Marc Graciano, « Au pays de la fille électrique »

Par Mybooksaremyhome

Voici un livre dont la quatrième de couverture m’a immédiatement attirée. Une histoire de violence et de reconstruction, des thèmes difficiles mais chers à mon coeur.

Présentation de la maison d’édition
Au pays de la fille électrique est d’abord un livre choc sur la violence. Le récit s’ouvre par un prologue d’une cruauté absolue. Une bande de dégénérés sous l’empire de la drogue et de l’alcool s’en prend à la première fille rencontrée. Leur cruauté, leur acharnement sadique témoignent d’une rupture complète avec Vidée même de civilisation et nous rappellent la bande d’Orange mécanique. La capacité de Marc Graciano à nous plonger dans les situations extrêmes est proprement fascinante. La nature, les animaux, les éléments, quelques rares êtres humains offrent un contrepoint lumineux et sensuel à la barbarie du monde. Quelque chose qui nous dépasse résiste à tout et peut renaître.

Il y a d’abord la scène du viol. Un longe phrase d’une trentaine de pages, ponctuée de « et », dont la lecture est étouffante car impossible à arrêter malgré le propos insoutenable. Il y a la violence, les humiliation, et chaque fois que je me dit que c’est fini, que ça ne peut pas aller plus loin, l’auteur monte une marche de plus sur l’escalier de l’insupportable, puis une autre. J’ai lu ce chapitre une main sur la bouche, le coeur au bord des lèvres et la peur, physique, de vomir.

Après, il y a ce chemin, littéral, de la reconstruction. Le texte est beau mais très lent, presque ennuyeux. Chaque geste est décrit avec une minutie dont je n’ai pas vraiment perçu le sens. Si chaque action me paraissait logique, douloureuse mais évidente, je suis totalement passée à côté du parti pris stylistique: encore des phrases très longues ; le « et » a été remplacé par un « puis » qui semble laisser plus de temps au temps mais qui, à la longue, est devenu lassant.

Il y a cette communion entre la fille – qui ne sera jamais nommée – et la nature, qui est très belle, très poétique, mais dont, encore une fois, je n’ai pas compris ce qu’elle venait faire dans l’histoire. Elle lui apporte du beau, et peut-être que je ne devrais pas aller chercher plus loin. Accepter la beauté pour elle-même, sans qu’elle soit au service de quoi que ce soit, mais accepter qu’elle existe, simplement. Parce que le beau, ça fait du bien.

Enfin, il y a cet épilogue, dont les critiques, sans le révéler, chantent les louanges avec enthousiasme. Le problème, c’est que ce qui se veut un moment de grâce m’est arrivé en pleine tronche sans que j’y comprenne rien: les mots oui, la scène finale oui, mais encore une fois, où est le sens ? Apparemment, l’auteur voudrait prendre la violence à son propre piège en la sublimant, en racontant le très beau très gracieux très léger qui se passe après. Comme une renaissance. Sauf que cet épilogue-là, après ce traumatisme-là, ce n’est pas possible. Les dernières pages sont sublimes, la langue est magnifique, mais même si c’est de la littérature, même si la littérature cherche la vérité plus que la réalité, je pense – non, en fait j’affirme – que l’auteur se trouve à des années lumières de la vérité. Je suis incapable de prendre de la distance face à ce qu’il raconte, et cette fin-là m’a paru tellement impossible, tellement inenvisageable, même, que je n’ai pas réussi à l’apprécier à sa – peut-être – juste valeur.

Au pays de la fille électrique est donc un roman qui, passé l’insoutenable prologue, m’a fait passer un beau moment littéraire. La langue est parfaitement maîtrisée, et je crois que l’auteur sait exactement où il va. Sauf que je n’ai pas compris, moi, où il veut m’emmener, et je me suis retrouvée, au final, avec un goût très amer dans la bouche, qui ne m’a pas quittée.