Quand les Forges de Vulcain publient William Morris, ils ne font pas les choses à moitié. Ce livre objet, qui paraît pour la première fois dans son intégralité et agrémentée d’illustrations de l’auteur, vous fait partager le destin de Rodolphe. Rodolphe est un jeune homme qui se voit contraint de rester auprès de son père alors que ses frères partent découvrir le monde. Mais, bien décidé à vivre lui aussi l’aventure, il saute sur son destrier et quitte le château à la recherche d’une Source magique dont l’eau a, dit-on, des propriétés fantastiques. Rapidement, cette chevauchée prend la tournure d’une recherche personnelle et, derrière le roman picaresque, pointe le récit d’apprentissage, le passage à l’age adulte d’un jeune homme en quête de sens. Qu’on se rassure, il vivra des aventures, rencontrera des personnages improbables, des femmes mystérieuses et aura régulièrement des poussées de testostérone.
William Morris, à peine moins connu comme artiste préraphaélite que comme père fondateur de la fantasy moderne, est pour ainsi dire inconnu du grand public. Si sa langue précieuse et son univers raffiné respectent les codes du genre, je pense que cet ouvrage est plus à mettre entre les mains d’un lecteur de littérature classique et de Chrétien de Troyes qu’entre celles d’un amateur de fantasy à la Bragelonne. En effet, son livre est une somme qui reste tout du long à la frontière du récit d’aventures mais n’y bascule jamais complètement. Il reste au final un roman existentialiste. Rodolphe se cherche, s’interroge sur la vie, l’amitié, l’amour, la figure du père et il faut voir en cette Source merveilleuse une allégorie sur la fuite du temps et l’acceptation des années qui passent.
La Source au bout du monde est un roman ambitieux, éventuellement austère, un beau boulot éditorial, le résultat magistral d’un grand travail de traduction et un passage obligé pour les inconditionnels de quêtes existentialistes.