Gus tome 4: Happy Clem (Christophe Blain – Editions Dargaud)
Fini les braquages de banques et les attaques de diligences. Après avoir fait les 400 coups ensemble, les hors-la-loi Gus, Clem et Gratt poursuivent désormais leur vie chacun de leur côté. Certes, Gus a formé un nouveau gang, mais il a perdu la main. Après une attaque de train qui a failli mal tourner, il décide de liquider tous ses complices, histoire de s’assurer que sa réputation demeure intacte. Et ça marche, puisque dans les journaux, c’est bel et bien au bandit légendaire Gus Flynn qu’on attribue le braquage de train le plus spectaculaire de l’histoire. Voilà qui énerve prodigieusement Clem, qui ne peut s’empêcher d’être jaloux du succès médiatique de Gus. En tant qu’honnête propriétaire d’un magasin de quincaillerie à San Francisco, Clem tente de mener une vie bien rangée avec sa charmante femme Ava, devenue une romancière à succès, et son adorable fille Jamie, qui est loin d’être aussi sage qu’elle en a l’air, mais l’appel de l’aventure est trop fort. Le respectable commerçant ne peut tout simplement pas y résister. Sans en parler à Ava et Jamie, Clem reprend donc contact avec Gratt. Déguisés en « beaux bandits », avec chapeau haut-de-forme, masque, cape et queue-de-pie, les deux anciens compères se remettent à braquer des banques, avec comme objectif de faire aux aussi leur entrée dans le « who’s who » du Far West. Mais c’est sans compter sur deux inquiétants personnages qui vont leur mettre des bâtons dans les roues: d’un côté le mystérieux peintre Eliphalet Van Vliet, dont la passion pour la dynamite ne va pas tarder à mettre toute la ville de San Francisco en danger, et de l’autre côté le déterminé colonel Radl. Loin d’être impressionné par le costume de Clem, ce dernier semble prêt à tout pour mettre le sympathique outlaw derrière les barreaux…
Il aura fallu patienter 8 longues années pour pouvoir lire enfin la suite de « Gus », mais l’attente en valait largement la peine! Il suffit de quelques pages pour replonger avec délice dans le western atypique et virevoltant de Christophe Blain. Faire un résumé de « Gus » est tout simplement mission impossible. A mille lieues du western classique, dont elle emprunte seulement le décor, cette série burlesque mélange aventure, comédie sentimentale et psychanalyse. Christophe Blain dit lui-même que son objectif avec ce tome 4 était d’aborder les thèmes du couple et de la paternité, ce qu’il fait par le biais de la relation touchante entre Clem, Ava et Jamie, trois personnages aussi complexes qu’attachants. Mais comme dans les 3 précédents tomes de la série, l’auteur des BD « Isaac le pirate » et « Quai d’Orsay » est loin de se limiter à un thème central. Au fil des 104 pages de l’album, Blain développe des dizaines d’histoires et de personnages plus loufoques les uns que les autres, avec toujours cette imagination foisonnante qui le caractérise et des dialogues qui font mouche. Tour à tour trépidant, émouvant ou hilarant, « Gus » constitue une sorte de montagne russe de la bande dessinée: on est balloté dans tous les sens, mais qu’est-ce qu’on prend comme plaisir! Au niveau du graphisme, ce tome 4 contient des références graphiques qui plairont aux amateurs de cinéma et de musique, puisque Christophe Blain a donné à plusieurs de ses personnages les traits de figures marquantes de la culture américaine. Dans « Happy Clem », on croise ainsi le rocker Don Van Vliet (alias Captain Beefheart), mais aussi les acteurs Robert Duvall, Gene Wilder et Sterling Hayden. A noter que « Happy Clem » se termine sur l’annonce d’un cinquième album baptisé « Rose ». Espérons qu’il ne faudra pas attendre huit ans pour pouvoir en profiter!