Aslı Erdoğan.
On le sait, l'écrivaine turque de 49 ans Aslı Erdoğan a été arrêtée à son domicile d'Istanbul durant la nuit du 16 au 17 août 2016, tout comme vingt autres membres de la rédaction du journal d'opposition "Özgün Güden" auquel elle collabore depuis plus de dix ans. Il y a déjà presque quatre mois de cela. Depuis, elle est toujours incarcérée à la prison pour femmes d'Istanbul et risque la prison à vie pour des chefs d'accusation comme celui d'être "membre d'une organisation terroriste armée". Son procès devrait débuter le 29 décembre.
Que faire? La lire, la soutenir, lui écrire, parler d'elle...
Récemment, Aslı Erdoğan a diffusé une courte lettre pour remercier ceux qui, en Turquie, la soutiennent et manifestent devant la prison où elle est détenue.
"Cher(e)s ami(e)s,Aslı ErdoğanPrison de Bakırköy28.11.2016
Sous la pluie, vous êtes venu(e)s devant les portes de la prison, je suis très touchée. Je pense que je n'aurais pas pu le faire.Chaque jour qui passe à l'intérieur, est plus court, plus noir, mais je vais vous saluer avec une phrase que je viens d'apprendre: "On ne peut pas grimper sur les branches hautes de la réalité, avec désespoir."
Salutations, amitiés à toutes et à tous. Merci !"
Née le 8 mars 1967 à Istanbul, Aslı Erdoğan y vit toujours. Elle partage sa vie entre la défense des droits de l'homme, le journalisme et l'écriture de romans et de nouvelles. Physicienne de formation, elle a travaillé en 1991-1993 au Centre européen de recherches nucléaires (CERN) de Genève, puis deux ans à Rio de Janeiro. Mais elle est rentrée en Turquie en 1996 pour se consacrer au journalisme et à l'écriture. Ses livres sont traduits en Europe comme aux États-Unis, et, fait rare, en arabe.
En France, c'est Actes Sud qui la publie.
("Kırmızı Pelerinli Kent", 1998)
traduit du turc par Esin Soysal-Dauvergne
Actes Sud, 2003
Il s'agit du deuxième roman d'Aslı Erdoğan mais c'est le premier à avoir été traduit en français.
Il est inspiré des deux années qu'elle a passées à Rio de Janeiro.
("Mucizevi Mandarin", 1997)
traduit du turc par Jean Descat
Actes Sud, 2006
Le recueil de nouvelles se déroulant à Genève a été écrit quand Aslı Erdoğan s'y trouvait. Mais il a été publié cinq ans plus tard, en 1997, à son retour du Brésil.
("Tahta Kuşla", 2009)
traduit du turc par Jean Descat
Actes Sud, 2009
Un nouveau recueil de nouvelles, aux limites du réalisme en écho avec l'état de la Turquie contemporaine.
Pour lire le début de ce recueil, c'est ici.
("Taş Bina ve Diğerleri", 2009)
traduit du turc par Jean Descat
Actes Sud, 2013
Un récit sur le monde carcéral, la torture et les conditions de détention en Turquie,
publié en 2009.
Pour lire le début de ce récit, c'est ici.
Que faire contre cette arrestation et cet enfermement?
Plusieurs pétitions circulent sur la plate-forme Change.org.
Le monde de l'édition et de la littérature se mobilise aussi pour elle. Partout en France, en Suisse et dans le monde se multiplient les actions de solidarité, soirées de lecture principalement (lire ici).
Un agenda en ligne permet aux personnes intéressées de s'inscrire afin d'assurer une présence quotidienne dans les librairies. Il est possible de prendre le train en marche: voir sur le site de la Maison éclose.
Un nouveau livre en janvier
Ces chroniques politiques, réflexions sur l'écriture et l'exil, essais sur les actions gouvernementales, les pesanteurs archaïques et les clichés à l'œuvre dans la vie quotidienne en Turquie, éclaireront le profil d'essayiste engagée d'Aslı Erdoğan et permettront de comprendre pourquoi l'auteur, victime de la chasse aux sorcières déclenchée en juillet 2016, est actuellement en prison.
Son écriture toujours soignée et traversée de fulgurances poétiques trouve ici un autre terrain d'expression que le roman, non moins convaincant.