Flop 2016

Par Sara
Vous l'attendiez tous dans la plus totale hystérie, le moment est venu de dévoiler le flop 2016!
Et oui, comme le mauvais esprit règne en maître sur ce blog (on avait dit, ou pas, qu'il était décalé?), pas question de passer sous silence la liste des romans qui nous ont (oui, je dis "nous" pour moi, moi et moi-même, on a réussi à trouver un consensus là-dessus) affligés (re-oui, l'un de mes moi est masculin et l'emporte donc sur les autres, saleté de règle de grammaire), indignés, scandalisés, atterrés devant la nature de leur contribution à l'édifice chéri de la littérature contemporaine.
Car force est de constater qu'une vie de lecteur est une vie d'aventures, où les risques que l'on prend sont parfois terrifiants, tant l'impact psychologique d'une piètre lecture est irréversible : deux heures qui ne nous seront jamais rendues, et la lourde sentence d'être condamné à revoir défiler sempiternellement devant ses yeux la nuit les expressions déplorables et la prose navrante du club des Agnès (Martin Lugand, Ledig, il m'en manque une troisième, est-ce que le deuxième nom de Guillaume Musso ne serait pas Agnès?).
Bref, le seul vrai moyen d'exorciser ces moments difficiles est encore de pourrir exagérément, sans la moindre modération, ces livres qui sont à l'origine du marasme que sont devenues nos vies.
Voici les cinq romans de 2016 qu'il fallait éviter à tout prix, et qui m'ont conduite à fabriquer une poupée vaudou à l'image de leur auteur pour décharger mes émotions négatives.
- En 5e position : Marguerite n'aime pas ses fesses, d'Erwan Lahrer
En dépit d'une prose très engageante, voici un récit qui pèche par excès caricatural, loin de l'art subtil exercé par La Bruyère : les personnages sont terriblement peu nuancés dans leurs pensées et leurs actes, tout chez eux suinte le stéréotype, et les pérégrinations auxquelles ils sont confrontées suffisent à vous rappeler que vous avez une ampoule à changer dans le salon depuis au moins trois mois, et que tout d'un coup, ça vient de devenir drôlement urgent. Qu'est-ce qu'on ne ferait pas pour échapper à une lecture infructueuse, c'est fou quand même, cet instinct de survie insoupçonné...
- En 4e position : Au pays du p'tit, de Nicolas Fargues
N'est pas Houellebecq qui veut (si on m'avait dit que j'écrirais ça un jour...), l'ami Nicolas s'est pris pour son disciple et n'a réussi qu'à se produire en pâle copie. La distance cynique qui devrait donner de la contenance à son roman s'est fait la malle, il ne reste qu'un écrit relativement vulgaire et flasque, où un écrivaillon auto-centré (je parle du protagoniste, pas de l'auteur bien sûr) cherche à tout prix à baiser une étudiante russe. Attendez néanmoins le livre en 3e position avant de chercher à vous ouvrir les veines, il y a encore du niveau à venir. 
- En 3e position : La fille de Brooklyn, de Guillaume Musso
Un bon flop se doit de contenir une production commise par Levy ou Musso, sous risque de perdre toute sa crédibilité. Grâce au ciel (et à ma bibliothèque), La fille de Brooklyn m'est tombé entre les mains, et me permet aujourd'hui d'apparaître devant vous telle une grande martyre, parce que s'infliger une lecture de cet ordre est le plus effroyable des supplices. Venons-en au fait : une ouverture qui se veut théâtrale et qui est en réalité grotesque, des rebondissements qui ont tout piqué à l'univers du thriller sans grande ingéniosité, des personnages pâlots dont on ne voudrait pas à notre table en séminaire professionnel, et surtout, surtout, une richesse d'écriture qui fait passer les slogans publicitaires pour shampoing pour de la très haute littérature. Comme dirait la Reine Rouge, qu'on lui coupe la tête.
- En 2e position : Le dernier des nôtres, d'Adélaïde de Clermont-Tonnerre
Grand Prix de l'Académie Française. Quand j'y pense, j'ai envie de lobotomiser la France. Toute. Entière. C'est insensé, de remettre un prix prestigieux à un roman de cet acabit - que dis-je, un roman? Une expérience, éventuellement, et je vous jure qu'elle est odieuse. L'auteur vogue sur le succès du sensationnel bidon auprès d'un lectorat perdu, le point culminant étant atteint lorsqu'une vieille dame brandit en public le pénis d'un vieux monsieur pour montrer qu'il est, ou pas, son bourreau d'Auschwitz. Je ne me remets toujours pas de cette scène, je le confesse, elle a fait de mes jours et de mes nuits un enfer, à toute heure les larmes menacent de me dévaster tant j'ai perdu ma foi en l'humanité. Je vous en conjure, ne faites pas l'erreur que j'ai commise, gardez-vous de lire ce truc.
- En 1ère position : On regrettera plus tard, d'Agnès Ledig
Comme le dernier bouquin d'Agnès Martin-Lugand s'est révélé étonnamment meilleur que ce que j'imaginais (attention, c'est pas non plus le livre de l'année, mais bon, le progrès est en marche), j'ai dû me reporter sur une autre Agnès, dont le dernier roman, moins abominable que Les gens heureux lisent et boivent du café, n'en est pas moins une pépite de stupidité, un conglomérat de clichés qui font pleurer de rage et de révolte, une insulte à la littérature honnête, une pichenette à la face d'un lectorat désireux de s'élever un tant soit peu en lisant, la preuve irréfutable qu'il faut interdire l'accès à un ordinateur/une tablette/un cahier et un stylo/un menhir à graver à certaines personnes, qui peuvent sans cela rendre dépressives plusieurs générations d'aventuriers de la lecture, et participer à l'avènement d'une idiocratie, comme dans le film. Braves lecteurs, indignez-vous, révoltez-vous, refusez les doubitchous que l'on vous enfourne de force au fond de la gorge, vous méritez mieux.
Et bisous à tous!