Depuis sept ans la terre est ravagée par un virus inconnu ayant fait disparaitre la quasi-totalité de la population. Les enfants nés après le début de l’épidémie semblent immunisés. Ce sont des enfants hybrides, mi-humains, mi-animaux. Gus est l’un d’eux. Enfant cerf, il n’a jamais quitté les bois. Son père le lui a toujours interdit car, « en dehors des bois, il y a le feu et l’enfer ». A la mort de ce dernier Gus est capturé par des chasseurs. Secouru par le mystérieux Jepperd, il se résigne à désobéir aux recommandations paternelles et à suivre son sauveur jusqu’à la réserve, un endroit où, théoriquement, il sera en sécurité.
Encore du post apocalyptique, encore une pandémie destructrice et des enfants livrés à eux-mêmes. Je ne suis ni fan ni spécialiste du genre mais je suis en train de lire « Dans la forêt » qui aborde le même thème et ma fille m’avait traîné au cinéma l’an dernier pour voir la « Cinquième vague », à peu près dans le même créneau. Sans compter le fait que Gus m’a, par bien des aspects (naïveté et découverte du monde dans toute sa sauvagerie et sa complexité), rappelé Le garçon de Marcus Malte. Bref, il y avait un vrai risque de saturation avec ce Comics que Mo a eu la gentillesse de déposer au pied de mon sapin il y a 15 jours. Et pourtant je me suis régalé de bout en bout.
Je retrouve dans cette série des thèmes récurrents chez l’auteur de Jack Joseph, à savoir le difficile rapport au père, la religion, la construction de l’identité, le sentiment d’abandon lié à la perte d’un proche, la violence et même le hockey sur glace. La dimension post apocalyptique est ici un prétexte pour aborder la question de la culpabilité, du passage de l’innocence à « l’expérience », de l’ignorance à la prise de conscience. Jepperd est le guide de Gus, son protecteur, celui sans lequel le garçon ne pourrait affronter le monde des hommes et leur méchanceté primaire. Mais ce n’est évidemment pas si simple. Chaque épisode de la série (il y en a onze dans ce premier tome) pousse plus loin l’ambivalence des rapports humains et souligne l’ampleur des désillusions, même si une infime trace de lumière continue de vaciller dans les ténèbres sans jamais s’éteindre totalement.
Graphiquement c’est brut de décoffrage, le trait est aiguisé comme une lame et le cadrage sans faille tient le lecteur en haleine, jouant sur l’alternance entre des séquences pied au plancher et d’autres presque contemplatives. Et j’aime toujours autant cette représentation de la violence sans complaisance ni esthétisation excessive qui est un peu la marque de fabrique du dessinateur.
Il y a quelque chose de poignant et d’unique dans ce récit au départ des plus classiques. Lemire s’empare du sujet avec une maîtrise, une puissance et un angle d’attaque qui lui donne une véritable originalité. Un tour de force absolument épatant qui m’a laissé pantelant au moment de tourner la dernière page. Le troisième et dernier tome vient tout juste de sortir, mon banquier ne va pas remercier Mo de m’avoir fait découvrir une série aussi addictive parce qu’il est évident que je vais me jeter sur la suite sans plus attendre.
Sweet Tooth T1 de Jeff Lemire (traduction Benjamin Rivière). Urban Comics , 2015. 280 pages. 22,50 euros .
Encore du post apocalyptique, encore une pandémie destructrice et des enfants livrés à eux-mêmes. Je ne suis ni fan ni spécialiste du genre mais je suis en train de lire « Dans la forêt » qui aborde le même thème et ma fille m’avait traîné au cinéma l’an dernier pour voir la « Cinquième vague », à peu près dans le même créneau. Sans compter le fait que Gus m’a, par bien des aspects (naïveté et découverte du monde dans toute sa sauvagerie et sa complexité), rappelé Le garçon de Marcus Malte. Bref, il y avait un vrai risque de saturation avec ce Comics que Mo a eu la gentillesse de déposer au pied de mon sapin il y a 15 jours. Et pourtant je me suis régalé de bout en bout.
Je retrouve dans cette série des thèmes récurrents chez l’auteur de Jack Joseph, à savoir le difficile rapport au père, la religion, la construction de l’identité, le sentiment d’abandon lié à la perte d’un proche, la violence et même le hockey sur glace. La dimension post apocalyptique est ici un prétexte pour aborder la question de la culpabilité, du passage de l’innocence à « l’expérience », de l’ignorance à la prise de conscience. Jepperd est le guide de Gus, son protecteur, celui sans lequel le garçon ne pourrait affronter le monde des hommes et leur méchanceté primaire. Mais ce n’est évidemment pas si simple. Chaque épisode de la série (il y en a onze dans ce premier tome) pousse plus loin l’ambivalence des rapports humains et souligne l’ampleur des désillusions, même si une infime trace de lumière continue de vaciller dans les ténèbres sans jamais s’éteindre totalement.
Graphiquement c’est brut de décoffrage, le trait est aiguisé comme une lame et le cadrage sans faille tient le lecteur en haleine, jouant sur l’alternance entre des séquences pied au plancher et d’autres presque contemplatives. Et j’aime toujours autant cette représentation de la violence sans complaisance ni esthétisation excessive qui est un peu la marque de fabrique du dessinateur.
Il y a quelque chose de poignant et d’unique dans ce récit au départ des plus classiques. Lemire s’empare du sujet avec une maîtrise, une puissance et un angle d’attaque qui lui donne une véritable originalité. Un tour de force absolument épatant qui m’a laissé pantelant au moment de tourner la dernière page. Le troisième et dernier tome vient tout juste de sortir, mon banquier ne va pas remercier Mo de m’avoir fait découvrir une série aussi addictive parce qu’il est évident que je vais me jeter sur la suite sans plus attendre.
Sweet Tooth T1 de Jeff Lemire (traduction Benjamin Rivière). Urban Comics , 2015. 280 pages. 22,50 euros .