Rachel et Rosa, de Ismaël Saidi, Éditions Jourdan, 2016, 138pages.
L’histoire
Entre les brumes de Central Park et la douleur de la porte du « Voyage sans retour », entre New York et l’île de Gorée, Rachel, la juive, et Rosa, la musulmane, n’étaient pas faites pour se rencontrer.
Il fallait la plume tendre et l’œil malicieux d’Ismaël Saidi pour rendre ce chemin de vie possible.
Parce que, plus que tout, les promesses, même les plus folles, sont faites pour être tenues au-delà de nous-mêmes.
Note : 4/5
Mon humble avis
Merci à Babelio et aux Éditions Jourdan pour l’envoi de ce livre en échange d’une chronique honnête.
Je ne connaissais pas du tout l’auteur, qui a déjà écrit des pièces de théâtre, notamment Djihad et Les Aventures d’un musulman d’ici, mais j’étais ravie de la réception de ce roman pour pouvoir découvrir son travail. La quatrième de couverture m’avait séduite puisque j’étais curieuse de voir la relation que pouvaient développer ces deux dames âgées que tout semble opposer au premier regard.
Rachel et Rosa est présenté comme le premier roman d’Ismaël Saidi, mais même sans savoir qu’il est avant tout dramaturge, on se rend très vite compte de l’aspect foncièrement théâtral du livre : la majorité de l’histoire est constituée de dialogues et les quelques descriptions pourraient tout à fait être des indications scéniques, sans parler de la présence de didascalies, des indications entre parenthèses qui agrémentent les dialogues et qui font d’ordinaire, dans un roman, parti de la narration :
– (intriguée) Vous ne m’avez pas dit que vous aviez un mari ?
Soyons clairs : cela n’est aucunement gênant pour la lecture de l’histoire, que j’ai beaucoup appréciée, seulement Rachel et Rosa donne l’impression d’être une pièce déguisée en roman. Je ne sais pas si c’était voulu, de la part de l’auteur ou de l’éditeur mais c’est toujours amusant à remarquer. Par contre, quelque chose qui m’a un peu plus titillé vient de l’édition même du texte, et particulièrement de sa mise en page : l’espacement entre les lignes est bien plus grand que nécessaire, particulièrement pour les dialogues, on a l’impression qu’un paragraphe a été sauté entre chaque réplique. Ce ne serait pas gênant si cela s’arrêtait là, seulement parfois, on retrouve des espaces beaucoup plus importants et on pense (naturellement, me semble-t-il) qu’il s’agit d’une ellipse et que la scène va changer… alors que non. Bref, la mise en page fait défaut je trouve : entre les espaces et la grande taille de police de caractère, une édition différente (mais tout aussi lisible, voire plus), aurait peut-être pu réduire la taille du livre de moitié. Ou alors c’est une stratégie pour attirer les lecteurs occasionnels ou récalcitrants.
Excusez la tirade sur ce que beaucoup doivent considérer un détail, mais j’ai tiqué plusieurs fois à cause de ces espacements (et des quelques erreurs ortho-typo… mais sur le prénom d’une protagoniste, c’est pas glorieux quand même).
Venons-en au principal : l’histoire. Rachel est une vieille dame juive qui entre en maison de retraite à cause de sa maladie d’Alzheimer : mieux vaut qu’elle soit surveillée. Alors qu’elle y met de la mauvaise volonté et refuse plus ou moins de s’adapter à ce nouvel environnement, une catastrophe survient en l’arrivée de Rosa, avec qui elle devra partager la chambre. Le roman montre l’évolution de la relation entre ces personnages, jusqu’à une amitié (voire plus, au lecteur de décider) magnifique et invincible.
Rosa est musulmane et j’ai particulièrement apprécié la scène où Rachel se permet de faire un amalgame entre origines arabes / musulmans pratiquants, et que Rosa la reprend. C’est toujours rafraîchissant d’avoir des points de vue éclairés sur ces sujets-là, d’autant que Rachel respecte complètement la religion de sa nouvelle amie.
Rachel a un côté agaçant, à être récalcitrante envers toute proposition, sans chercher pour autant d’autres solutions plausibles… mais elle reste attachante, d’autant que la dédicace de l’auteur nous fait penser qu’il a écrit Rachel et Rosa avec ses propres grands-mères en tête, et cet attachement transparaît dans son écriture.
Une très belle lecture, courte et pleine d’émotion, que je vous recommande vivement !
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