Deux enfants du demi-siècle de Charles Nemes

Par Marine Et Camille @puydeslivres


" Toussaint perdit Thérèse par défaut d'ardeur, puis de courage, enfin de sentiment. Il découvrit les limites de la passion enfantine ; ils ne s'aimaient pas autant qu'ils le juraient. Ils avaient été l'un pour l'autre le premier, l'initiatrice, le découvreur, l'inespérée. Ils n'étaient que gauches, inéduqués et ne concevaient le monde qu'à travers leurs regards posés l'un sur l'autre. Passé les larmes éternelles et les tentations de suicide, ils avaient accepté de se manquer, de souffrir moins, de scruter enfin l'horizon. "
Quarante ans après leur rencontre, Thérèse et Toussaint se retrouvent, empotés du coeur et du corps, comme lors de leur premier slow d'adolescents. Ces deux enfants fiévreux sont-ils devenus, chacun de leur côté, de meilleurs parents que ceux qu'ils ont combattus ? Les familles ne font pas de cadeau. L'histoire et le rêve non plus.

Je remercie Charlotte et la librairie Sauramps ( Montpellier ) pour leur confiance et l'envoi de ce livre. Charles Nemes porte de nombreuses casquettes. Celle de réalisateur, d'acteur et d'auteur. Aujourd'hui je vais vous parler de lui en tant qu'auteur. Son septième roman,
Deux enfants du demi siècle est sur les étagères des librairies françaises depuis le 19 janvier de cette année.
Deux enfants du demi siècle retrace le parcours de deux soixante-huitards.
Thérèse et Toussaint se sont aimés à l'heure où les premiers émois amoureux font vibrer le corps et le cœur. Lui issu d'une famille bourgeoise catholique et elle fille de rabbin. Leur idylle sera aussi brève qu'intense. La différence religieuse, de classe et la peur de l'inconnu vont pousser les parents des tourtereaux à couper court à cet amour naissant qui régit les faits et gestes.
Si le manque cédera peu à peu la place aux souvenirs, Thérèse et Toussaint ne s'oublieront jamais tout à fait. Mais la vie n'attends pas, elle rafle tout sur son passage et emporte de gré ou de force ses passagers dans un tourbillon de moments qui mis bout à bout forment des jours, des mois, des années, des décennies qui seront marqués par le plaisir, la tragédie, l'absence, le bonheur, l'attente...
A l'aube de la retraite, Thérèse et Toussaint jettent un regard sur tout ce qui fait qu'ils sont devenus eux même aujourd'hui. La vie est une source inépuisable de surprises. Un jour un dossier va atterrir sur le bureau de fonctionnaire dans une caisse de retraite de Thérèse. Ce dossier porte le nom de Toussaint Le grand. Hasard ou destinée ? Peu importe, les choses sont parfois bien faites et permettent d'entrevoir un autre avenir que celui qui se profilait à l'horizon.
Charles Nemes dresse le portrait de deux personnages " lambda " qui jettent un regard sur leur vie passée. Jeunesse, mariage, enfant(s), boulot(s)... Toutes ces choses qui occupent une existence entière ou presque. S'y ajoute les questions existentielles, l'envie de vivre, d'avancer, d'évoluer, d'apprendre.... Le passé de Thérèse et Toussaint réponds aux questions du présent.
Les retrouvailles ne sont pas la finalité de ce livre. L'histoire donne matière à réflexion sur les choix que nous faisons et sur ce qui va en découler. Thérèse et Toussaint se révèlent au lecteur sans pudeur ni faux semblant.
Charles Nemes a donné une (trop) grande place au judaïsme ( origine de Thérèse) dans la vie de ces personnages. Si ce fil rouge a relié les anciens amants tout au long du roman, cette exploitation a perdu de son sens avec les retrouvailles de Thérèse et Toussaint. La tournure donné au présent des personnages n'a pour moi aucune raison d'être. Un livre a toujours un dénouement et une fin mais pourquoi tomber dans l'excès quand la juste mesure a été utilisée dans la majeure partie du livre ?
Deux enfants du demi siècle est un roman très agréable à lire, qui a su me toucher et qui parfois m'a fait réfléchir mais qui malheureusement s'est achevé sur une fausse note. Sans être mauvaise, les dernières pages me laissent un goût amer. Mais au final, n'est-ce pas ça la vie ? Des hauts et des bas sans possibilité de maîtriser quoi que ce soit...

" Toussaint inhala une bouffée de plusieurs litres, il était redevenu un fumeur authentique. Valentine eut un sourire déconcertant.
- Réponses à toutes les questions que tu as envie de me poser mais que tu retiens pour ne pas avoir l'air d'un papy : il a mon âge, il s'appelle Victor, il clope moins que moi, il ne boit pas d'alcool, il n'est pas sportif du tout, il est taillé style crevette, un peu dans ton genre quand tu étais ado - j'ai vu les photos -, , ses parents sont libraires et c'est lui qui m'a donné l'idée du Primo Levi, pas mon prof de français. C'est un bouquin italien, je te rappelle. Ah oui, on ne fait pas attention, comme tu allais demander, puisqu'on n'a pas encore fait l'amour, mais ce jour-là, je te le jure, on fera très gaffe. Ca te va ?
Vieux con, et content. Quel bel anniversaire. "