Chronique « Tokyo Ghost (T1) Eden atomique »
Scénario de Rick Remender, dessin de Sean Murphy, couleurs de Matt Hallingsworth
Public conseillé : Adultes et adolescents,
Style : Avenure, S-F, Comics
Paru chez Urban Comics, le 27 mai 2016, 144 pages, 15 euros,
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L’Histoire
Imaginez vous demain scotché à votre smartphone, à l’affût des infos diffusées par votre montre et vos lunettes connectées, et peut-être branché sur quelques fils d’infos et deux ou trois sites porno via une connexion cérébrale. C’est un peu ce que vit Led Dent, zombie gavé d’images qui ne peut plus quitter le flux intarissable produit par l’industrie du divertissement de l’entertainment.
Nous sommes en 2089, dans la misère putride des îles de Los Angeles.
Dans un monde impossible à supporter, tous partent à la dérive sur des flots plus agréables à vivre, mais totalement artificiels. Debbie, elle, est une jolie blonde, dynamique, follement éprise de son homme
Une opportunité s’offre à eux, surtout à Debbie pour sauver son homme en le détoxiquant. Il leur faut rejoindre Tokyo, dernière nation résistant au tout technologie (quel pied de nez !) et y tuer le seigneur de guerre qui y règne grâce à un foutu champ électro-mag qui rend impossible l’intrusion des nations du gavage de cerveau. Debbie s’y engage, Led suivra, incapable qu’il est d’imaginer les souffrances qu’il va endure à cause de son sevrage, le dernier jardin d’Eden s’offre à eux, mais l’enfer n’est jamais très éloigné.
« Tokyo Ghost », le comic book que j’attendais
Au milieu, surnage cette jolie blonde, qui vous embarque dans sa quête de réalité, belle Don Quichotte volant au milieu des meules broyeuses des moulins infernaux de l’entertainment. Et que dire de l’entrée dans cet étonnant ilot de résistance qu’est Tokyo. Tout devient encore plus passionnant, prend encore plus sens, diffusant encore beaucoup plus des intentions du scénariste qui, cette fois, a décidé par une fiction d’anticipation de nous faire réfléchir sur les dérives d’un futur qui embrassera encore et toujours plus le tout technologique.
Ce que j’en pense
Pourquoi j’ai calé sur le récit en noir et blanc. Je ne me l’explique pas vraiment. Même si, avec les formidables couleurs de Matt Hollingsworth, « Tokyo Ghost » prend juste un supplément d’énergie, de beauté, de folie, donnant au dessin hyper fouillé de Murphy une densité extraordinaire et à cette série la qualité d’une bombe à fragmentation. Et la cible est votre cerveau, qui ne cèdera pas devant l’assaut extrême, mais soufflera d’aise devant cette mise en scène portée par cette poésie ultra-violente et vénéneuse d’un futur effrayant qui s’oppose à un passé réconfortant si proche et déjà si lointain.
Tokyo, île naufragée des derniers fantômes d’une pensée humaine pervertie par ce que devient notre société. « Tokyo Ghost » est, sans aucune réserve, dans la short list des meilleurs comics de l’année 2016. A découvrir, en couleur, pour l’apprécier pleinement ou en N&B si vous adorez le trait de Sean Murphy, une réelle preuve de bon goût.