de Laura Gustafsson, traduit par Claire Saint-Germain
Qu’est-ce qui lie une hôtesse de l’air finlandaise, un directeur d’orphelinat indien des années 1920 et un bébé mort à force de négligence et de cruauté? L’anomalie.
Ce roman est un peu spécial. J’ai d’abord été agréablement surprise par le ton franc et froid de la narration. On commence avec l’histoire de l’hôtesse de l’air et imaginé un esprit si sauvage et affranchi dans un corps de poupée Barbie m’a bien plu. Les idées véhiculées par le texte sont modernes et féministes, le constat fait sur notre société est au vitriole mais juste.
J’ai continué à lire et je suis passée à l’histoire suivante, celle de l’orphelinat, et j’ai commencé à me poser des questions. Puis j’ai lu celle du bébé et, bien que ce récit soit un peu moins glauque que ce à quoi je m’attendais (j’ai quand même sauté quelques courts passages), je me suis demandé: Où va l’auteure? Pourquoi me raconte-t-elle ça?
Si le passage d’après n’avait pas été une parenthèse dans laquelle Gustafsson explique sa démarche, je pense que j’aurais refermé le livre. Mais elle nous dit qu’elle met un miroir en face de l’homme. Elle veut lui montrer sa cruauté idiote et dont il ne se défait pas à travers les siècles. Cette envie de conquête, d’effacer les différences, de dominer toutes choses: le mal en lui. Est-ce ce qui nous définit et non le rire? Y a-t-il un gêne que l’on peut isoler et duquel nous pouvons nous débarrasser?
Féministe et vegan, l’auteur dénonce surtout le mal fait aux femmes et à la nature: elle prône notamment le fait que l’Homme n’est pas supérieur aux animaux et ne doit pas supporter que ces derniers souffrent ou meurent pour son bien-être. Elle exhibe aussi les travers de la société, son injustice. Elle montre que les institutions sont vérolées par ce mal et même un système comme les Services Sociaux, créés pour protéger les plus faibles plie face à l’indifférence et la paresse humaine.
Gustafsson aurait pu être bien plus trash que ce que nous pouvons lire sur ces pages mais elle a gardé une certaine distinction en abordant ces sujets. J’ai attendu quelques temps avant d’écrire ma chronique pour voir si des passages dérangeants du livre me revenaient ou si j’en gardais de mauvais souvenirs mais non: cette lecture m’a moins perturbée que celle de La Carrière du Mal par exemple (mais j’ai sauté un ou deux passages rappelez-vous). Je ne dirai pas que j’ai aimé pour autant. C’est un livre étrange et, bien que la plume soit de qualité, je ne me vois pas le conseiller à n’importe qui. Si vous tombez dessus et qu’il vous tente, prenez-le, mais c’est à vos risques et périls.
Je compte cette lecture dans les challenges Emprunts de livres et la Coupe des 4 Maisons!
Marion