Les gens heureux lisent et boivent du café.
" Ils étaient partis en chahutant dans l'escalier. [...] J'avais appris qu'ils faisaient encore les pitres dans la voiture, au moment où le camion les avait percutés. Je m'étais dit qu'ils étaient morts en riant. Je m'étais dit que j'aurais voulu être avec eux. "
Diane perd brusquement son mari et sa fille dans un accident de voiture. Dès lors, tout se fige en elle, à l'exception de son cœur, qui continue de battre. Obstinément. Douloureusement. Inutilement. Égarée dans les limbes du souvenir, elle ne retrouve plus le chemin de l'existence. C'est peut-être en foulant la terre d'Irlande, où elle s'exile, qu'elle apercevra la lumière au bout du tunnel.
J'avais depuis longtemps envie de découvrir la plume d'Agnès Martin-Lugand, notamment avec ce roman dont j'ai entendu énormément de bien depuis sa parution. Cependant je repoussais toujours le moment de le sortir de ma bibliothèque de peur de ne pas être dans de très bonnes conditions pour le lire au vue de son sujet difficile. Finalement même si le moral n'est pas au beau fixe ces derniers temps, Les gens heureux lisent et boivent du café... fait l'effet d'une thérapie.
Car même si c'est un roman triste qui aborde le sujet très difficile du deuil c'est également un roman rempli d'espoir qui m'a beaucoup ému. Il semble inimaginable de pouvoir s'en sortir lorsque l'on a perdu comme Diane son mari et sa fille dans un accident de la route, et que l'on se retrouve seule du jour au lendemain. Comment avoir envie de se lever chaque matin et de continuer à vivre, alors que tout nous rappelle les êtres que l'on a perdu? Comment aller travailler, sourire, alors que la moindre chose nous paraît insurmontable, et que l'on préférerait mourir à son tour pour ne plus éprouver cette douleur, ce manque?
Diane est une femme qui m'a évidemment beaucoup touché et que j'ai eu envie de soutenir à chaque étapes de son deuil. Déni, colère, dépression, depuis leur mort Diane survit plus qu'elle ne vit, elle ne travaille plus dans son café littéraire, reste enfermée chez elle au milieu des affaires de son mari et de sa fille dont elle n'a pas encore eu le courage de se séparer. Heureusement elle peut compter sur son meilleur ami Félix, que j'ai adoré pour son humour et pour l'énorme soutien qu'il lui apporte au quotidien. Même si comme lui on a envie de secouer Diane pour qu'elle reprenne enfin sa vie en main, on ne peut au final que comprendre le vide qu'elle ressent.
Felix est l'ami grâce auquel elle n'a pas totalement sombré, c'est aussi lui qui va lui servir d'électrochoc et qui va lui permettre sans le savoir d'avancer. J'ai totalement compris le choix de Diane de tout quitter, de partir loin de tous ses souvenirs, et loin de Félix qui commence à l'étouffer, même si elle le sait son but est de l'aider. Cependant j'ai été un peu déçue par la suite du roman et par sa rencontre avec Edward. Le fait qu'elle tombe amoureuse d'un homme en Irlande m'a semblé un peu cliché et pas vraiment crédible au vue de l'état psychologique dans lequel elle est. Malgré tout j'ai été ravie de constater que finalement l'auteure prend la direction opposée à laquelle tout le monde s'attendait, ce qui m'a semblé à mon sens plus logique.
Enfin, la plume d'Agnès Martin-Lugand m'a conquise, elle a un style d'écriture très simple, avec des phrases courtes mais qui vont à l'essentiel. Elle arrive en quelque mots à nous faire comprendre les sentiments des personnages et à nous toucher, une facilité dû certainement à ses talents de psychologue, son premier métier. Sans aucun doute je lirai la suite avec plaisir ainsi que les autres écrits de cette auteure.
Un petit roman très court mais très complet sur le difficile travail de deuil et la reconstruction de soi. Même si j'ai été déçue par la tournure qu'a pris l'histoire par la suite, j'ai néanmoins beaucoup aimé la fin choisi par l'auteure. Une jolie plume et un joli message d'espoir, qu'apprécieront en prime tous les amoureux des livres.
Ma note: 17/20.