Cette avant-dernière nouvelle nous mène sur une station spatiale à une époque où la Terre n'est qu'un lointain souvenir. La station Cécilya dite le " Dépotoir " est vouée à une destruction imminente mais certains de ses habitants sont prêts à tout pour la sauver afin que le soleil de Cécilya continue à briller.

Le nettoyage de printemps

Cette nouvelle très courte (3-4 pages) est une texte d'un membre de la Time Corp, organisme qui régule le tourisme temporel et les problèmes qu'il pose.

Ce recueil de nouvelles est très riche et varié. La première nouvelle prend le pas sur les autres mais elle ne les étouffent pas et chacune d'entre elles en vaut le coup. Les thèmes abordés sont divers et variés. La première est clairement accès sur l' écologie avec un soupçon de bioéthique. Ce n'est pas la seule, Paso Doble et Privilège insupportable reprenne aussi ces thématiques. Il est avant tout question de l'humain et de sa survie et des dérives dont il est capable pour l'atteindre. Certaines m'ont dérangée comme Privilège insupportable qui aborde la question de l'inceste pour des questions de praticité. C'est dérangeant mais c'est bien amené. La fin de Paso Doble est triste mais semble inévitable. C'est un vrai gâchis (je vous laisse la découvrir). Certaines scènes d' Aria Furiosa sont assez dures également, notamment le retour de l'amant d'Orlando et quand on comprend ce qu'il a subi.

Ces nouvelles ne sont pas douces et gentils. Elles peuvent déranger, gêner sans pour autant tomber dans du voyeurisme et de la violence gratuite. Certaines poussent à réfléchir plus que d'autres mais elles questionnent toutes notre vision du monde.

La postface de Jean-Claude Dunyach vaut le coup. Il a mis en avant le point commun de ces nouvelles : un monde fermé. Mis à part La vieille anglaise et le continent, toutes les nouvelles se déroulent dans un monde clos, concentré. Il est souvent plus facile pour une nouvelle de limiter l'espace pour mieux maitriser le sujet. Je trouve que cet enfermement apporte un plus à ce recueil. Vous me direz ce que vous en pensez.

Pour conclure

Un très bon recueil qui change de mes lectures précédentes de l'auteur. J'y ai tout de même retrouvé son style, son phrasé et son humour. Je vous le conseille fortement.

A très vite pour un nouveau billet et en attendant bonne lecture à vous !

Références : DEBATS, Jeanne-A. La vieille anglaise et le continent et autres récits. Paris : Folio, 2010. 384 p. (Folio SF)