Peau d’âne, d’après le conte de Charles Perrault • Jacques Demy

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Éditions de La Martinière, 2014 (140 pages)

Ma note : 16/20

Quatrième de couverture …

« Parce qu’une princesse refuse d’épouser son père,
Parce qu’un âne fait bêtement des crottes d’or.
Parce qu’une rose qui parle vous regarde
Toujours dans les yeux.
Parce qu’une fée tombe amoureuse et que cela ne se fait pas,
Parce qu’un prince a su rester charmant.
Parce qu’enfin cette histoire de doigt et d’anneau,
De vous à moi, c’est fort curieux. »

JACQUES DEMY

Mon avis …

Avec Barbe Bleue, Riquet à la Houppe ou encore Le Chat botté, Peau d’âne fait incontestablement partie de mes contes préférés. En juin 2015, j’avais d’ailleurs consacré un billet aux contes de Charles Perrault (que j’avais alors eu envie de relire). Pour en revenir à Peau d’âne, j’ai toujours considéré le film musical conçu par Jacques Demy (1970) comme un petit bijou. Si ses détracteurs lui trouve un côté kitsch, c’est peut-être justement ce qui me pousse à le revoir chaque année, au moment des fêtes. Car ce film me fait sourire, rire. Il possède en effet énormément de références humoristiques (il suffit de voir l’arrivée de la fée et du roi en hélicoptère, devant le château de Chambord). Mais aussi car ce film fait rêver et possède une bonne dose de romantisme (la relation entre Peau d’âne et le prince y est certainement pour quelque chose). Dans ce beau-livre, nous retrouvons le scénario de Jacques Demy, des images du film ou encore les paroles des chansons rythmant l’avancée du récit.

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La version musicale de Jacques Demy ne colle bien sûr pas à 100% au texte de Perrault si l’on se fie à certains détails (le Royaume Bleu et le Royaume rouge sont ainsi absents du texte initial). Pourtant, l’essentiel de l’intrigue est là. Jacques Demy précise très bien avoir voulu créer Peau d’âne afin de mettre des images sur ses ressentis quand, enfant, il adorait lire le conte. Et le résultat est magique. Les costumes sont magnifiques (je pense aux robes couleur de lune ou couleur de soleil, mais également aux robes conçues pour Delphine Seyrig qui interprète la Fée des Lilas). Les airs chantés sont très entraînants, et pour certains me font toujours autant sourire. Je pense notamment au passage où Peau d’âne est méchamment moquée par les villageois à cause de sa tenue, ou encore à celui où un charlatan vient vendre une potion permettant à l’annulaire de rapetisser (afin que la bague ait plus de chance de passer). Dès le début du film, le générique nous plonge dans cette atmosphère magique et grandiose.

Pour en revenir à l’intrigue, celle-ci se fait plutôt simple. Dans un monde de magie et de merveilleux, le Royaume Bleu est un havre de paix dirigé par un roi (Jean Marais) très apprécié de son peuple. La particularité du royaume ? Le roi possède un âne qui défèque de la monnaie (si, si…).  À la mort de la reine, tout le royaume sombre dans le chagrin. Sur son lit de mort, celle-ci posait une seule et unique condition : que le roi ne se remarie qu’avec une femme plus belle et plus vertueuse qu’elle. Manque de chance, aucun des portraits de princesses à marier dans les villages voisins ne trouve grâce aux yeux du roi. Jusqu’à ce qu’il pose les yeux sur une jeune femme blonde se démarquant des autres : il s’agit de sa fille (Catherine Deneuve). Afin de protéger la princesse, la Fée des Lilas (Delphine Seyrig) imagine une série d’épreuves en vue de décourager le roi : confectionner une robe couleur du temps, une robe couleur de lune, puis une robe couleur de soleil. Et ce avant d’exiger la peau de l’âne qui fait la fortune du royaume. Le roi étant prêt à tout pour se marier, la princesse n’a d’autre choix que de s’enfuir vêtue de la peau de l’âne (afin de ne pas être reconnue). C’est à ce moment précis qu’un gentil prince passe par là…

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Je trouve que les deux choses qui frappent le plus dans Peau d’âne restent les visuels très colorés relevant de la féerie ainsi que la musique (signée Michel Legrand). Tout est fait pour donner un côté irréel à l’image, tandis que les airs musicaux alternent entre drôlerie et une certaine poésie. Si je ne suis pas une très grande fan de Catherine Deneuve, je dois avouer qu’elle incarne merveilleusement bien le rôle de la princesse à la beauté diaphane. Je lui trouve d’ailleurs un maintien et une attitude qui collent parfaitement à l’ensemble. Le Prince Rouge (Jacques Perrin) présente quant à lui un côté plus naïf, plus désinvolte. Jacques Demy souhaitait sans doute davantage le représenter en jeune homme au cœur pur qu’en chevalier en armure. J’aime en tout cas beaucoup son personnage. Quant à la Fée des Lilas, n’est-elle pas le personnage le plus sensé, le plus humain mais aussi le plus bienveillant de tous ?

Peau d’âne possède d’incontestables qualités sur le plan de l’esthétisme et de l’ambiance. Si certains détails ne paraissent finalement pas si innocents que ça pour les yeux d’un adulte (le prince qui parle aux fleurs comme si cela était on ne peut plus naturel, les paroles de la chanson Rêves secrets d’un prince et d’une princesse), j’ai surtout envie de retenir le côté grandiose et magique qui se dégage de ce film. Car celui-ci me fait toujours autant rêver malgré les années. J’aime ce film pour son histoire d’amour, mais aussi pour son jeu avec les codes du conte et du merveilleux (car même une fée peut avoir été blessée dans sa vie amoureuse, car un prince peut présenter un côté naïf et enfantin mais au fond sincère et touchant). Le film, la musique, présentent un côté kitsch oui, mais dans le fond tout est un bijou de créativité : pour s’en convaincre il suffit d’écouter la musique du Bal des chats et des oiseaux (que j’aime énormément pour son côté baroque). Aussi je revisionne Peau d’âne avec toujours autant de plaisir. Je le considère même comme un film culte. En lisant ce beau-livre, je me suis immédiatement replongée dans l’univers du film de Jacques Demy. Je vous conseille donc autant le film que cet ouvrage.

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