Attention coup de coeur !
L’histoire se passe en 1620, dans une ville imaginaire du Saint-Empire germanique, ravagé par une longue guerre.
Le héros de cette trilogie est le chevalier Krantz, à mi-chemin entre le justicier et l’exorciste qui assume des missions pour les Templiers. Dans le premier volume, il est question de goules qui pillent et assassinent, répandant la terreur dans la ville. Pourtant, celle-ci bénéficie de la protection d’un énorme dragon, mais cette créature ancestrale ne peut rien contre les ennemis internes à la cité.
« La tempête de neige faiblit, à présent ; elle cessera d’ici peu. Lâchant prise, le dragon bascule soudain du haut de la falaise. Il tombe à pic vers les eaux agitées de la Rhein See, entraîné par sa masse énorme, le corps tendu pour mieux fendre l’air, tête la première, les ailes collées à lui. La descente est vertigineuse, impossible : trois à quatre cents pieds de chute que le dragon accomplit le temps de quelques battements de cœur. Il a presque rejoint les flots quand ses ailes se déploient dans un grand claquement de cuir. Le plongeon devient alors un vol plané que le dragon prolonge à plaisir, au ras des vagues dont les embruns trempent les écailles grisâtres de son ventre. Il file ainsi une longue minute, sans un mouvement, avant d’obliquer vers Wielstadt. »
Dans son enquête, Kantz est épaulé, parfois, par Le Lieutenant du Prévost, Rainer Von Regenhalt, et quelques uns de ses amis, dont le bon géant Feodor, le nain Willemm, ou le faune Zacharios qui tient l’auberge de la Cigogne Noire. Ici en effet, les êtres humains cohabitent avec des créatures féériques ou des peuples anciens (Nains, centaures…).
D’ailleurs, le premier chapitre des Ombres de Wielstadt s’ouvre sur une course-poursuite haletante entre une petite fée et un corbeau. Elle sera sauvée de justesse par Kantz, puis baptisée Chandelle. Une excitante entrée en matière car on trouve déjà tous les ingrédients de la trilogie, un héros solitaire, confronté à des événements magiques ou surnaturels… et d’horribles ennemis sous forme de goules (de bien répugnantes créatures…).
Dans le deuxième volet, il est question d’une très ancienne prophétie, d’une société secrète qui va causer bien des tracas, d’une cour des miracles et de son roi Misère, d’une mystérieuse Dame en rouge qui protège la cité, tandis que dans le troisième épisode, nous faisons connaissance avec le redoutable voleur de visages, une belle trouvaille même si j’ai regretté, un peu, les crimes plutôt glauques et les trop nombreuses références bibliques… Mais le cadre historique est soigné, comme toujours, la langue est belle, aucun dialogue n’est artificiel ou superflu, bref, une réussite de ce côté là.
Les trois livres sont évidemment liés puisque nous retrouvons une bonne partie des protagonistes tout au long de la trilogie (malgré le départ ou la mort de certains d’entre eux), on mentionne la Sainte-Vehme à plusieurs reprises, et surtout, on assiste au profond changement qui affecte Kantz et qui trouve sa conclusion logique dans les dernières pages. Tout comme dans les Lames du Cardinal, j’ai retrouvé ce plaisant mélange de fantasy et de roman d’aventures historiques. Pevel est un peu le fils spirituel d’Alexandre Dumas, et tout comme lui, il sait rendre ses personnages diablement attachants. Ce n’est pas sans un petit pincement au coeur que l’on dit adieu à Kantz au terme de cette excellente intégrale.
Je me suis donc replongée avec le plus grand des plaisirs dans ces récits qui m’ont permis d’ajouter un nouveau héros à mon panthéon personnel : Kantz est en effet le héros par excellence, solitaire et auréolé de mystère, l’un de ceux que l’on ne peut oublier. Les scènes de bravoure sont nombreuses mais l’émotion affleure toujours et le troisième volet est certainement le plus poignant des trois. Je me demande si de tous les romans de Pevel, je n’ai pas une petite préférence pour cette trilogie…
Une belle relecture pour moi et une chouette initiative des éditions Pocket d’avoir regroupé ces trois volumes.