" Lucien Febvre avait en tête d'écrire une histoire de la fiche érudite. Ce dispositif, connu dans le monde des bibliothèques, a eu des effets très directs et concrets sur les savoirs savants, leur accumulation, leur validation, et leur diffusion entre 1850 et 1980. L'ouvrage croise une approche historique, linguistique, anthropologique, voire pathologique, d'outils dont le but est d'inscrire des données, mais aussi de compiler, de commenter, de croiser. "
Lors du dernier Masse Critique de Babelio, j'ai été sélectionnée (youhou !). Babelio organise régulièrement des opérations Masse Critique. Chaque participant sélectionne les ouvrages qui l'intéresse au sein de la pré-sélection de Babelio et une semaine plus tard vous recevez un mail pour savoir si vous avez été sélectionné ou non. Ce fut mon cas cette fois-ci. J'ai donc reçu un des livres que j'avais choisi : Une histoire de la fiche érudite de Jean-François BERT. Le thème du livre n'est pas très sexy mais il m'a interpellée. Je me demandais réellement ce qu'on pouvait étudier au travers de l'histoire de la fiche érudite et ce qu'était une fiche érudite. Je ne regrette pas mon choix.
Cet ouvrage se compose de cinq chapitres qui permettent de comprendre l'impact de la fiche dans le milieu scientifique, en particulier celui des sciences humaines :
- De la pile à la fiche
- Principes et fonctions d'un système savant avantageux
- Ficheurs, fichards et autres maçons de la science
- De quelques " pathologies " liées à un emploi excessif du système
- Les fiches ont-elles disparu ?
Ce livre a donc pour but de retracer la diffusion et les transformations de la mise en fiche dans l'ensemble de la communauté savante et par cela, il interroge trois impensés de l'histoire des sciences humaines : l' identité du savant pour lequel la fiche est devenu un élément de distinction, les styles savants et les savoir-faire scripturaires partagés par une communauté. L'auteur en profite aussi pour mettre en avant les critiques qu'a connu cette pratique particulièrement au XXe siècle : il est reproché aux " fichards " de ficher pour ficher dans une simple volonté d'accumulation sans être capable d'utiliser cette matière de manière innovante. Pourtant la fiche a toujours son succès au XXIe siècle.
J'ai apprécié la lecture de ce livre. Il est fluide même si l'accumulation d'exemples dans les deux derniers chapitres n'est pas toujours utiles à mes yeux. Il se lit vite notamment car son construction est bien pensée. Je ne suis pas une spécialiste de la question, je vous donnerai donc mon avis de néophyte. Cet ouvrage m'a fait réfléchir sur un outil que nous avons tous utilisé pendant nos études supérieures : ficher un livre, un cours, un article, ... surtout si on a passé des concours. La fiche a donc fait partie de mon quotidien mais je n'ai jamais réfléchi à son utilité et à ses conséquences sur notre manière de concevoir notre savoir. A posteriori je trouve cela dommage, j'ai un autre regard dessus.
Pour conclure
Cet ouvrage m'a apporté de nouvelles perspectives dans la manière de penser une période. J'avais clairement sous-estimé l'importance des outils dans les sciences et de leurs implications. Il m'a également conforté sur un point de vue : l'utilisation d'un outil intellectuel ou non doit être réfléchi en amont, on n'utilise pas un outil uniquement parce qu'il est à la mode mais car il peut nous apporter quelque chose. L'outil pour l'outil n'a aucun intérêt à mes yeux.
Je vous souhaite de belles découvertes !BERT, Jean-François. Une histoire de la fiche érudite. Villeurbanne : Presses de l'ENSSIB, 2017. 144 p. (Papiers). 23€00. L'ouvrage est accessible en ligne gratuitement ici.
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