Le bon livre — Le bon livre est celui qui conduit vers d’autres ouvrages, vers d’autres auteurs, d’autres curiosités. Comme celui que je viens de terminer : Voyage en URSS de Romain Rolland.
On y trouve des portraits de Staline, Radek, Iagoda, Boukharine, Kaganovitch, Gorki… De tous ceux qu’il a rencontrés lors de ce voyage et qui étaient des satrapes absolutistes à l’époque. Quelques années plus tard, le camarade Staline en aura exécuté plusieurs, à la suite des procès de Moscou.
Rectitude politique — Je hais la rectitude politique. Celle qui consiste à dire qu’un aveugle est un malvoyant ; que si vous êtes contre le contrôle des armes de chasse, vous êtes un complice de Marc Lépine ; que si vous avez des hésitations devant l’avortement, vous êtes un Jean-Guy Tremblay ; que les communistes ont peut-être fait des choses aussi horribles que les Puissances de Droite, lors de la Deuxième Guerre mondiale – et après, avec Mao et Pol Pot –, mais qu’eux, au moins, avaient de bonnes intentions…
Je lis donc avec plaisir Prendre le large, les carnets d’André Major, où je trouve ce passage délicieux :
Dans Le Monde des livres, Nicole Zand consacre à la réédition des œuvres d’Arthur Koestler, auteur peu lu de nos jours, un article où elle rappelle que la gauche intellectuelle française était tellement soumise à l’idéologie communiste que le traducteur du Zéro et l’Infini refusa de signer son travail. C’était l’époque, rappelle-t-elle, où de brillants esprits comme Sartre et Beauvoir pratiquaient l’aveuglement volontaire. Cette pensée captive existe toujours de nos jours, elle s’appelle rectitude politique et morale. On ne voit d’ailleurs pas pourquoi l’intelligentsia d’aujourd’hui serait plus lucide et surtout plus courageuse que celle qui faisait la loi il y a cinquante ans.
Toute pensée qui se soumet à une idéologie se condamne à la myopie ; que cette idéologie soit à la mode n’excuse personne, à commencer par les intellectuels, supposément doués d’esprit critique.
Bon à lire et entendre.
L’auteur : Alain Gagnon a remporté à deux reprises le Prix fiction roman du Salon du Livre du Saguenay–Lac-Saint-Jean pour Sud (Pleine Lune, 1996) et Thomas K (Pleine Lune, 1998). Quatre de ses ouvrages en prose ont ensuite paru chez Triptyque : Lélie ou la vie horizontale(2003), Jakob, fils de Jakob (2004), Le truc de l’oncle Henry (2006) et Les Dames de l’Estuaire (2013). Il a reçu à quatre reprises le Prix poésie du même salon pour Ces oiseaux de mémoire (Le Loup de Gouttière, 2003), L’espace de la musique(Triptyque, 2005), Les versets du pluriel(Triptyque, 2008) et Chants d’août (Triptyque, 2011). En octobre 2011, on lui décernera le Prix littéraire Intérêt général pour son essai, Propos pour Jacob (La Grenouille Bleue, 2010). Il a aussi publié quelques ouvrages du genre fantastique, dont Kassauan,Chronique d’Euxémie et Cornes (Éd. du CRAM), et Le bal des dieux(MBNE) ; récemment il publiait un essai, Fantômes d’étoiles, chez ce même éditeur. On compte également plusieurs parutions chez Lanctôt Éditeur (Michel Brûlé), Pierre Tisseyre et JCL. De novembre 2008 à décembre 2009, il a joué le rôle d’éditeur associé à la Grenouille bleue. Il gère aujourd’hui un blogue qui est devenu un véritable magazine littéraire : Le Chat Qui Louche 1 et 2(https://maykan.wordpress.com).